Le conflit entre les intermittents du spectacle et le Gouvernement, à propos de l’accord sur l’assurance-chômage du 22 mars, se durcit jour après jour. Les festivals sont menacés. Et les collectivités territoriales, partenaires de premier rang de ces manifestations artistiques et culturelles essentielles, ne peuvent assister sans voix à une escalade de protestation et de méfiance qui éloigne peu à peu tout espoir de conciliation. C’est pour cela que j’ai choisi de m’exprimer.
Artiste n’est pas un métier ordinaire
Parce que la Culture est un ingrédient indispensable à l’épanouissement personnel et au développement du lien social, chacun doit pouvoir apprendre et se cultiver à n’importe quel âge et quel que soit son revenu. Les artistes et techniciens ont besoin d’un régime spécifique qui prenne en compte la nature discontinue de leurs métiers.
Une réforme proportionnée du régime est nécessaire
Face à la dette accumulée, reflet d’un pays qui a vécu au-dessus de ses moyens durant de longues décennies, nous devons tous faire des efforts proportionnés. Cette réforme doit contenir deux exigences : tenir compte des spécificités du métier d’intermittent (temps de création longs et le plus souvent non rémunérés, précarité, niveau de rémunération bas, absence de prime de licenciement…) et contenir les coûts des annexes 8 et 10.
Il n’y a aucune raison qu’on ne puisse pas articuler ces deux exigences.
Tous les éléments sont réunis
Tous les éléments d’une concertation efficace, respectueuse des nécessités de la vie artistique et des impératifs économiques, existent.
Les parlementaires ont travaillé avec rigueur et réalisme pour identifier les voies qui permettent non seulement de contenir le coût des annexes 8 et 10, mais aussi d’en imaginer un fonctionnement plus juste, plus solidaire. De leur côté, les professionnels ont également avancé des pistes rigoureuses. Les bases d’une discussion approfondie et fructueuse sont sur la table. Elles doivent d’urgence être prises en compte, hors de toute menace, de tout chantage, hors de tout emballement et de tout raidissement.
Ce conflit met aujourd’hui en péril la vie économique et culturelle de notre pays
Comme l’a récemment démontré une étude du Ministère de l’Economie, les manifestations culturelles soutenues par les collectivités publiques génèrent des retombées économiques positives pour les territoires concernés. Un euro d’argent public consacré à la Culture se traduit, en moyenne, par sept euros de chiffre d’affaire généré. Il suffit par exemple, à l’échelle bordelaise, d’interroger les commerçants du quartier St Michel durant le festival Chahuts pour toucher du doigt cette réalité trop souvent oubliée.
Par ailleurs, je voudrais dire mon inquiétude face aux premières annulations et au risque de prolongation du conflit durant l’été. On se souvient qu’en 2003, de nombreux organisateurs (les plus modestes malheureusement…) avaient mis des années à éponger les dettes générées par ces perturbations. Les collectivités locales, elles-mêmes confrontées à des difficultés budgétaires, ne pourront en aucune manière assumer ces conséquences. Aussi j’appelle la coordination des intermittents à la raison : pour se faire entendre, il existe d’autres moyens que se tirer une balle dans le pied.
Compte tenu de ces quatre éléments, et bien que je n’ai aucune légitimité pour m’immiscer dans les négociations entre syndicats et organisations patronales, je pense que le Gouvernement ne devrait pas valider cet accord et proposer une nouvelle négociation. La capacité au dialogue et à la négociation sera pour tous – professionnels, partenaires, Etat – une preuve de force alors que la crispation, la contrainte et la surdité resteront des marques de faiblesse.
Fabien Robert, adjoint au maire de Bordeaux
en charge de la culture
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