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Eau polluée, subvention sucrée pour Hérakles

A la demande de ses élus écologistes, Bordeaux Métropole ne votera pas une subvention de 900000 euros au groupe Hérakles. Du perchlorate d’ammonium, utilisé dans les systèmes de propulsion et déjà en cause dans la pollution de sources d’eau potable de l’agglomération, a de nouveau été accidentellement rejeté dans la Jalle, à Saint-Médard.

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Eau polluée, subvention sucrée pour Hérakles

Christine Moebs et Gérard Chausset, élus écologistes de Saint-Médard et Mérignac (SB/Rue89 Bordeaux)
Christine Moebs et Gérard Chausset, élus écologistes de Saint-Médard et Mérignac (SB/Rue89 Bordeaux)

« C’est une situation d’irresponsabilité écologique qui règne sur le site de Saint-Médard » affirme Gérard Chausset. Le président du groupe Europe écologie – Les Verts de Bordeaux Métropole dénonce « la faute » du groupe Hérakles : du 9 au 13 janvier dernier, sa filiale Roxel a accidentellement rejeté dans la Jalle de Blanquefort, 6,63 kilos de perchlorate d’ammonium.

L’incident serait intervenu suite à la réfection d’une canalisation d’eau pluviale de la Poudrerie de Saint-Médard, site très pollué par cette matière utilisée notamment dans la fabrication de carburant pour missiles et fusée.

« On ne veut pas affoler les foules », selon l’adjoint au maire de Mérignac, qui précise néanmoins que si ce polluant se dilue rapidement dans l’eau, « on n’en connaît pas toujours les effets » – il peut avoir des conséquences sur la glande thyroïde.

« Le minimum serait de respecter les procédures, or même les services de l’Etat n’ont été informés par l’entreprise que quatre mois après les faits », déplore Gérard Chausset. Dans son rapport d’incident du 29 avril, présenté ce mercredi par les élus écologistes, la DREAL Aquitaine note en effet que Roxel aurait dû informer les gestionnaires des captages d’eau potable et du réseau de distribution d’eau, ce qu’elle n’a pas fait, sans être en mesure de justifier cette absence d’information.

Secret défense

Sur ce site Seveso, la direction régionale de l’environnement a mesuré les « concentrations anormalement élevées » dans la Jalle de 8500 microgrammes/litre, quand celle-ci s’élève d’habitude à 10 microgrammes/l.

Si cette quantité ne représente que le fond d’un verre, le taux est « plus de 200 fois (pour un nourrisson) et plus de 500 fois (pour un adulte) supérieurs aux normes conseillées par l’Anses » (agences national de sécurité sanitaire de l’environnement), indiquent les écologistes, qui déplorent le « secret défense » en vigueur à la poudrerie, et le « dysfonctionnement du système d’alerte ».

« Il y a pas mal de jardins familiaux qui puisent de l’eau dans la Jalle, cela pourrait causer un problème de santé publique », abonde Christine Moebs, conseillère municipale de Saint-Médard, qui espère une montée au créneau sur ce sujet du maire Jacques Mangon.

Produit à Toulouse, le perchlorate d’ammonium est utilisé par Hérakles, filiale de Safran et descendante de la Société nationale des poudres et explosifs (SNPE), comme composant des propergols, produit de propulsion utilisé dans les moteurs des fusées Ariane, des missiles… mais aussi dans le système de déclenchement des airbags.

10% des ressources d’eau en moins

Couramment utilisé à Saint-Médard, cet oxydant a provoqué en 2011 une grave pollution des sources d’alimentation en eau potable de Thil et Gamarde, entrainant la fermeture de ces captations, et privant la métropole de plus de 10% de sa ressource en eau potable.

« Près de quatre ans après les faits, rien n’est réglé dans ce dossier, déplorent les élus écologistes. Si la dépollution du site est en cours, les captages sont toujours à l’arrêt et nous sommes encore dans l’attente du rapport d’expertise environnementale. L’affaire est toujours pendante en justice, le préjudice écologique de ces pollutions étant estimé à 2 millions d’euros. »

Aussi, en commission des finances de Bordeaux Métropole, le groupe EELV a obtenu le retrait d’un projet de délibération sur une subvention au groupe Hérakles, qui devait passer en conseil de Métropole la semaine prochaine. Destinée principalement à la recherche et développement de la société, cette aide de près de 1,3 million d’euros pour la période 2006 à 2016, devait être ramenée à 906000 euros, et contribuer à la préservation de 5 emplois à Saint-Médard.

« Mais on ne peut les donner d’un côté, et espérer de l’autre reprendre 2 millions », souligne Gérard Chausset.

3 millions d’euros pour 5 postes

Le conseiller métropolitain assure avoir bon espoir qu’Alain Juppé aille « jusqu’au bout » et oppose son véto définitif à cette subvention. Le président de Bordeaux Métropole s’exprimera la semaine prochaine sur ce dossier.

Le conseil départemental de la Gironde et le conseil régional d’Aquitaine devaient participer pour un montant similaire à celui de la Métropole. Au département, qui doit encore verser les deux tiers de la subvention, on indique à Rue89 Bordeaux ne pas avoir été politiquement saisi de cette question par le groupe écologiste. La région n’avait mercredi soir pas encore donné suite à notre demande.

Pour EELV, le jeu n’en vaut de toutes façons pas la chandelle : le seul engagement d’Hérakles en matière d’emploi consiste à maintenir 5 postes à Saint-Médard, sur les 2200 que compte le groupe en Gironde. Ce alors que la société filiale du groupe Safran, est en pleine restructuration interne, avec notamment le départ à Paris de son siège du Haillan.


#Bordeaux métropole

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