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Loi Travail : deux blocages pour « passer à l’étape supérieure »

Cette nuit, le Collectif de lutte de la rive droite a mené deux blocages successifs : les entrepôts de la SCASO Leclerc à Cestas et l’entreprise de transport de produits pétroliers Perguilhem à Ambès. Rue89 Bordeaux a assisté à l’assemblée générale qui a lancé les actions.

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Loi Travail : deux blocages pour « passer à l’étape supérieure »

Une centaine de militants de Convergence des luttes bloquent l'entrée de SCASO Leclerc à Cestas (WS/Rue89 Bordeaux)
Une centaine de militants de Convergence des luttes bloque l’entrée de la SCASO Leclerc à Cestas (WS/Rue89 Bordeaux)

A la veille d’une semaine de grèves et de manifestations pour relancer le mouvement contre la loi travail, le Collectif de lutte de la rive droite a voulu donner le la. Il a appelé ses militants à une assemblée générale pour choisir et mener des actions dans la nuit de lundi à mardi.

Dès 21h30, le groupe s’étoffe sur le parking de la Maison des syndicats à Bassens. Les uns arrivent après les autres, on se serre la main ou on se fait la bise. Certains refont en boucle, comme un match perdu, le blocage raté des entrepôts Passion Froid du groupe Pomona et Delanchy, à Tresses, ce vendredi 13 mai.

« On ne pouvait pas mettre un autre groupe sur l’autre entrée, il fallait rester ensemble. Se diviser, c’est pas bon », se justifie catégoriquement l’un d’eux avant qu’un autre, qui vient d’arriver, lui lance une tape sur l’épaule en criant : « C’est toujours les mêmes qui sont là ! »

Sous les projecteurs des caméras

Toujours les mêmes ? Pas tout à fait ! Sur le côté, un camion-parabole I-Télé est déjà sur place. Il est aussitôt rejoint par une équipe de France télévision. Plutôt absents lors du premier blocage des entrepôts frigorifiques d’Auchan à Beychac-et Caillau, les médias ont visiblement décidé de couvrir les événements de cette semaine. Dès les premiers projecteurs allumés et les caméras calées sur les épaules, les capuches se relèvent, les casquettes s’enfoncent, les dos se tournent… ils sont nombreux à être assez surpris par la présence des journalistes de télévision.

Marc, représentant de CGT Transport prévient devant les caméras :

« Avec le 49.3, le gouvernement a décidé de passer à l’étape supérieure, nous aussi on va le faire. Aujourd’hui, un français sur deux nous soutient. »

C’est l’heure de l’assemblée générale, pas loin d’une centaine de personnes se faufile dans le bâtiment. Les médias et les caméras sont priés de rester dehors. Seul Rue89 Bordeaux est autorisé à assister aux échanges. Il est 22h.

« Il faut toucher l’économie, pas les usagers »

Entassés dans la pièce principale, des membres de la CGT Transports, de FO Transports, FSU, Solidaires, Nuit Debout, CIP et de simples citoyens attendent les échanges. L’odeur de café flotte dans la salle quand Pascal, de FO Transports, justifie la présence des médias : « Certains peuvent y voir un problème, mais c’est aussi pour nous le moyen de faire connaître nos actions. Médiatiser l’action pour faire pression. » « Et puis ça peut éviter qu’on se fasse taper dessus si les flics sont là », réplique un jeune homme. « Même pas, ils le font devant les caméras maintenant… », lui répond un autre. Pascal reprend la parole :

« CGT Transports et FO Transports sont en grève à partir de ce soir. Nous avons prévu une action à 4h du mat. D’ici là, on a le temps d’en faire une autre. On en a pour la nuit, j’espère que tout le monde à penser à prendre de quoi se réchauffer. Qui est là jusqu’à midi demain ? »

La moitié de l’assemblée lève le bras.

« – Y a-t-il des idées pour notre premier blocage ?

– Il faut une base de logistiques qui peut toucher une grosse enseigne et qui soit facile à bloquer, précise Marc.

Parmi les militants, les idées fusent :

– Pourquoi ne pas bloquer un péage ?

– Il faut plus de monde pour un péage, c’est trop compliqué.

– Bloquer un hangar de trams.

– Ça touche les usagers. Il faut toucher l’économie, pas les usagers.

– Un centre de tri postal. Il faut une société dans laquelle l’État est actionnaire. C’est lui qu’on doit pénaliser.

– On peut aussi bloquer une caserne de CRS tant qu’à faire. C’est l’État ! »

Les rires interrompent le débat avant que Pascal rappelle :

« – Nous avons des consignes de notre syndicat. Il ne cautionne pas le blocage des routes, ni les incidents avec les flics. Il faut une action propre. On part tous ensemble et on revient tous ensemble.

– Il faut s’adresser aux salariés. C’est une loi qui s’attaque à eux. C’est mieux d’arriver dans une boîte et d’être bien accueillis, que les salariés soient de notre côté. »

Après un moment de flottement et de brouhaha, une décision est prise à 22h47. Le blocage d’une plateforme d’entrepôts frigorifiques à Cestas, SCASO Leclerc (Société Centrale d’Approvisionnement du Sud-Ouest).

« Il y a qu’une entrée et une sortie qui donnent sur le rond-point. On s’installe sur le rond-point et on pourra bloquer les camions. »

Les camions sont bloqués à la sortie de SCASO Leclerc à Cestas (WS/Rue89 Bordeaux)
Les camions sont bloqués à la sortie de SCASO Leclerc à Cestas (WS/Rue89 Bordeaux)

Premier blocage à Cestas, SCASO Leclerc

En file indienne, les voitures empruntent la rocade jusqu’à l’A62 qui mène à Arcachon. Quelques kilomètres après la sortie de Saucats, les militants atteignent leur destination. Les premiers arrivés ont allumé des fumigènes. Il est 23h35.

« On est chez nous », crie un manifestant. Deux autres déroulent une banderole #ConvergenceDesLuttes. Un groupe repère une imposante pierre sur le bas-côté ; ils sont cinq à la déplacer jusqu’au milieu de la route. Les drapeaux CGT, FO… sont sortis. Quelques silhouettes s’avancent derrière la barrière de l’entreprise avant de rebrousser chemin. Le message est reçu. Un premier camion s’engage dans le rond-point et se dirige vers le parking.

« On le laisse rentrer mais il ressort pas par contre. »

Les caméras de I-Télé et France Télévision ont suivi. BFM les a rejoint. Philippe Poutou, « venu avec des copains de Ford et non pas en tant que candidat NPA à la présidentielle », déclare souhaiter « la multiplication des actions » :

« On a toujours dit il faut que ça pète, ça y est, c’est en train de péter. Le but est de mettre en place des rapports de force. Si tous les jours il y avait des actions comme ça, on y arriverait. »

D’autres militants font les comptes :

« C’est une grosse plateforme qui fournit tout le Sud-Ouest, de Limoges à Bayonne. Il y a bien 100 camions qui partent d’ici chaque nuit. A 45000€ de marchandises par camion, après un jour férié en plus, t’as vite fait le calcul des pertes. »

Les estimations vont bon train avant de déballer le casse-croute. Une sono diffuse le groupe de rap Stupeflip. Le blocage est installé jusqu’à 4h du matin ; l’heure d’entamer le suivant, celui d’une entreprise de transport routier de produits pétroliers, Perguilhem à Ambès.


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