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Les anti-loi travail ont bloqué la rocade

Le Collectif de lutte 33 a bloqué la rocade bordelaise, ce mardi pendant trois heures. Contre la loi travail, et en marge de l’inauguration de la Cité du Vin et de la venue de François Hollande, il a ainsi cherché à interrompre les flux de marchandises. Retour sur une action ponctuée par quatre arrestations.

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Les anti-loi travail ont bloqué la rocade

Sur le Pont de la Maye, les militants brandissent des banderoles aux slogans évocateurs. (JLP/Rue89Bordeaux)

Terminus du tram C, arrêt « Lycée Vaclav Havel » à Villenave d’Ornon, 9h. Les militants arrivent petit à petit, seuls ou par groupe. Personne ou presque ne sait ce qui va se passer :

« On ne sait jamais à l’avance quelle action on doit mener, c’est toujours sur le lieu du rendez-vous qu’on l’apprend », témoigne Camille (pseudo).

A 9h30, la première assemblée générale peut démarrer, dévoilant la cible du jour : la rocade, au niveau de la sortie 18, entre les autoroutes menant à Toulouse et Bayonne. Entre 130 et 150 personnes se rendent à pied jusqu’à la voie rapide, embarquant sur son chemin tout ce qui peut faire office de barricades.

Plots, barrières, pneus…Chacun ramasse ce qu’il peut. (JLP/Rue89Bordeaux)
Plots, barrières, pneus… chacun ramasse ce qu’il peut. (JLP/Rue89Bordeaux)

La date n’a pas été choisie au hasard :

« On voulait accueillir le président de la République comme il se doit, lui signifier que Bordeaux est aussi en lutte », raconte M., un membre du collectif.

François Hollande doit en effet inaugurer ce mardi la Cité du Vin. Mais pas question de s’y rendre, l’action doit se mener en marge de l’événement, et viser l’économie :

« Les manifs c’est bien, les blocages c’est mieux, ajoute M. Nous ce qu’on veut aujourd’hui, c’est stopper les flux de marchandises et les flux d’énergie. »

Sur place, tout est méticuleusement organisé. Les membres du collectif laissent passer les voitures à l’aide d’un barrage filtrant. Seuls les camions ne peuvent circuler.

Le blocage de l'économie passe par le blocage des camions. (JLP/Rue89Bordeaux)
Le blocage de l’économie passe par le blocage des camions. (JLP/Rue89Bordeaux)

Le soutien des conducteurs

Certains militants distribuent des tracts aux automobilistes, dont Michelle (pseudo), étudiante en Sciences du langage à Bordeaux. Lors de sa première manifestation contre la loi travail, en mai, elle a reçu un coup de matraque de la police. Elle poursuit la lutte en interpellant les conducteurs, et ceux-ci sont majoritairement compréhensifs.

« Continuez à vous battre. Il faut vous défendre maintenant ! », scande l’un d’eux, à la vitre de sa BMW. « Je suis d’accord avec ce que vous faites, vous avez raison », clame un autre.

JP, chauffeur de poids lourds, est un des premiers à avoir dû stopper son camion. Cigarette en main, il reste calme et serein :

« Moi je suis contre la loi travail. C’est malheureux d’en arriver là [au blocage], mais si ça marche, je trouve ça légitime. Je pense qu’il n’y a pas d’autres moyens. Mais il faudrait davantage s’en prendre à ceux qui dirigent, ce sont eux les responsables, nuance-t-il cependant. Là, ça pénalise un peu trop les gens qui les soutiennent. »

Aux alentours de 13h, une cagnotte tourne. Quelques militants reviennent un peu plus tard avec un caddie rempli de provisions, un pique-nique s’improvise sur la rocade. Une AG s’organise et opte pour la levée du blocage. Avant de quitter les lieux, tout le monde ramasse les déchets.

Avant de partir, les militants enflamment les pneus. (JLP/Rue89Bordeaux)
Avant de partir, les militants enflamment les pneus. (JLP/Rue89Bordeaux)

Une fin mouvementée

Sur le chemin du retour, une des militantes estime que le blocage d’aujourd’hui « est plutôt une réussite ». Toute la partie sud de la rocade a été immobilisée – c’est en tout cas ce qu’annonce Info Trafic.

L’événement aurait pu se terminer sans heurts, mais à l’arrêt du tram, les militants sont fermement attendus par une horde de policiers et de CRS. Il est 14h, François Hollande a quitté Bordeaux, les forces de l’ordre sont disponibles…

Des membres du collectif sont rapidement encerclés par une trentaine de CRS. D’autres réussissent à s’échapper. Parmi eux, un jeune lycéen filme la scène avec son smartphone. Un policier lui ordonne d’arrêter, il refuse, clamant le droit à la liberté d’expression. Il est immédiatement neutralisé, arrêté et menotté. Interpellé pour « rébellion », il est emmené au commissariat de Mériadeck.

Un des jeunes militants est emmené au commissariat. (JLP/Rue89Bordeaux)
Un des jeunes militants est emmené au commissariat. (JLP/Rue89Bordeaux)

« C’est inadmissible ce qui vient de se passer, témoigne une militante. Ce matin, ils se sont juste approchés de nous. Là, ils n’attendaient qu’une chose : qu’on se barre pour nous choper. C’est un guet-apens. »

Les citadins sont tout aussi éberlués :

« Je ne comprends pas pourquoi ils les arrêtent comme ça. Le jeune n’a pourtant rien fait de mal ! », estime une habitante.

Les CRS entourent les membres du collectif. (JLP/Rue89Bordeaux)
Les CRS entourent les membres du collectif. (JLP/Rue89Bordeaux)

L’encerclement des membres du collectif dure plus d’une heure. Avant d’être relâchés, ils doivent se faire prendre en photo et présenter leurs papiers d’identité. Au total, les forces de l’ordre ont procédé à quatre arrestations. En plus du lycéen, trois autres personnes – deux syndiqués et un jeune – ont été arrêtées. Le lycéen a lui passé la nuit au commissariat alors qu’il devait présenter une épreuve de baccalauréat ce mercredi 1er juin.


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