Réunion du Novart bordelais et Des souris, des hommes de Saint-Médard-en-Jalles, le Festival international des Arts de Bordeaux Métropole (Fab) s’ouvre ce samedi avant de se répandre à travers une trentaine de lieux métropolitains répartie dans 12 communes.
L’objectif est de « jouer de plus en plus dans la cour des grands en mutualisant les moyens (…) pour rayonner sur l’ensemble de la France », a promis Virginie Calmels lors de la présentation du festival. La directrice du Fab, Sylvie Violan, prudente, « espère autant » de monde que les 55000 spectateurs venus au précédent Novart.
La programmation est en tous cas très alléchante, avec 38 propositions et quelques grands noms de la scène internationale, notamment Tiago Rodrigues. Le directeur du Théâtre national de Lisbonne, qui présentera Bovary, réécriture du procès intenté à Flaubert contre son roman. « N’est-ce pas un geste révolutionnaire que d’aller au théâtre ? », interrogeait le metteur en scène portugais. On l’espère !
1 – Des performances béton et gratuites
La performance Dominoes ouvre le festival les 1er et 2 octobre. Au milieu de la foule, des milliers de dominos s’écrouleront entre les deux communes initiatrices du Fab. 10000 blocs de béton cellulaire seront nécessaires. La compagnie britannique a établi deux parcours de 20 à 30 minutes traversant les rues, parcs, immeubles…
Le samedi à 17h, la ligne de dominos s’étendra sur un kilomètre jusqu’à l’entrée du Carré-Colonnes de Saint-Médard. Le lendemain à 17h, les dominos s’effondreront sur 2 kms de la porte de Bourgogne au miroir d’eau. Plus tôt dans la journée, les 380 bénévoles nécessaires (et recherchés) s’activeront pour dresser et protéger les blocs, ce qui permet au Fab de dire que ce temps fort est « participatif ».
(Evitez de visionner cette vidéo tournée à Marseille en 2014 si vous voulez avoir la surprise…)
Pour Sylvie Violan, directrice du Carré-Colonnes et du Fab, cette performance témoigne de la volonté de rendre ce festival « accessible » au plus large public possible, en allant à sa rencontre dans la rue, en proposant quelques spectacles familiaux (du cirque notamment, avec Bestias) ou en proposant plusieurs spectacles gratuits.
C’est le cas de la performance Fluxus Distraction, au Glob Théâtre le 2 octobre, des Impromptus musicaux (représentations de l’ONBA dans des lieux insolites), ou encore de 7 Minutes, de la compagnie Volubilis.
D’autres évènements sont à la portée de toutes les bourses, comme la création Sous le pont, à Cenon ou la randonnée acrobatique en forêt de Metsä, à Saint-Médard (5 euros ces deux spectacles).
2 – Un Moyen-Orient hyper-créatif
La Fab doit permettre de « se déplacer physiquement dans la métropole et se déplacer dans la tête en voyant les choses sous un autre angle » selon le souhait de Sylvie Violan. De l’Algérie à l’Iran, les pays du Maghreb, du Proche-Orient et du Moyen-Orient sont grandement représentés.
L’exposition Creative Memory sera l’un des témoignages les plus vibrants du festival. La graphiste syrienne, exilée au Liban, Sana Yazigi a recensé sur Internet les créations de son pays depuis le début de la guerre civile qui le ravage : peintures, sculptures, photos, timbres, murs peints, chansons… Une petite sélection de ces centaines expressions de colère et d’espoir sera présente à l’institut Magrez du 5 au 25 octobre. Un colloque et une table ronde sur la création au Proche et Moyen-Orient auront aussi lieu les 10, 11 et 12 octobre à l’université Bordeaux Montaigne.
Rumeur et corbeaux
Avec Sous le pont, Amre Sawah et Abdulrahman Khalouf présentent une autre chronique syrienne, celle d’exilés trouvant un refuge précaire. La pièce, qui se jouera à Cenon dans un lieu inconnu, « interroge aussi bien le statut de réfugié que notre société occidentale, tentée par le repli », indique le Fab.
Déjà attendu au prochain festival d’Avignon, Amir Reza Koohestani installe sa pièce Hearing au Carré-Colonnes de Saint-Médard-en-Jalles. Décrite par le quotidien Le Monde comme « un Kafka iranien« , elle donne la voix à une jeunesse iranienne, celle de deux femmes pensionnaires d’un internat où un homme serait entré bravant interdictions et interdits.
Corbeaux de la compagnie O et de la marocaine Bouchra Ouizguen s’approchera au plus près du public à Lormont avec deux représentations gratuites le 22 octobre. Présente au festival d’automne de Paris, la chorégraphe met en mouvement et en transe des femmes vêtues de noir portant un linge blanc sur la tête.
3 – Une fabrique de spectacles
Le Fab peut s’enorgueillir de ses nouveautés : 12 créations, 7 premières françaises et 4 productions/coproductions. Parmi les premières en France, Philippe Quesne va tester l’effet de la Nuit des taupes sur le public bordelais. Faisant dans l’anticipation et le fantastique, le plasticien met en scène des taupes géantes prenant la place des hommes et cherchant un abri.
« Je veux interroger cette allégorie de la caverne. C’est un monde qui évoque la notion de refuge, de cachette ou d’abri antiatomique, voire même de théâtre, car le théâtre est un art de la cave », indiquait-il au Kunstenfestival de Bruxelles
Dans Tout ce que je sais du blé, les paysans-comédiens italiens du Teatro delle Ariette font la jonction entre la scène et la recette de la focaccia (équivalente de notre fougasse). Le public pourra même mettre la main à la pâte lors d’ateliers cuisine et théâtre. Miam.
Ingoodcompany, déjà passé deux fois par la métropole bordelaise, continue son expérience hilarante de work in progress mondial, avec 5 nouvelles minutes de spectacles produites pour le Fab, ce qui porte à 55 minutes la durée du show.
4- Un QG qui tombe Côte Ouest
L’expérience initiée l’an passée s’était montrée concluante, alors revoilà le QG où les festivaliers se retrouvent pour boire, manger manger, danser avec un casque sur la tête pour ne pas gêner les voisins qui discutent. Le cahier des charges, dont la gratuité de l’entrée, restent mais le QG quitte le marché Victor Hugo pour l’espace Saint-Rémy et passe de 500 à 300 entrées possibles.
Le gérant change de visage aussi. L’an passé, Chahuts, association du quartier Saint-Michel, s’occupait du lieu rebaptisé « la voiture qui tombe ». La « Fabzone » est désormais dans les mains de Côte Ouest. L’entreprise spécialisée dans l’événementiel ne joue pas dans la même cour. Rachetée en juillet par le Groupe Sud-Ouest, elle est habituée aux grands messes bordelaises (Fête du Vin, Fête du Fleuve, Fifib) mais aussi celles d’Audi, de la SNCF et de la FNSEA et a déjà chapeauté Novart par le passé.
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