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Les maires de la Métropole s’écharpent sur l’aire pour gens du voyage

La troisième aire de grand passage pour les gens du voyage divise Bordeaux Métropole, dont plusieurs maires s’opposent à la création de cet équipement dans leur commune. L’affaire, qui a failli faire capoter le plan local d’urbanisme, révèle les limites de la cogestion.

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Les maires de la Métropole s’écharpent sur l’aire pour gens du voyage

« C’est l’égoïsme municipal qui abouti au blocage, pas mon incapacité à faire. »

Ce vendredi en conseil de Bordeaux Métropole, Alain Juppé a modérément apprécié la charge virulente d’Alain David contre sa « stratégie aléatoire ». Le maire de Cenon, une des trois communes pressenties pour accueillir une aire destinée aux gens du voyage, s’est en effet opposé à l’adoption du plan local d’urbanisme (PLU), qui réserve trois terrains et laisse au préfet le soin d’ « exprimer sa préférence ».

Motif : aucune ville de l’agglomération n’accepte d’accueillir sur son sol un tel équipement. Or une troisième aire doit figurer dans le PLU pour que celui-ci puisse entrer en vigueur au 1er janvier, et que les permis de construire pour de nouveaux logements, par exemple, ne puissent être attaqués.

« Il est nécessaire de proposer dans le PLU une troisième aire de grand passage, c’est une obligation, a d’abord admis Alain David. Mais nous ne devons pas choisir sa localisation par défaut comme vous nous le proposez, a-t-il lancé au maire de Bordeaux. Cela démontre votre incapacité à faire. Vous avez choisi trois sites sur lesquels il est impossible d’accueillir des gens du voyage. Celui d’Ambarès semble situé en zone inondable, celui d’Artigues est une zone boisée à conserver avec des terrains de foot, celui de Bassens se trouve en zone portuaire et Seveso. On ne peut pas faire pire, sauf si on veut faire assumer par les maires le refus du PLU. »

Clivage rive gauche-rive droite

Critiquant en outre « l’absence de concertation » par la métropole, le vice-président PS de la métropole a annoncé que la commune de Cenon saisirait le tribunal administratif contre cette décision.

« Ces termes sont inacceptables, a donc réagi Alain Juppé. Parler d’incapacité à faire, c’est un déni de réalité. C’est le refus systématique de tous les maires, malgré le travail de Jean Touzeau (maire de Lormont et vice-président en charge du logement, NDLR) qui a abouti à ce blocage. »

Dans le viseur du président de la métropole se trouve en particulier Christophe Duprat, le maire de Saint-Audin du Médoc, qui « après avoir donné son accord à la troisième aire, a fait voter contre son conseil municipal », rappelle Alain Juppé.

Ce n’est donc pas un clivage gauche-droite qui se joue là, puisque Christophe Duprat, tout comme Anne-Lise Jacquet, maire d’Artigues, sont dans la majorité d’Alain Juppé. Plutôt une opposition entre rive gauche et rive droite : les deux premières aires de grand passage se trouvant à Bordeaux lac et (bientôt) à Mérignac, les élus de la première estiment géographiquement logique que la troisième s’implante de l’autre côté de la Garonne.

Nimby

Mais les maires de la rive droite jugent quant à eux avoir déjà pris leur part, comme Michel Héritié, édile d’Ambarès et Lagrave :

« Il y a déjà dans notre commune une forte présence des gens du voyage, qui représentent 10% des écoliers en maternelle, et cela se passe bien. Mais un site pourrait nous être imposé dans un quartier où la population des particulièrement sensibilisée et mobilisée, où une pollution du sol aux hydrocarbures n’est pas à exclure. Et il se trouve à moins de 400 mètres d’usines où peuvent se produire des incidents majeurs, entrainant des évacuations des populations. Ce serait une première si Bordeaux Métropole imposait à une commune membre sans son accord un équipement d’intérêt métropolitain. »

« Not in my backyard », pas dans mon jardin, est donc l’argument martelé, pour de bonnes et de mauvaises raisons, par les représentants des quatre communes concernées – Ambarès, Bassens et Cenon, dont le terrain pressenti se trouve sur le territoire d’Artigues.

Mais aussi par Jacques Colombier, seul représentant frontiste au conseil de Bordeaux Métropole, qui a évoqué les « problèmes de cohabitation avec les riverains, véritable motif du refus par les communes de l’installation des gens du voyage près de chez elles ».

Mais de quoi parle-t-on, au fait ? De l’ouverture d’un terrain viabilisé, avec accès à l’eau et à l’électricité pour 200 caravanes, susceptibles d’occuper le lieu pour quelques jours deux fois par an. Sous entendu : rien à voir donc avec l’installation pérenne de populations sédentarisées, comme les Roms. « Ce n’est pas catastrophique pour les communes concernées », plaide Alain Juppé.

Le PLU a finalement été adopté, avec 5 voix contre, et 12 abstentions. Mais l’affaire, qui met à jour les limites de la cogestion, est loin d’être close et pourrait laisser des traces.


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