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Un Bordelais au pied de l’Everest, un géant de roche et de glace

Une avalanche a tué ce vendredi 18 avril douze guides népalais sur l’Everest. C’est l’avalanche la plus meurtrière de l’histoire du plus haut sommet du monde. Jean-Bernard Saubusse, un Bordelais passionné de trekking, y était une semaine avant pour se frotter à ce géant de roche et de glace. Témoignage.

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Un Bordelais au pied de l’Everest, un géant de roche et de glace

L'Everest (Fotopedia)
L’Everest (Fotopedia)

Ce vendredi 18 avril au matin, douze guides népalais sont morts emportés par une avalanche sur les pentes de l’Everest, selon un bilan provisoire communiqué par un responsable du ministère du tourisme du Népal et relayé par l’AFP. Ils préparaient l’accès au sommet avant le début de la haute saison qui commence à la fin du mois d’avril.

Cet accident met en lumière les risques pris par les sherpas qui transportent les tentes, apportent l’approvisionnement, réparent les échelles et fixent des cordes pour aider les alpinistes étrangers à atteindre le sommet de 8 848 mètres. Plus de 300 personnes ont péri dans l’Everest depuis la première ascension réussie du plus haut sommet du monde par Sir Edmund Hillary et Tenzing Norgay en 1953.

Jean-Bernard Saubusse, 65 ans et amateur de trekking, était au camp de base de l’Everest la semaine dernière. Sur l’une de ses photos (ci-dessous), il indique le lieu de l’avalanche, au-dessus du camp de base. Dans son carnet de voyage, il témoigne de sa marche à l’ombre de ces montagnes toujours imprévisibles. Nous en publions un extrait.

Le camp de base (en bas à gauche) et le lieu de l’avalanche (en haut à droite) selon J.B. Saubusse (JBS)

3 avril 2014, étape du jour : Lobuché – Gorak shep – Camp de base de l’Everest – Gorak shep

6 h du mat. Température dans la chambre -5 °C. Une épaisse couche de glace à l’intérieur des vitres de la fenêtre nous empêche de voir à l’extérieur.

Nous préparons nos sacs et retrouvons Prakach, notre sherpa. Le paysage est totalement pelliculé de blanc. Une mince couche de neige recouvre toutes choses pendant que le soleil se lève dans un ciel vierge de tout nuage.

Un hélicoptère se pose à quelques encablures de notre lodge. Il dépose deux personnes et replonge dans la vallée avant de disparaître derrière une escadrille de corbeaux dérangés par le bruit de son moteur.

Après un café, du pain népalais et du miel, nous prenons le chemin de Gorak Shep. Nous arrivons à notre destination deux heures et quinze minutes plus tard. Le Buddha lodge nous accueille. C’est le dernier refuge au bout de la vallée de l’Everest, un peu plus au nord, c’est le Tibet.

Le Buddha Lodge (JBS)

Le plafond et les murs du dining room, au milieu duquel trône l’inévitable poêle à bouse de yak séchée, sont tapissés de drapeaux, t-shirts, photos et autres bannières, témoignages du passage de beaucoup d’aventuriers. Je me dis que c’est peut-être là que je laisserai un souvenir de mon passage, on verra.

Nous prenons une bonne Rara soup, excellente spécialité locale composée de bouillon de poule avec des nouilles, avant de repartir. Nous progressons dans notre ascension, entourés de géants de roche et de glace, fascinés par leur beauté, intimidés par leur majesté mais attirés par le défi.

Cela fait la troisième fois que nous passons les 5300 m en quatre jours mais l’exercice est toujours aussi éprouvant dans cet air raréfié. L’eau gèle dans la pipette de nos camel-bags, celle des gourdes est agrémentée de paillettes de glace qui craquent sous la dent.

C’est, je dois le reconnaître pour ma part, avec une certaine émotion que nous atteignons le camp de base de l’Everest dont les tentes jaunes posées à même la moraine glacière nous apparaissent en contrebas.

Bien sûr notre performance reste modeste quand on pense à ceux qui s’attaquent à ces monstres qui nous entourent. Le plus haut et le plus connu d’entre eux, l’Everest, Sagar Matha pour les Népalais, n’est pas, pour les spécialistes, le plus difficile.

Jean-Bernard Saubusse dans la vallée de l’Everest (DR)

Nous sommes malgré nos efforts et nos quelques mérites au pied d’une montagne de défis incomparables pour atteindre ces sommets. Surmonter ces difficultés implique un engagement extrême allant parfois jusqu’au sacrifice. Je pense à ce Canadien aux allures d’Hemingway croisé la veille à Lobuché, ayant perdu la quasi-totalité de ses doigts des deux mains, et qui revient obstinément relever de nouveaux défis dans ces montagnes qui lui ont tant pris.

Les pertes en vies sur certains sommets ont poussé les autorités népalaises à en interdire l’accès. Le Machapuchare qui culmine à 6993 m n’a jamais été atteint. Il a été rebaptisé Montagne sacrée et interdit par les autorités.

Demain, nous devons gravir le Kala Patthar situé au sud ouest. Cependant, l’endroit où nous sommes est symbolique, c’est le Camp de base de l’Everest d’où partent toutes les expéditions aux destins heureux ou tragiques…


#aventure

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