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A Bordeaux, les greffiers bloquent le Tribunal

A l’entrée du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, les fourgons de police se massent à côté des voitures de gendarmes et du personnel de justice. « On n’entre pas », disent les manifestants – majoritairement des femmes. Les greffiers en ont assez. Ce jeudi, profitant de la pause du midi, ils sont une centaine, divisés en …

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A Bordeaux, les greffiers bloquent le Tribunal

Action des greffiers ce jeudi devant le TGI (Photo Clé des Ondes/DR)
Action des greffiers ce jeudi devant le TGI (Photo Clé des Ondes/DR)

A l’entrée du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, les fourgons de police se massent à côté des voitures de gendarmes et du personnel de justice. « On n’entre pas », disent les manifestants – majoritairement des femmes. Les greffiers en ont assez. Ce jeudi, profitant de la pause du midi, ils sont une centaine, divisés en deux groupes et installés aux entrées et sorties du parking du tribunal. Bloqués, les détenus amenés par les services de l’ordre ne peuvent pas se rendre aux audiences et rendez-vous.

« Greffes en colère », « Bordeaux voit rouge », « Tous unis pour nos statuts, nos salaires et notre avenir ! » Autant de slogans portés par le personnel de greffes qui estime ne pas être écouté par le ministère. Sourire ou pousse baissé, leurs collègues gendarmes et policiers comprennent différemment cette action. Le mouvement n’en est pas à ses premiers éclats. Depuis mars dernier, les greffiers se rendent tous les jours pendant midi sur les marches du TGI.

Les robes noires s’inquiètent et disent ne pas obtenir gain de cause. Il y a certes les paroles de Christiane Taubira, mais les actes sont attendus. Manque d’effectif et de moyens, les causes de mécontentement sont nombreuses. Les greffiers ne chôment pas.

« Nous sommes désespérés et exaspérés. Il y a un jeu de chaises musicales des compétences, explique Karima Gracianette, greffier au TGI, le petit fait les tâches du moyen et le moyen fait les tâches du grand. »

Résultat, les greffiers gèrent les activités des magistrats comme la rédaction des jugements. « Ce n’est pas qu’ils travaillent moins, mais par manque de budget, les magistrats ne peuvent plus avoir d’assistants de justice alors ils nous délèguent ce travail ». Une tâche que les greffiers sont prêts à assumer, seulement si une revalorisation est proposée.

Autre conséquence, les greffiers ne peuvent plus assurer toutes leurs fonctions : « Certaines victimes nous appellent et veulent de l’écoute. Je n’ai plus ce temps », précise Karima Gracianette qui avoue aussi devoir transmettre certaines tâches aux adjoints administratifs.

C’est le cas de Magalie Télémaque : « Désormais, on construit les dossiers avant les procès ». Pour ses fonctions, elle dit toucher « moins que le Smic, mais par un calcul savant, l’Etat nous verse une indemnité de garantie individuelle du pouvoir d’achat (IGIPA) de cent à deux cents euros pour passer au-dessus du salaire minimum et ne pas être dans l’illégalité ». Les greffiers, eux, débutent « avec 1450 euros et sans perspective de carrière », regrette Karime Gracianette.

Des langues déliées

Au tribunal, personne n’a été prévenu de cette action qui dure une heure, autrement dit jusqu’à la reprise des audiences, pour ne pas faire obstruction à la justice. Les greffiers se sont organisés par le bouche-à-oreille ou par SMS. L’action a surpris. Mais Caroline Baret de l’Union Syndicale des Magistrats (USM) comprend :

« C’est normal. Au ministère, tout est bloqué. Personne ne les entend. C’est gravissime ! »

En trois mois, les langues des greffiers se sont déliées. En mars, les communications par mails ont saturés les services informatiques du ministère. La profession a multiplié les échanges parlant des souffrances ressenties. Cela a abouti aux premiers rassemblements notamment devant le TGI de Bordeaux.

Dans quinze jours, la période de vacation judiciaire commence. « Nous ne savons toujours pas à quelle sauce nous allons être manger », s’indigne Karima Gracianette.

Jean-François Beynel, directeur des services judiciaires, vient présenter lundi au Tribunal de Grande Instance de Bordeaux la réforme des statuts des greffiers et des greffiers en chef. A la veille du mouvement de grève national, il sera attendu de pied ferme : déjà, les adjoints administratifs déplorent d’être oubliés.


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