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La fronde des intermittents s’amplifie à Bordeaux

Plusieurs centaines de personnes ont manifesté à Bordeaux ce lundi, journée de grève nationale des intermittents du spectacle. Le mouvement prend de l’ampleur, et reçoit le soutien des principaux théâtres d’Aquitaine – Opéra, TnBA… – au moment où le gouvernement pourrait valider l’accord contesté…

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La fronde des intermittents s’amplifie à Bordeaux

Les intermittents, les précaires et les cheminots étaient entre 500 et 600 place des Quinconces hier à Bordeaux (WS/Rue89 Bordeaux)
Les intermittents, les précaires et les cheminots étaient hier entre 500 et 700 place des Quinconces à Bordeaux (WS/Rue89 Bordeaux)

Après des spectacles perturbés ou annulés la semaine dernière, après avoir interpellé Alain Juppé samedi lors du lancement de l’Été Métropolitain, les intermittents bordelais ont voulu montrer que leur mobilisation n’avait rien à envier à celle des artistes et techniciens de Toulouse ou Montpellier.

Renaud Cojo, metteur en scène bordelais (WS/Rue89 Bordeaux)

Ce lundi, plusieurs centaines d’entre eux (pour 5000 intermittents en Aquitaine) se sont donné rendez-vous pour une « méga photo solidaire » devant le monument des Girondins, avant de poser allongés sur la place des Quinconces, shootés par un drone. Puis ils ont manifesté dans les rues de Bordeaux contre les durcissements des conditions d’indemnisation, prévu dans un accord contesté entre patronat et certains syndicats.

« On a pris le train en marche, et il ne faut pas sauter car la chute serait rude », estime le metteur en scène Renaud Cojo, dont la compagnie « Ouvre le chien » a renoncé à une résidence au théâtre de la Villette, à Paris.

Lettre à François

A Bordeaux, une quinzaine de compagnies se sont ainsi mises à grève, et plusieurs théâtres ont fermé leurs portes, notamment le Glob. L’Utopia a annoncé que toutes ses séances seraient annulées mardi en signe de solidarité.

« Nous ne sommes pas concernés directement, mais le public doit réaliser que les intermittents sont indispensables à la production et au tournage des films », souligne le directeur du cinéma indépendant, Patrick Troudet.

Peu de spectacles sont toutefois menacés dans l’immédiat, hormis La Grande Mêlée, un festival à la Manufacture Atlantique, et Don Quichotte, un ballet à l’opéra.

Une délégation d’intermittents a d’ailleurs été reçue durant l’après-midi au Grand Théâtre. Suite à ce rendez-vous, Thierry Fouquet, directeur général de l’Opéra National de Bordeaux, a enjoint par courrier François Rebsamen, ministre du Travail, de reprendre le dialogue avant la signature de l’agrément contesté par les intermittents.

A l’Opéra, 584 intermittents pour 360 salariés

Dans un communiqué, Thierry Fouquet dit « partager l’inquiétude et le désarroi des professionnels de la culture et du spectacle vivant ». Il rappelle que « les 250 levers de rideaux annuels du Grand-Théâtre et de l’Auditorium de Bordeaux ne pourraient exister sans la présence de ces personnels : les artistes et techniciens intermittents représentent (…) près de 584 personnes différentes (103 équivalents temps plein) » qui  « s’ajoutent aux 360 salariés de l’Opéra national de Bordeaux ».

Le patron de l’ONB est également cosignataire d’un texte associant les responsables des principaux théâtres de la région Aquitaine – TnBA, Carré/Colonnes, Cuvier, Quatre Saisons dans l’agglomération bordelaise, mais aussi l’Arguia Théâtre de Dax ou L’Odyssée théâtre de Périgueux. Leur communiqué a été diffusé lundi en fin d’après-midi, peu après l’annonce selon laquelle le gouvernement Valls pourrait valider l’accord signé par le Medef, FO et la CFDT.

Une convention négociée en toute déloyauté

La critique des dirigeants d’institutions culturelle est cinglante :

« Le 18 juin prochain, le gouvernement de François Hollande s’apprête à ratifier une  convention d’assurance chômage négociée en toute déloyauté. Ce nouvel accord réduit encore une fois les droits des plus fragiles pour, nous dit-­on, faire des économies parce que les chômeurs coûtent trop cher. Il faut donc trouver un moyen de les faire payer. »

Les patrons de théâtres contestent notamment la hausse de 2 points des cotisations salariales et patronales. Et déplorent que des propositions alternatives du comité de suivi de la réforme de l’intermittence aient été « délibérément ignorées » par le  MEDEF  et certains partenaires sociaux.

« Aujourd’hui, nous appelons à la mobilisation de tous afin d’obtenir du gouvernement la réouverture de négociations prenant en compte nos propositions », concluent les directeurs de théâtre.

Feu aux poudres

Un son de cloche semble-t-il entendu notamment par la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti. Catherine Marnas, qui accueille la coordination des intermittents au TnBA, alerte le gouvernement :

« La mobilisation est très forte, et j’ai très peur que si le gouvernement valide cet accord, cela mette le feu aux poudres.  Il faudrait écouter la voie de la raison, maintenant. On n’est pas idiots, on sait que l’on doit faire des économies, mais c’est aussi un projet de société, et il en va de la survie d’un système d’assurance que le monde entier nous envie ».

Interrogé par Rue89 Bordeaux, Fabien Robert, adjoint au maire de Bordeaux en charge de la culture, rejoint lui aussi les intermittents :

« Tous les régimes doivent faire un effort dans la conjoncture actuelle. Cependant, il ne faut pas signer ce texte. Le régime des intermittents est un régime spécial où les recettes et les dépenses ne seront jamais équilibrées, il ne doit donc pas être réformé sur des critères financiers ».

Les prochains jours vont être cruciaux pour le mouvement, des annonces du Premier ministre pourraient intervenir rapidement. D’ici là, les intermittents comptent continuer à se faire entendre. Certains espèrent des convergences avec d’autres salariés en lutte, et se rendront ainsi ce mardi gare Saint-Jean à la rencontre des cheminots. D’autres comptent continuer à perturber la présentation des saisons 2014-2015, comme ils l’ont fait lundi à L’Espace Treulon, à Bruges.


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