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En Gironde, l’e-classe bugge sur la formation des enseignants

A l’occasion de la Semaine Digitale, enseignants, élus et férus du numérique se penchaient mercredi sur l’e-éducation. Quelques semaines après l’annonce de François Hollande sur le « grand plan numérique pour l’Education nationale », les écoles girondines se scrutent et se jalousent. Si Bordeaux fait office de locomotive, certaines communes se lamentent.

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En Gironde, l’e-classe bugge sur la formation des enseignants

La quasi-totalité des classes de Bordeaux est équipée d’un tableau numérique (photo Thomas Sanson)

Au milieu des ardoises et cahiers, les élèves de l’école bordelaise Flornoy ont un nouvel outil : l’Ipad. Cette école maternelle de Saint-Augustin est la seule de Bordeaux à utiliser les tablettes depuis 4 ans. Elle a également été la première à être équipée d’un tableau numérique, il y 6 ans, tout comme les écoles élémentaires de la ville. Pour le directeur Philippe Prévost, ces outils sont nécessaires et « ils doivent faire partie des outils de la classe ».

« Quand l’enfant apprend à écrire sur un tableau numérique, il peut voir la lettre qui s’écrit progressivement et constater ses erreurs. Et lorsque l’on fait une sortie, on peut prendre des photos avec les tablettes, dicter un texte à l’adulte, mettre du son et partager cela avec les parents sur un blog. C’est un travail spécifique que nous ne pouvons pas faire d’une autre manière », s’enthousiasme le chef d’établissement très sensible aux nouvelles technologies.

Sur les 3 500 classes que compte la Gironde, plus d’un millier sont équipées d’un tableau numérique. Une notion déjà presque dépassée à Bordeaux qui expérimente actuellement les tablettes numériques individuelles. Cinq écoles sont équipées pour le moment. L’espace numérique de travail pour permettre la création de blogs fait également partie de la prochaine étape.

Pour l’inspection académique, cette entrée dans le numérique est nécessaire pour appliquer la pédagogie différenciée, l’apprentissage des langues vivantes et une participation plus systématique des élèves.

« Cela les met dans une situation de manipulation, de dynamisme. Ces outils permettent de travailler sur les échecs et les réussites des élèves en reprenant le travail effectué plusieurs semaines auparavant. Et c’est une plus-value pour l’enseignant qui peut stocker et varier son cours en temps réel », détaille Daniel Gillard, adjoint au directeur académique de la Gironde.

Des enseignants pas assez formés

Thomas, professeur des écoles en grande section, acquiesce.

« L’idéal c’est quand les enfants se servent du tableau numérique, ils peuvent apprendre à tracer les lettres, enregistrer des sons sur les mots et surtout on peut stocker de nombreuses ressources documentaires et faire apparaître des cartes ou passer d’une leçon à une autre sans avoir à effacer la précédente. »

En grande section cette année, il pensait ne pas en avoir besoin, mais il le regrette a posteriori. Un mauvais choix lié à son manque de maîtrise de l’outil. Car selon lui, le maillon faible de cette entrée dans l’ère du numérique, c’est le manque de formation.

« Dans mon ancienne école à Cubnezais on avait un tableau numérique, se rappelle-t-il, on te le balance sans formation, je suis sûr qu’on ne l’utilise qu’à 20% de ses capacités. J’ai même vu des enseignants qui accrochaient des documents dessus ! »

C’est d’ailleurs le grand reproche des syndicats. « Nous n’avons quasiment plus de formation continue », reconnaît-on au Snuipp. Alors les enseignants échangent entre eux, partagent leur expérience. « Je crois beaucoup à l’autoformation ou à la coformation », s’amuse Philippe Prévost avant de faire une moue dubitative à l’évocation des formations de l’inspection académique.

Le processus est tout de même en marche selon Daniel Gillard, inspecteur à l’Education nationale :

« Trois cent trente enseignants bordelais ont été formés ces trois dernières années et en 2014, chaque enseignant de primaire en Gironde suit au moins un parcours de formation à distance, utilisant les techniques numériques, soit 6 900 enseignants engagés dans ce type de formation. »

Disparité entre les communes

Si certains enseignants ne savent pas quoi faire avec leur tableau numérique, d’autres en rêvent. Lors de visites d’écoles, les représentants du syndicat enseignant Unsa ont réalisé que des petites communes rurales étaient mieux équipées que certaines villes de la CUB.

« A Martignas-sur-Jalle, on bataille pour avoir un vidéo projecteur depuis le mois de février, alors un tableau numérique… », témoigne une enseignante.

Le plan école numérique rurale en 2009 a en effet permis à 110 communes de se doter de matériel, l’état leur remboursant 80% des frais engagés. Cambes, petite commune d’à peine 1 500 habitants a de quoi donner des complexes à certaines villes de la CUB. A partir de  2003, le maire Bernard Cuartero a investi dans des PC, des tablettes et tableaux numériques. Quand une des écoles de Martignas-sur-Jalle – 7 000 habitants – doit se contenter de trois vidéo-projecteurs pour quatorze classes… Dans le cadre du basculement de la CUB vers Bordeaux Métropole en 2015 accompagné de nouvelles compétences, la collectivité envisage une coopération entre les communes afin d’arriver à une standardisation du matériel et des pratiques.

Autre sujet qui fâche les enseignants motivés : l’absence de wifi à l’école. Obstacle majeur au développement du numérique, c’est aussi un point (électro)sensible du fait du manque d’études et de reculs sur l’exposition aux ondes, notamment chez les enfants. Interpellé, Alain Juppé, le maire de Bordeaux, ne s’est pas encore manifesté sur cet épineux sujet.


#semaine digitale

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