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« Pas de nostalgie, camarades », la Bourse du travail revisitée

Diffusé ce samedi 2 mai, à 15h25 sur France 3 Aquitaine, le documentaire d’Isabelle Solas nous plonge dans l’ambiance décatie de la Bourse du Travail de Bordeaux, livrant au passage un instantané de l’état du syndicalisme ouvrier, et une alerte sur le risque de muséification du lieu.

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« Pas de nostalgie, camarades », la Bourse du travail revisitée

Isabelle Solas est « fascinée par les lieux désaffectés », à l’image de son film « Inventaire », tourné dans la maison d’une personne décédée. A la Bourse du travail, pourtant, le locataire bouge encore :  dans ce bâtiment élevé par le maire Adrien Marquet à l’époque du Front Populaire, et actuellement en pleine restauration, la CGT a ses bureaux et dispense des permanences juridiques.

Ce vaste espace peu occupé est parfois parcouru de visites de touristes, venus admirer les fresques très « réalisme soviétique », hommages aux travailleurs de la vigne ou au port de Bordeaux.

L’entrée de la salle Ambroise Croizat, à la Bourse du travail (DR)

La caméra d’Isabelle Solas a traîné plusieurs mois en ces lieux, captant le vide, les travaux, les moments importants de son retour en grâce, à l’image des dernières journées du Patrimoine.

Malgré l’absence de commentaire, les dialogues saisis à la dérobée derrière une porte ou une fenêtre – et qui les rend parfois difficilement audibles – en disent long, sur le glorieux passé du bâtiment comme sur l’état actuel du syndicalisme.

Investir la Bourse du travail

On entend par exemple des militants CGT, pour la plupart quadra ou quinquagénaire, témoigner des difficultés à mobiliser leurs propres adhérents dans les entreprises. Mais on voit aussi de jeunes travailleurs précaires venus s’informer de leurs droits et des façons de se défendre, et reçus par des bénévoles. S’ils n’apparaissent bien sûr pas dans le film, terminé avant, c’est bien à la Bourse du Travail que les ouvriers espagnols du nouveau stade sont venus chercher de l’aide.

C’est aussi là que peuvent se tenir des débats qui dépassent celui des conditions de travail, à l’image de cet échange très riche sur la prostitution, lors d’une réunion de la commission sur les droits des femmes. Un sujet qui passionne Isabelle Solas, militante féministe plus que cégétiste :

« C’est plutôt la question des discriminations qui m’a poussée à m’engager. Mais je suis issue d’une famille de gauche, pour qui le Front Populaire est un moment important. C’est donc un peu un héritage que je venais chercher à la Bourse du travail. »

Dans les tribunes de la salle Ambroise Croizat (DR)

Elle aimerait donc que le lieu puisse être davantage investi par des collectifs militants, comme la CIP (coordination des intermittents et précaire) ou l’Université populaire de Bordeaux. Mais aussi par des artistes, comme ceux conviés par Isabelle Solas à intervenir pour le besoin du film dans la Bourse du travail, à savoir le groupe rock Chocolat Billy et le vidéaste Bertrand Grimault.

« J’ai fait rentrer des complices à l’intérieur du bâtiment, raconte la cinéaste. L’art et l’esthétique, ça parle différemment aux gens, et on a besoin de ça pour renouer avec le militantisme. »

Classe ouvrière sous verre ?

Car Isabelle Solas redoute la « muséification » de la Bourse du travail :

« A nous d’occuper la place. La mairie est propriétaire du bâtiment, et on a besoin d’elle pour qu’il puisse être rénové. La CGT marche donc main dans la main pour cela avec la Ville. Mais le risque, c’est qu’ils mettent la classe ouvrière sous une vitrine. »

Présent lors d’une soirée dans la salle Ambroise Croizat, Alain Juppé rappelait que la Bourse du travail était l’un des nombreux bâtiments de Bordeaux classé aux monuments historiques. Personne ne souhaite qu’il finisse par ne plus être ouvert que pour les Journées du patrimoine.


#Bordeaux

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