L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a autorisé le montage des générateurs de vapeur du réacteur 3 de la centrale du Blayais, arrêté depuis juillet 2014. Mais son redémarrage est toujours suspendu à des justificatifs qu’Areva, fabricant de la pièce, doit fournir à l’autorité indépendante. Ce qui suscite quelques questions.
Alors que le montage des trois générateurs de vapeur du réacteur 3 a commencé au Blayais, EDF et Areva courent-ils ainsi au devant d’un nouveau « risque industriel » ? C’est le terme employé ce mardi par Paul Bougon, chef de la division de Bordeaux de l’Autorité de sûreté nucléaire, lors de la conférence de presse annuelle sur les activités de l’ASN en Aquitaine et Poitou-Charentes.
« Nous avons demandé à Areva deux lots de documents. Un premier lot devait absolument nous parvenir avant le montage car Areva n’aurait pas pu faire les contrôles nécessaires si les générateurs étaient déjà montés. Le reste pouvait prendre plus de temps avant la mise en service. De notre point de vue il n’y a plus d’obstacle au montage des générateurs. Désormais, cela relève du risque industriel d’Areva et EDF, qui doivent être suffisamment confiant pour se dire, oui, ça va passer. »
L’autorisation de mise en service par l’ASN reste en effet suspendue à des justificatifs que doit produire Areva, notamment une réponse à la demande N°10 sur les facteurs de sécurité des équipements sous pression, contenue dans son courrier du 24 novembre 2014, comme le signale Paul Bougon :
« Areva doit faire la démonstration qu’elle a pris une marge de sécurité entre la conception du générateur et la réalité de son fonctionnement. L’entreprise doit faire une liste des sources d’incertitudes découlant de la fabrication, des conditions réelles d’utilisation, et des facteurs de sécurité pris en compte pour éliminer ces incertitudes. C’est le document que nous attendons. »
« La situation de Flamanville différente de celle du Blayais »
Selon l’ASN, Areva n’a donné aucun délai quant à la livraison de ces justificatifs. Le réacteur 3 est à l’arrêt depuis fin juillet 2014, suite à la troisième visite décennale qui a imposé le remplacement de ses trois générateurs, ce qui coûterait à EDF un million d’euros par jour de manque à gagner. D’où la hâte de l’opérateur du Blayais à redémarrer son réacteur…
La centrale girondine est encore loin du record de celle du Bugey, dont un réacteur a été arrêté il y a 18 mois. Pourrait-elle se rapprocher d’un autre fiasco, celui de Flamanville ? L’avis négatif de l’ASN sur la cuve après l’installation de cette pièce, également fabriquée par Areva, dans le réacteur EPR, tout comme les préalables au redémarrage du réacteur 3 du Blayais, découlent en effet du même arrêté du 12 décembre 2005, qui renforce la surveillance des équipements sous pression nucléaires. Mais Paul Bougon écarte cette comparaison :
« La situation de Flamanville est différente de celle du Blayais. Dans le premier cas, la nouvelle réglementation nous a conduit à découvrir des imperfections dans la cuve. Dans le cas des générateurs de vapeur, il n’y a pas de problème matériel. Ce qui coince à Blayais, c’est le fait que le constructeur ne s’est pas montré à la hauteur du saut qualitatif qu’impliquait nouvelle réglementation en terme de sécurité. L’ASN lui demande d’en faire un peu plus. Une fois qu’Areva se sera mis au niveau, il n’y aura pas de difficulté. »
Les anciens générateurs, déchets radioactifs sans filière de traitement
Du moins faut-il l’espérer, pour la sécurité de la centrale et pour celle des finances publiques : le « risque industriel » d’un feu rouge de l’ASN pèserait en effet sur les contribuables, tout comme la facture exponentielle de l’EPR. Car le réacteur 3 du Blayais est le premier d’une longue série à devoir mettre ses générateurs en conformité avec l’arrêté de 2005.
Autre question pendante : l’avenir des anciens générateurs de vapeur. Considérés comme des déchets radioactifs, ils sont pour l’heure confinés dans un nouveau bâtiment en béton construit spécialement sur le site du Blayais pour les garder sous scellés.
« Mais il n’existe pour l’heure pas de filière d’élimination pérenne » de ces pièces de 20 mètres de long, indique Paul Bougon.
Elles devront vraisemblablement attendre le démantèlement de la centrale pour connaître leur destination finale, si celle-ci est un jour établie.
Aller plus loin
Le site de la division Bordeaux de l’Autorité de sûreté nucléaire
Le site de l’association anti-nucléaire Tchernoblaye
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