C’est au centre de Carcans-Maubuisson que se trouve ce musée privé, créé en 1976 par une association d’habitants soucieux de transmettre l’histoire du pays. D’abord installé sur les bords du lac de Bombannes, le musée déménage en 1992 dans des halles construites par la commune pour l’accueillir.
Depuis, l’édifice abrite une douzaine d’expositions permanentes, améliorées et complétées chaque année ainsi que des expositions temporaires. Francis Seurin, président de l’association et directeur du musée depuis 8 ans explique :
« Nous nous remettons sans cesse en question, un musée ne doit pas être figé. Nous ne voulons pas que le musée soit compris comme un “haut lieu de vieilles choses”, on veut que les gens trouvent le musée vivant. »
Cette appellation « maison des arts et traditions » date des années 1970 durant lesquelles nombre d’entre elles ont été montées. Ces maisons ont donc un réel état d’esprit, celui de donner une vision de la société française traditionnelle, rurale et artisanale. C’est le mari de Gisèle Gasnier, alors directeur de la base de loisir de Bombannes et enseignant tout comme sa femme, qui a décidé de créer un pôle culturel en plus de ce pôle de loisir. Ironie de l’histoire, la doyenne n’est pas du pays :
« J’en viens à connaître plus de choses sur la lande médocaine que sur mon propre pays, la Sarthe. »
Le directeur, quant à lui, vient de Saint-Laurent et connait bien la région :
« Tout petit, ma plage c’était Carcans. Je suis imprégné des images du passé, je connais Carcans depuis plus de 60 ans et j’ai vu son évolution ainsi que celles des communes alentours. »
« L’époque d’une société d’ingéniosité »
La visite, guidée pour les groupes, libre pour les autres, remonte aux racines de ces terres et de ses habitants, en commençant par la formation géologique des dunes et des lacs, présentée sous forme de schémas et photos.
Mais c’est au XIXe siècle que l’histoire de la Lande médocaine actuelle commence, originellement pauvre en comparaison avec les terres viticoles voisines. Chambrelent, un agronome, importe la sylviculture qui entraîne un réel chamboulement économique et social : on passe alors d’un désert marécageux à une forêt organisée.
Non sans quelques conflits : les moutons dévorent les pouces de pins et les pins empiètent sur le territoire. Mais c’est finalement la forêt qui l’emporte, les bergers rendant leurs échasses après la première guerre mondiale.
Dans l’entre-deux-guerres a lieu une deuxième révolution, celle du tourisme et de la création des stations balnéaires : Carcans plage se construit dans les années 1930 et Maubuisson dans les années 1950. Cette période est racontée et illustrée par de nombreuses photos.
On arrive ensuite dans le conservatoire des vieux outils, témoignage de l’ingéniosité des paysans de l’époque :
« Nous sommes aujourd’hui dans une société d’ingénierie, à l’époque c’était une société d’ingéniosité », résume le directeur de la Maison, Francis Seurin.
La visite se poursuit avec diverses reconstitutions, dont un intérieur d’époque où tous les meubles sont en pin. Il est pourvu d’une pièce rare : une pierre à filtrer l’eau du puits grâce à sa porosité. Il y a également une bergerie reconstruite à l’ancienne, et un stand d’apiculture, une tradition d’ici qui perdure.
Catastrophes et développement durable
En face est présentée une exposition temporaire sur le développement durable et une autre sur la télécommunication avec de nombreux appareils : un appareil télégraphique morse, des postes radio à lampe, un poste à galène.
Celui-ci symbolise le travail de prospection des bénévoles de l’association, et les dons des particuliers qui permettent d’enrichir les collections :
« Lorsqu’on voulait faire notre exposition sur la télécommunication, on s’est mis à la recherche d’un poste à galène, on en a trouvé un sur Leboncoin.fr mais à 60€, c’était trop cher. L’une de nos adhérentes a eu la très bonne idée de téléphoner à France Bleu Gironde pour passer une annonce et une dame de Caudéran nous a appelé une heure après pour nous en donner un. C’est vraiment le système D. »
La visite se poursuit par les métiers du bois et leurs outils : le bûcheron, le sabotier, le menuisier et même le tonnelier sont présentés. Attention : celui-ci n’utilise que du pin afin de construire des tonneaux conservant la résine (récoltée par les gemmeurs) et non du vin, conservé lui dans des tonneaux en chêne.
Une partie du musée sur l’exploitation du bois évoque le petit train Decauville qui servait à le transporter ; un train identique à celui qui balade aujourd’hui les visiteurs au Cap Ferret.
Environ 1600 personnes visitent chaque année la Maison de Carcans, principalement des groupes envoyés par les villages de vacances alentours. Peu de groupes scolaires répondent présents, au grand regret de Francis Seurin :
« Les enseignants ne s’y intéressent pas car cela ne fait pas partie du programme. »
Donner son temps pour raconter l’ancien temps
Mais faire tourner un musée ouvert des vacances de printemps à début septembre n’est pas de tout repos. Pour cela, Francis Seurin organise des « ateliers casse-croûte » :
« On essaie de cultiver un esprit de convivialité, en tant que président je leur dis “vous venez quand vous voulez”, car on ne vient pas pour se faire plaisir dans un premier temps comme pour une association sportive, ici on vient pour travailler, c’est pour cela que la convivialité est importante, afin que chacun prenne plaisir à venir. »
Dans ces ateliers, les adhérents discutent des futures expositions et se répartissent les tâches : recherche de documents, réhabilitation d’objets anciens, peinture de panneaux…
« On discute entre nous, les gens lancent leurs idées, et quand on trouve un thème on cherche de la documentation, textes et images. Puis on cherche des objets, du matériel, on trouve une somme incroyable de petits trésors dans les greniers des habitants. »
De la rigueur et du bon temps
C’est justement cette demande de disponibilité et d’engagement qui peut poser problème à l’association :
« Nous sommes tous vieillissants et la jeune génération encore active n’a pas de temps à nous consacrer. Mais c’est le problème de la vie associative en général, le manque de temps. »
Alors pour que ce temps consacré au musée soit du bon temps, ces « ateliers casse-croûte » se terminent par un bon repas où « on mange, et on rit aussi ». Mais attention, ce travail n’est pas pris à la rigolade pour autant. Comme ils racontent l’histoire du coin, il ne s’agit pas de se tromper :
« On se retrouve confrontés à la vie des gens du pays, et on ne veut pas froisser le tissus social local. »
Infos pratiques
- Maison des Arts et Traditions populaires : 129 avenue de Maubuisson 33121 Carcans – 05 56 03 41 96 – Site internet
- Ouvert du 15 juin au 15 septembre de 15 h à 19 h, sauf le week-end
- Plein tarif : 3,50€ – Tarifs réduits : de 1,60 à 2,70€
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