Partis place de la Victoire, entre 1000 et plus de 3000 personnes ont battu le pavé, sous les parapluies et les capuches, jusqu’au Grand Théâtre, massées derrière une banderole du collectif organisateur « Nous ne céderons pas ». D’autres ont inscrit sur du carton leurs slogans : « Nous sommes très déchus », « assignés à résistance », « marre de ces gouvernements de droite ! »
Plus de 70 manifestations comme celle-ci se sont déroulées à travers la France pour demander la levée immédiate de l’état d’urgence, instauré après les attentats de Paris du 13 novembre 2015, et contre le projet de constitutionnalisation de la déchéance de nationalité pour les personnes condamnées pour activités terroristes.
De jeunes manifestants non-encartés se trouvaient aux côtés des syndicats, partis politiques, associations pour les droits de l’Homme. Parmi eux, Hassan, 28 ans et cinéaste, a « fait l’effort de venir car je trouve que la situation est très grave. » Son amie Nora, 27 ans et étudiante néo-bordelaise, abonde dans son sens :
« C’est assez rare que je manifeste, seulement dans les moments critiques. L’état d’urgence, dans un premier temps, permettait après les attentats de trouver quelques pistes, mais là je ne vois pas pourquoi le prolonger. Ce n’est plus justifié actuellement. Et la déchéance de nationalité m’évoque les premiers signes de transition fasciste comme ils ont eu lieu dans les années 1930. Il y a un durcissement fasciste. Il va être difficile de revenir en arrière. Déjà cette manifestation transgresse l’état d’urgence. »
« Regardez ! Il y a encore des socialistes ! »
Un peu plus loin, Juliette, trentenaire, sourit en regardant son nouveau-né qu’elle porte :
« C’est sa première manif ! On est là pour la liberté en général et personnellement pour l’ouverture des frontières. »
Pierre, à ses côtés, ajoute que ces mesures lui semblent « contre-productives. Elle vont amener seulement plus de haine, plus de violence. C’est complètement absurde. » Les drapeaux des syndicats CGT, FSU, Solidaires, de la Ligue des Droits de l’Homme, du Planning Familial, du Parti de Gauche, d’Ensemble mais aussi du PCF dont les députés ont voté l’état d’urgence en novembre dernier.
Les drapeaux du PS eux ne sont pas présents bien que quelques militants soient là. « Regardez ! il y a encore des socialistes », préfère en rire Matthieu Rouveyre. Le conseiller municipal PS à la mairie de Bordeaux a compté la poignée de camarades présents : quelques jeunes socialistes, des militants des cantons de Bordeaux Centre ou de Lanton. Pas plus. Lui est venu marcher contre son gouvernement pour dénoncer « ces mesures que je considère comme scélérates » :
« Ce qui est plus fort ce n’est pas la loyauté au gouvernement mais aux valeurs de notre parti. Jamais notre parti n’a prôné la déchéance de nationalité. Là, on touche à nos valeurs fondamentales. C’est peut-être aussi une diversion. Pendant qu’on parle déchéance, on ne parle pas de politique économique. »
Casseroles
Si c’est bien un « enfumage » usant les forces militantes, absorbées par la question de la déchéance, il « ne se voit pas faire l’impasse » sur ce débat. Et Matthieu Rouveyre égratigne au passage le député PS du Sud-Gironde, Gilles Savary qui soutient aujourd’hui le projet de déchéance alors qu’il le dénonçait en 2010, l’assimilant alors aux « lois de Vichy pour les Juifs ».
Dans le cortège, quelques-uns étaient munis de casseroles. Ils se préparent pour le concert de casseroles contre l’état d’urgence qui sera organisé le samedi 6 février à 14h, place Fernand Lafargue par le collectif Contre les abus policiers (Clap33).Avec ou sans ustensile de cuisine, ça commence à sentir le brûlé pour le gouvernement.
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