Des panneaux publicitaires de 50 m2… ? « Pour le Parc Lescure, c’est juste clair que non », répond Jean-Louis David avant même la fin de la question. Contacté par Rue89 Bordeaux suite aux inquiétudes des élus socialistes et écologistes du conseil municipal à l’égard du projet de décret Macron, l’adjoint au maire en charge de la vie urbaine et de la coordination de la politique de proximité juge ce décret « pour le moins étonnant ».
Lors de leur point presse vendredi, les socialistes Vincent Feltesse, Emmanuelle Ajon, Michèle Delaunay et Nicolas Guenro, rejoint par l’élu EELV, Pierre Hurmic, avaient exprimé leur opposition à ce décret proposé dans la loi « Croissance » dite Loi Macron que le gouvernement s’apprête à adopter. Celui-ci tend à assouplir les règles d’implantation des panneaux publicitaires.
« Croissance » contre Grenelle 2
Depuis, la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal, a fait savoir vendredi midi qu’elle ne signera pas le décret interministériel « dans l’état ». Mais les élus socialistes et écologistes restent vigilants. Ils invitent les Bordelais à répondre à la consultation publique ouverte jusqu’à ce mardi 9 février et à la signature des nombreuses pétitions en ligne. Ils prévoient également d’adresser une lettre à Alain Juppé.
« Notre message s’adresse à la population, mais aussi à Alain Juppé », déclare Vincent Feltesse qui précise qu’il s’agit d’ « Alain Juppé, le maire de Bordeaux, le président de la métropole et aussi le président du club des sites d’accueil de l’Euro 2016. Ce décret offre une possibilité mais nullement une obligation. »
Pour les élus, les nouvelles dérogations permettraient la légalisation des centaines de milliers de panneaux illégaux alors qu’il a fallu attendre 5 ans pour que la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 deviennent enfin effective en juillet 2015.
« La loi Grenelle 2 de 2010 prévoit le renforcement de la protection du paysage contre les nuisances visuelles, ce projet de décret revient sur ces mesures de protection et va à l’encontre des orientations votées au sein des conseils municipaux et métropolitains il y a juste un an pour la préservation de l’environnement et d’une diminution des espaces publicitaires sur la voie publique », ajoute Michèle Delaunay.
Les craintes pour le Parc Lescure
Déjà objet de discordes pour son aménagement, le Parc Lescure est le premier sur la liste des élus qui ont clairement exprimé leur crainte de le voir particulièrement défiguré par l’adoption de la loi :
« Pour Emmanuel Macron, l’objectif initial était d’aider les collectivités à assumer plus facilement le coût de leurs stades pour l’Euro 2016, précise Pierre Hurmic. Or le projet de décret qui permettra d’implanter des panneaux publicitaires lumineux de 50 m2 concerne les stades de plus de 15000 places, c’est-à-dire 53 stades, alors que seulement 10 stades accueilleront des matches ! »
Pour Michèle Delaunay, ces décisions « vont à l’encontre de l’article R418-4, de la loi du Grenelle et du pacte communale que nous défendons à Bordeaux et dans la métropole ». La députée ne veut pas voir le maire de Bordeaux « sauter sur toutes les occasions pour améliorer les finances de la ville appauvries par les grandes réalisations ».
A la mairie, Jean-Louis David se veut rassurant :
« Je n’ai pas fait une lecture attentive du décret, mais il va a contrario de toutes les réflexions que nous avons pu avoir en matière de pollution visuelle durant ces dernières années. Nous allons expertiser ce décret avec les services de la métropole qui en ont les compétences. Il n’y aura pas de panneaux autour du Parc Lescure et la question se pose aussi pour le Matmut Atlantique. L’enjeu n’est pas seulement celui du football. »
Lutter contre le lobby des afficheurs et… le sexisme
D’autres points noirs sont pointés du doigt par les élus PS et EELV : l’autorisation de panneaux scellés au sol de grand format dans les villes de moins de 10 000 habitants, où ils étaient jusqu’à présent interdits, ainsi que l’extension de l’autorisation de la publicité numérique dans les agglomérations de moins de 10 000 habitants faisant partie d’une unité urbaine de plus de 100 000 habitants, mais aussi l’extension à moitié avouée de la surface maximale des panneaux publicitaires de 12 m2 à 16 m2 de la surface contrariant ainsi la loi issue du Grenelle de l’Environnement, applicable depuis le 13 juillet 2015.
Emmanuelle Ajon appelle à une réflexion plus globale :
« Au-delà de la pollution visuelle et environnementale, il faut également revoir les messages que la publicité véhicule avec des images sexistes et violentes dont les enfants ne peuvent pas être protégés. »
Face à ce décret « taillé sur mesure pour le lobby des afficheurs comme Decaux », Pierre Hurmic appelle à « ne pas renouveler le contrat Decaux qui prend fin en 2020 », insiste sur la création d’ « une zone “zéro publicité” sur l’ensemble du secteur Unesco et l’interdiction des publicités et enseignes numériques énergivores et animées, en limitant les autres formats publicitaires à 2 m2 maximum sur l’ensemble du territoire de la Ville ».
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