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Festival du film d’histoire de Pessac, une édition courte mais intense

Repoussée suite aux attentats parisiens de novembre 2015, la 26e édition du festival du film d’histoire de Pessac s’est tenue sur une durée plus courte et a tout de même comptabilisé 18 000 entrées. Le public est venu nombreux pour les débats sur le Proche Orient mais aussi pour une sélection inédite.

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Festival du film d’histoire de Pessac, une édition courte mais intense

Un documentaire historique n’est pas seulement la genèse factuelle d’un événement ayant lieu quelques années ou quelques dizaines d’années auparavant. Il peut se faire aussi à hauteur d’hommes, dans le ressenti des acteurs concernés et l’histoire intime se révèle alors tout aussi marquante que la grande.

Avant de reprendre, dans un peu plus de 6 mois, le chemin de la 27e édition du festival international du film l’histoire de Pessac – qui se déroulera du 14 au 21 novembre 2016 autour du thème « La culture et la liberté » –, voici un coup de projecteur sur trois des quatorze films qui étaient en lice cette année. Des prolétaires bulgares aujourd’hui aux militants des droits civiques américains des années 60, l’humain a été le principal fil conducteur de cette sélection.

« Et le bal continue » (DR)

« Et le bal continue » de Georgui Balabanov
Prix du Public du film d’histoire – catégorie documentaire

Comment se porte la société bulgare aujourd’hui ? Mal, sommes-nous obligés de concéder après la vision de ce documentaire. L’espoir placé dans la fin du communisme a été déçu, le réveil est douloureux. En mal de repères et à l’économie exsangue, la Bulgarie porte les stigmates d’une intégration dans l’Union européenne mal négociée.

Lé néo-libéralisme du XXIe siècle est passé par là et renvoie aux oubliettes les utopies démocratiques pour d’autres maux : corruption, élections truquées, clientélisme. Le constat est amer mais le ton lui se veut mordant. Point de misérabilisme dans les chaleureux portraits de ces habitants aux parcours souvent détonants : un haltérophile devenu député nationaliste, un chanteur gay et tsigane, un journaliste vedette et un ex-dissident communiste. Les mots du réalisateur lors de la remise de son prix sonne comme une évidence au regard du film :

« Pour moi le plus important c’est le contact avec les gens. »

Sélectionné au Cinéma du réel à Paris, le film coproduit par ARTE France et Ladybirds films sera diffusé sur la chaine franco-allemande le 19 avril prochain à 00h20.

« La bataille du charbon, 1944-1948 » (DR)

« La bataille du charbon, 1944-1948 » de Frédéric Brunnquell

« Classe moyennes, des vies sur le fil », « Nos vies discount » : ces dernières années Frédéric Brunnquell s’est intéressé à plusieurs reprises à la classe travailleuse, en proie au chômage, au déclassement et au fort sentiment d’isolement. Dans son dernier documentaire, il nous rappelle qu’il y a 50 ans à peine la classe ouvrière était forte, politisée, unie dans la lutte. Au sortir de la guerre, les ouvriers étaient les seuls à pouvoir reconstruire la France et parmi eux, plus que tous les autres, les mineurs. Les « gueules noires » ont été exhortées à fournir au pays le charbon dont il avait besoin.

Malgré les réticences idéologiques (les petits chefs collabo étaient toujours en place), l’épuisement après cinq ans de conflit, ces ouvriers du charbon ont retrouvé, à force de labeur, la production d’avant-guerre. La récompense sera de courte durée avec l’instauration du statut du mineur (augmentation des salaires, logement gratuit à vie, sécurité sociale). En 1948, le début de la Guerre froide et la volonté affichée de baisser le coût de l’extraction du charbon amènent une vague de récession sociale dont ces héros d’hier seront les premières victimes.

Du temps glorieux où ils étaient fiers de leur travail et conscients de leur utilité nationale, à la casse de leurs droits, jusqu’à la féroce répression de cette grêve d’octobre 1948, c’est l’histoire d’une impardonnable trahison de l’Etat dont aucun d’entre eux n’est sorti indemne, à voir les émouvants témoignages qui émaillent ce récit. Difficile de rester insensible devant la terrible image des chars blindés devant les mines, les mêmes que ceux utilisés seulement trois ans avant face à l’occupant nazi.

« 1961, le route de l’égalité » (© AB Productions)

« 1961, la route de l’égalité » de Mathilde Fassin

Le 13 novembre 1956, suite au combat (entre autres) de Rosa Parks et Martin Luther King, la ségrégation dans les bus est déclarée anticonstitutionnelle par la Cour suprême des Etats Unis. Mais des lois à la réalité il y a un grand pas que les états racistes du sud ne sont pas prêts de franchir.

En 1961, un groupe d’étudiants décident de défendre leurs droits par des sit-in pacifiques dans les lieux où ils sont interdits d’accès. Ils apprennent grâce à des jeux de rôles à ne pas riposter face aux agressions physiques et verbales dont ils font l’objet. De Nashville ou Atlanta, ils décident de gagner les états du sud à bord de bus qui seront immédiatement vandalisés, les militants lynchés.

Emprisonnés pour désordre public, ceux qu’on appellera les « freedom riders » seront chaque jour de plus en plus nombreux jusqu’à devenir une masse incontrôlable nécessitant l’intervention de Kennedy tout juste élu pour faire appliquer la loi fédérale. De France, on ne connait de la lutte des droits civiques que les grandes figures du mouvement, et les lois comme le Civil Right Acts (votée en 1964). Mais c’est surtout dans la rue, les transports et les espaces publics que les noirs américains ont du s’imposer pour faire changer les mentalités.

Et le combat n’est pas terminé. Les jeunes étudiants d’hier sont aujourd’hui des retraités qui continuent de lutter contre la discrimination raciale, les ghettos, les violences policières toujours d’actualité aux Etats Unis.


#cinéma

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