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Comment Bordeaux veut devenir « capitale du vélo »

Bordeaux Métropole a adopté vendredi son nouveau plan vélo, auquel seront consacrés 70 millions d’euros d’ici à 2020. Assez pour atteindre l’objectif de 15% de part modale du deux roues et prétendre au titre de « capitale du vélo » ? A voir.

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Comment Bordeaux veut devenir « capitale du vélo »

En consacrant 70 millions d’euros à son plan vélo 2017-2020, « Bordeaux Métropole devient le territoire au plan national qui investit le plus par habitant dans le vélo », se félicite Brigitte Terraza, vice-présidente (PS) en charge des mobilités alternatives – à titre de comparaison, le plan vélo de la ville de Paris pour la période 2015-2020 est doté de 150 millions d’euros.

Le texte, voté ce vendredi en conseil de métropole, a donc été quasi unanimement salué par l’assemblée, notamment dans les rangs écolos :

« C’est un acte fort de cette mandature, qui associe un plan de financement important à des objectifs ambitieux », selon Gérard Chausset, président (Europe écologie – Les Verts) de la commission transports.

« Il traduit une volonté politique nouvelle de faire du vélo un véritable mode de déplacement », renchérit son collègue Pierre Hurmic, même si pour les Verts bordelais, tout n’est pas rose. Voici les principaux points d’un plan qui entend rien de moins que faire de Bordeaux la « capitale du vélo ».

1 – Des sous pour les infrastructures

C’est une entrave à la pratique du vélo identifiée depuis longtemps, ce plan va dons s’atteler à améliorer « la qualité et la continuité des aménagements cyclables ». Une partie conséquente du plan (26 millions d’euros) concerne des pistes et des aménagements qui seront réalisés dans le cadre des grands chantiers de la métropole, comme la ligne D du tram ou le pont Jean-Jacques Bosc.

Par ailleurs, le Réseau express vélo (REVE) sera enfin bouclé pour « permettre des déplacements de la périphérie vers le cœur de la Métropole, mais aussi de périphérie à périphérie, sur des distances de l’ordre d’une dizaine de kilomètres.

2,5 millions d’euros de travaux ont été fléchés en ce sens pour 2017 et 9 millions seront dévolus dans le cadre des CODEV 2018-2020 (contrats de codéveloppement entre la métropole et les communes, qui déterminent les investissements de l’agglo ville par ville).

Les maillons faibles

Le plan vélo distingue les boulevards comme le « maillon faible » du réseau. Équipés d’une  bande cyclable « trop étroite et insuffisante pour permettre une pratique massive et en toute sécurité », ils sont empruntés chaque jour par seulement 1000 cyclistes, contre 6000 sur le pont de pierre, un chiffre dérisoire au regard de la population vivant dans cette zone. 3 millions d’euros seront consacrés à l’aménagement de cet axe, sans attendre le chantier du transport en commun en site propre annoncé.

En revanche, Gérard Chausset déplore que le plan vélo ne se penche pas davantage sur les franchissements de rocade, à ses yeux insuffisants. Et Brigitte Terraza a affirmé vendredi son opposition à la fermeture de la piste cyclable du pont François-Mitterrand, « un mauvais signe politique » selon elle. L’exécutif métropolitain est donc divisé sur ce qui ressemble fort à un symbole : président de Bordeaux Métropole, Alain Juppé a rappelé que la passerelle n’est empruntée chaque jour que par 270 cyclistes, et souhaite la remplacer par une troisième voie pour les voitures.

Le plan prévoit par ailleurs de généraliser les contre-sens cyclables dans les zones 30, promises à être étendues à terme à tout l’intra-boulevards. Restera encore à prendre de la place au stationnement des voitures dans nombre d’entre elles, et à y faire respecter les limitations de vitesse…

2 – Des places pour se garer

Autre bâton dans les roues des vélos : une capacité de stationnement « clairement insuffisante », selon le texte de la délibération. Ne pas savoir où attacher son biclou pendant la journée, ou le mettre à l’abri la nuit quand on a pas de place chez soi, c’est un vrai sujet.

Aussi, le plan vélo prévoit 100 000 euros par an pour l’installation d’arceaux classiques, 700 000 euros « pour l’installation de dispositif innovants de stationnement dans les quartiers », type garages collectifs, et 316 000 euros par an pendant 6 ans prévus dans le cadre de la délégation de service public avec Keolis pour réaliser des abris vélos sécurisés.

3 – Donner accès à tous au vélo

Mamma mia ! La Maison du vélo de Bordeaux va devenir la Maison métropolitaine des mobilités alternatives (Mamma), qui s’appuiera sur un réseau d’associations et de régies communales, comme les maisons du vélo de Bègles (Cycles et manivelles) ou de Blanquefort (Rustine et cambouis). Suite à un appel à candidatures auprès des communes volontaires, 2 nouvelles maisons locales des mobilités, l’une sur la rive droite et l’autre sur la rive gauche seront « créées ou soutenues ».

Ces antennes assureront la promotion du vélo (avec l’organisation de brevets cyclistes) mais aussi le prêt de vélos. Jusqu’ici seulement possible à Bordeaux, il sera étendu sur tout le territoire métropolitain. 60 000 euros seront consacrés chaque année au renouvellement de la flotte, et 300 000 euros (en 2017-2018) à l’achat de vélos cargos, électriques (VAE) ou pliants. Sans compter les Pibals, toujours au garage pour résoudre des problèmes techniques, et dont le retour est annoncé pour 2017…

Le tarif de ces prêts sera modique : 25 euros pour un mois de location de VAE ou de vélos cargos, et 10 mois pour des vélos standards, des périodes théoriquement non renouvelables.

Parallèlement, la métropole poursuit le développement du réseau de vélos en libre service, V3, au rythme de 10 nouvelles stations par an, pour atteindre les 200 stations en 2020. Coût : 18,5 millions d’euros sur la période 2016-2020.

Enfin, Bordeaux Métropole continuera à subventionner l’achat par les plus modestes de vélos cargos, électriques ou pliants, à hauteur de 60 000 euros par an pour les particuliers et 30 000 euros pour les entreprises qui se dotent d’une flotte de vélos.

4 – Faire la pub du deux-roues

Lors de la présentation du plan vendredi, Brigitte Terraza a dégainé une affiche autrichienne de mannequin en train de pédaler pour assurer la promotion du vélo. La métropole voudrait faire de même, en présentant des célébrités bordelaises adeptes de la Petite Reine.

Objectifs : « souligner l’efficacité du vélo comme mode de déplacement », le plus rapide pour aller d’un point A à un point B en ville, notamment sur les trajets de moins de 2 kilomètres qui restent majoritairement faits en voiture à Bordeaux… Mais aussi le plus économique, et le meilleur pour la santé.

Cette campagne de communication sera lancée dès 2017, pour un budget de 50000 euros par an. « Un peu indigent pour gagner la bataille culturelle des changements de comportements », déplore Pierre Hurmic, soulignant que le changement d’identité visuellle de TBC avait coûté 1,5 million d’euros.

L’élu écologiste bordelais regrette au passage la volonté de la métropole d’investir dans des « gadgets », comme les repose-pieds pour les cyclistes aux feux ou des poubelles leur permettant de jeter des déchets sans s’arrêter, pour 100000 euros par an, tout de même.

5 – Objectif « palpable » ou « irréaliste » ?

Pierre Hurmic tique aussi sur les mots employés par la métropole, qui fait valoir sa 8e place au classement mondial des villes cyclables (au Copenhagenize Index), « alors que 15 villes ont en Europe une part modale supérieure à 20% ». Il aurait souhaité plus de « lucidité » dans les objectifs du plan – atteindre 15% de part modale du vélo « le plus rapidement et si possible d’ici 2020 », contre 4% en 2009.

« On sait tous que ce n’est pas réaliste, juge Pierre Hurmic. Nous avons mis 4 ans pour gagner 4%, et passer à 8% (dans Bordeaux, NDLR) on ne va pas doubler à nouveau dans les 4 ans qui viennent. »

Cela supposerait en effet d’atteindre 415000 déplacements à vélo, soit un quadruplement en 10 ans. La métropole veut croire que l’objectif « devient palpable ». Elle se fonde pour cela sur l’augmentation du nombre de déplacements en vélo, de l’ordre de 7% en 2015 par rapport à 2014, et qui, si elle se poursuit à ce rythme, permettrait un doublement de la pratique en 10 ans.

Cela nous mènerait alors plutôt en 2026. Mais la collectivité a d’autres chiffres : +20% de passages de cyclistes sur les compteurs permanents en septembre 2016 par rapport à l’année précédente. Si cette tendance était globale, elle se traduirait par un doublement du nombre de déplacements à vélo d’ici 2020. Bordeaux Métropole s’en remet enfin au bureau d’études Copenhagenize, organisateur du classement mondial des villes cyclables, qui « estime le potentiel de la métropole bordelaise à 20% de part modale vélo d’ici 10 ans ».

Un potentiel qu’il s’agit de ne pas gâcher, en faisant en sorte que le deuxième plan vélo soit appliqué, contrairement à son prédécesseur.


#transports

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