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Le tramway Gradignan-Bordeaux-Cenon coince sur les boulevards

Les maires de Bordeaux Métropole veulent une nouvelle ligne de tram reliant Gradignan à Cenon. Mais selon les études, qui proposent aussi une desserte de Talence, de sérieux doutes restent à lever, notamment sur le coût du projet et les risques de congestion sur les boulevards de Bordeaux. Sauf si les métropolitains se mettent au vélo…

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Le tramway Gradignan-Bordeaux-Cenon coince sur les boulevards

Pour qu’un tramway circule un jour sur les boulevards de Bordeaux, il va falloir que les habitants de la métropole pédalent. C’est une des conclusions étonnantes des études réalisées sur la ligne de tram Gradignan-Cenon, un des projets prioritaires de la métropole.

La synthèse qui a été soumise ce vendredi au vote des élus est limpide : si la part modale métropolitaine du vélo demeure à son niveau actuel (4% des déplacements réalisés à bicyclette), « on constate de très forts impacts sur la circulation automobile, qui provoquent des situations de congestion à l’échelle métropolitaine. Ces conséquences sont trop importantes pour l’implantation d’un tramway sur les boulevards et le passage à une voie de circulation dans les deux sens qu’il implique ».

Si par contre, le vélo grimpe à 10% (« niveau qui devrait être atteint rapidement au regard des excellents chiffres d’évolution de l’usage du vélo et des engagements ambitieux pris par la Métropole », s’enflamme l’étude), « le niveau de circulation automobile baisse et le passage à une voie de circulation sur les boulevards permet d’obtenir une solution fonctionnelle ».

Une congestion « nettement plus élevée qu’aujourd’hui »

Mais une solution très loin d’être optimale, nuance aussitôt la métropole : ses simulations montrent que « le niveau de congestion sur les boulevards risque d’être nettement plus élevé qu’aujourd’hui ». Pour qui s’est déjà retrouvé coincé en voiture entre deux barrières, ça fait rêver !

Pour mieux évaluer la chose, il est donc nécessaire… de faire de nouvelles études, notamment sur les carrefours, « éventuel “maillon faible” de la circulation sur les boulevards », en particulier là où traversent les lignes de tram actuelles, et où passeront la D et le BHNS vers Saint-Aubin.

Et c’est loin d’être la seule inconnue dans l’équation du tram Gradignan-Talence-Bordeaux-Cenon. Impossible à l’heure actuelle de faire un réel bilan socio-économique du projet, par exemple. Certes, le budget d’investissement de la ligne est estimé : 413 millions d’euros dans le scénario d’un tracé en fourche – une branche partant vers Gradignan, une autre vers Thouars, à Talence –, présentant les meilleurs potentiels de fréquentation (73600 voyageurs par jour).

Mais pas les coûts de l’opération d’urbanisme « qui accompagnera le projet et lui donnera tout son sens ». On imagine que l’estimation actuelle du tram Gradignan-Talence-Bordeaux-Cenon – 20 millions d’euros du kilomètre –, pourrait facilement exploser.

L’étude maudite

Sachant que la construction du Mettis, une ligne de BHNS (bus à haut niveau de service) à Metz, a coûté 13 millions du kilomètre, il n’est pas absurde de penser que pour le prix d’un tramway, Bordeaux Métropole pourrait se payer une ligne de bus efficace, plus la réhabilitation des boulevards, qui malgré leur charme sont devenus une autoroute urbaine.

Le tout sans affecter outre mesure la circulation, comme l’a montré une étude de l’a’urba, mystérieusement dédaignée par les élus métropolitains – seul Gérard Chausset, président écologiste de la commission transports du conseil de métropole, y a fait allusion ce vendredi, s’attirant les foudres de Michel Labardin.

Le maire de Gradignan et vice-président de Bordeaux Métropole en charge du dossier, n’a même pas prononcé le mot de BHNS, alors que le conseil a voté le lancement d’études opérationnelles sur cette option. Examiner celle-ci est en effet « indispensable à la future concertation », pour avoir une chance de lancer le chantier lors de la prochaine mandature 2020-2026, sans qu’il soit stoppé par le tribunal administratif, comme la ligne D.

« Ce projet de tramway présente un potentiel remarquable, le plus élevé du SDODM (le programme des infrastructures de transports de la métropole, NDLR) et il peut rivaliser avec la fréquentation des autres lignes, tranche Michel Labardin. Il faut désormais poursuivre les études en mode tram, expertiser et résoudre le problème de congestion sur les boulevards, ouvrir la concertation publique et rechercher la localisation des parcs de stationnement sur les boulevards. »

Harmonie cogestionnaire

Ses collègues édiles l’appuient sans réserve, à l’instar d’Alain Cazabonne, maire de Talence, selon lequel les questions de rentabilité ne sont pas si importantes :

« Le tracé nous convient à tous. Le TRI (taux de rendement interne, qui mesure l’impact socio-économique d’un projet, NDLR) est devenu le nouveau veau d’or. Si on en avait tenu compte lors des premières phases de construction du tramway, on ne serait pas allé à Bacalan et sur la rive droite. »

Les élus des villes concernées ont presque tous apporté vendredi leur soutien enthousiaste à ce nouveau tram, avec pour principale angoisse que le prolongement de la ligne D vers Saint-Médard (dont la réalisation n’est au passage pas non plus actée) ne devienne prioritaire.

Quelques notes dissonantes se sont toutefois discrètement fait entendre dans cette belle harmonie cogestionnaire. L’ancien président (PS) de la CUB, Vincent Feltesse s’est interrogé sur les coûts :

« C’est le plus gros investissement qui serait jamais entrepris, avec les contraintes financières que l’on sait. Pour mémoire, la phase 1 du tramway, c’était 400 millions d’euros. C’est un projet de même ampleur que les quais, voire supérieur en terme d’impacts, mais avec des effets d’évitement par les automobilistes qui peuvent être très négatifs. »

Pour Gérard Chausset, « on voit bien que le niveau d’étude est insuffisant, qu’on est dans l’aléatoire » :

« Je n’ai aucun a priori sur la desserte en Gradignan en tram si elle est justifiée, mais c’est essentiellement les boulevards qui emmènent le gros potentiel de fréquentation. Or le  passage par les boulevards risque de compliquer ce dossier. Décorrélons la partie Gradignan-Talence-CHU de celle des boulevards si voulez que le tram arrive rapidement à Gradignan, cela nous permettrait de réfléchir sur les boulevards dans leur intégralité », et pas sur 40% d’entre eux (la partie nord ouest, entre Chaban et Cenon).

Fin de non recevoir d’Alain Juppé, président de la métropole :

« Déconnecter Gradignan Pellegrin de la ligne des boulevards est une très mauvaise idée, cela fragiliserait la rentabilité du projet. En outre, le bouclage des boulevards est prévu dans le SDODM. »

Mais sa réalisation commence fort à ressembler à la quadrature du cercle.


#transports

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