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Block people, boat party {iBoat 6 ans – Block Party Delinquent Habits + Banzaï lab}

La date était fixée depuis un bail, annoncée sur le Facebook du groupe depuis le début de l’été. Ives Irie, l’un des Mcs du groupe, bafouille au micro : ça fait 10 ans, 15 ans, que les Delinquent Habits n’étaient plus venu dans la région, il ne se souvient plus. Certains les avait vu « à l’époque », …

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Block people, boat party {iBoat 6 ans – Block Party Delinquent Habits + Banzaï lab}

La date était fixée depuis un bail, annoncée sur le Facebook du groupe depuis le début de l’été. Ives Irie, l’un des Mcs du groupe, bafouille au micro : ça fait 10 ans, 15 ans, que les Delinquent Habits n’étaient plus venu dans la région, il ne se souvient plus. Certains les avait vu « à l’époque », comprendre tout début des années 2000 à Toulouse, ou encore au Venezuela, mais personne ne se rappelle d’eux à Bordeaux. Quel événement donc que cette Block Party qui, plutôt que dans une cour d’école ou un city-stade, se déroulait dans le cadre presque luxueux du quai de l’iBoat.

J’arrive trop tard pour voir quoique ce soit des performances de peinture et de danse sans lesquels la party ne serait pas block. Mais pile à temps pour avoir une bière en main quand le son monte, le sample de Dr Dre Still agrémenté d’un scratch ou deux annonce l’arrivée des deux MCs qui prennent la scène étonnamment très calmement. Pas de grand make some noise, say yeeeah, et consorts. Presque trop discret, Kemo rappe sans énergie son premier couplet, sapé en technicien du spectacle avec son t-shirt noir, ses gants et ses lunettes de sécurité, la couette bien rangée dans une casquette noire.

Tout s’explique : les rappeurs sont en mode soundcheck, même si la foule est déjà dense devant la scène et qu’il faut se frayer un passage pour atteindre les premiers rangs. Puis Ives l’annonce : c’est l’ouverture du tequila bar. Et effectivement une petite brune hilare, la californienne latino par excellence, est sur le bord de scène et donne des shots de tequila à tout le monde.

Whesquila

L’ambiance est posée : elle sera festive et généreuse. Ives réclame son « whesquila » et passera la moitié du set une boutanche de sky bas de gamme à la main, la classe. Pas compliqués les mecs. S’installe alors la sensation d’avoir invité à l’apéro des potes ricains qui savent un peu rapper. La banane jusqu’aux oreilles, Ives explique que le public européen est bien plus intéressant que les américains « qui n’aiment que le shit qui passe à la télé et ne respectent plus les rappeurs de la vieille génération ». On le savait, mais c’est agréable de se l’entendre dire.

Les rappeurs n’oublient personne dans le public qui déborde partout, de chaque côté de la scène. Kemo rappe encore mieux qu’à l’époque, Ives fait les refrains chantés avec une voix d’ivrogne sympa, et les deux ont les yeux rivés dans ceux de chaque spectateur.rice, une façon d’occuper la scène inouïe, une leçon de rap. Nouveau single, ça chauffe un peu, mais le public de tous les âges (une moitié autour des 35-40 ans et l’autre plus jeune autour des 20-25) réclame les vieux singles.

Alors, celle dont on apprend qu’elle est la femme de Ives Martin nous ressert une tournée de tequila, et DJ Invincible balance le sample mariachi du cultissime Tres Delinquentes ! C’est la folie. Et ça le restera jusqu’au bout. Un freestyle sur une instru bien française (demain c’est loin d’IAM), avec force dédicace et check dans le public, un enchaînement de tubes comme Here come the horns qui se révèle dix fois plus pêchu que sur disque.

Ives prétend que DJ Invincible lui a dit à l’oreille qu’il voulait faire un petit mix, d’accord mais uniquement avec du Cypress Hill car « sans Cypress Hill, il n’y aurait jamais eu les Delinquentes, etc. », le MC souriant a la fraîcheur de celui qui dit tout ça pour la première fois. Et nous, on gobe. Tout. On est à L.A. en 1996 entre deux blocs. C’est leur premier concert.

Comme si c’était possible, l’ambiance monte encore d’un cran, à grand renfort de tequila et de binouzes. Quand l’entrée est gratuite… Pour finir en apothéose, avec un House of the rising drum qui fait paniquer les chastes et sérieux videurs de la CQ – c’est le nom de leur boîte de… sécu – quand Ives se vautre dans le public. Finalement c’est bien le CQ qui prendra une petite gifle de la part du MC ivre de whesquila, pour le plus grand bonheur de la foule. Il fallait bien que le seul qui fasse la gueule soit châtié !

Ce blog sera une tentative capillotractée de faire des parallèles entre musique, bouffe et vins, c’est l’esprit, je vous l’annonce. Mais sur le chemin du retour je ne peux m’empêcher de penser que j’ai déjà un petit truc, là : j’aime la cuisine simple, généreuse et sincère des Delinquent Habits, la démarche jouisseuse de l’iBoat qui s’est fait plaisir pour son anniversaire à rincer tout le monde à l’œil, avec tournée de tequila du patron. Et pour qui recherche les vins vieux qui ont su garder fraîcheur et authenticité : il se peut que les latinos de L.A soient de ceux-là.

Edit : il a fallu que 48h après je goûte à ce vieux chenin du maître Mark Angeli : des années d’oxydation donnent un nez 100 fois plus mûr, mais il reste de la fraîcheur et de maîtrise. Comme un delinquente plongé dans un bol de tequila

« Les Fouchardes » 1996, Ferme de la Sansonnière, Mark Angeli. Chenin blanc


#iboat

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