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Des économies d’eau au compte-goutte en Gironde

La maîtrise de la consommation en eau expérimentée depuis 2012 en Gironde a permis d’économiser 900000 m3 par an, et de baisser les factures des foyers équipés de kits hydro-économes. Mais il va falloir faire 10 fois plus pour sauver les nappes profonde approvisionnant en eau potable le département.

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Des économies d’eau au compte-goutte en Gironde

Après une semaine de pluies non stop, on pourrait penser que la Gironde ne manque pas d’eau. Et pourtant, le département est dans une situation délicate, voire « critique », selon Gérard Chausset, adjoint au maire de Mérignac :

« Au début de l’été dernier, lorsque s’est conjugué la canicule et un afflux de visiteurs à Bordeaux pour Vinexpo, le distributeur de la métropole (Suez, NDLR) a atteint ses limites de capacités de production », avec une consommation d’eau potable qui a approché les 180 000 mètres cubes par jour.

Alors que les besoins continuent à augmenter avec le boom démographique de la région, Mérignac sert de poisson pilote à la métropole : depuis 2002, la deuxième ville du département est parvenue à réduire de 17% sa consommation d’eau potable. 80% des bâtiments publics et un quart des foyers (8000 sur les 35000 de la commune) ont reçu des équipements hydro-économes (réducteur de débit douche, mousseurs pour robinets…).

« Pour 70000 euros investis, on en a économisé 660 000 », se félicite Gérard Chausset.

Le conseil départemental de la Gironde (en partenariat avec le Smegreg, le syndicat de gestion des eaux potables du Blayais et la Ville de Mérignac), a lancé en 2012 le projet MAC Eau (maîtrise de la consommation en eau), qui vient de s’achever, et dont un bilan a été présenté ce jeudi à Bordeaux.

L’investissement (2 millions d’euros, financés pour moitié par l’Union européenne) est plutôt positif, principalement grâce à la distribution gratuite de plus de 80000 kits hydro-économes à des ménages girondins. Ils leur ont permis de réduire leur facture d’eau de 12% à 20%.

Verre à moitié plein

Alors que la Gironde a accueilli près de 210000 nouveaux habitants depuis 2003, MAC Eau a contribué à stabiliser les prélèvements dans ses nappes profondes de Gironde. Cela reste une goutte d’eau : les 900000 m3 d’eau ainsi économisés chaque année représentent moins de 1% des 110 millions de m3 puisés chaque année dans les nappes profondes du département.

Et le verre est à moitié vide – les instigateurs espéraient réduire les prélèvements de 2 millions de m3 -, alors que les financements s’assèchent. Comment aller plus loin ?

« On s’est rendu compte que ce n’était pas facile de convaincre les gens au début du programme, relève Bruno Lemenager, de l’Agence de l’eau Adour-Garonne. Aujourd’hui MAC Eau s’arrête, mais on va continuer à financer la diffusion en allant chercher les distributeurs d’eau et de matériels, et les mettre à contribution pour passer à la vitesse au-dessus. Car nous avons montré que c’est un investissement rentable : un kit de 20 euros s’amortit en 6 mois. Le consommateur va faire des économies pour lui-même et pour la planète. C’est une façon de le sensibiliser au changement climatique. On attend un millions d’habitants supplémentaires sur le bassin Adour-Garonne, mais les ressources en eau vont diminuer, notamment à cause de la fonte des glaciers dans les Pyrénées. »

Réservoir d’eau potable rue Paulin à Bordeaux (Bordeaux Métropole/DR)

L’approvisionnement en eau potable de Bordeaux Métropole se fait lui dans des nappes datant de l’éocène (vieilles de 40 à 50 millions d’années) et de l’oligocène, et situées entre 50 et 500 mètres sous terre. Or ces nappes, d’une superficie pourtant plus importante que celle du département, sont aujourd’hui menacées.

« Nous avons constaté que les prélèvements sur la ressource en eau sont plus importants que sa capacité à se renouveler », indique Alain Renard, président du Syndicat des eaux du Blayais.

Ça ne va pas manquer de sel

En outre, les nappes situées sous la métropole bordelaise encourent un risque de dénoyage : si leur niveau baisse trop, de l’eau de mer pourrait entrer et saliniser l’eau douce, altérant irrémédiablement celle-ci.

L’objectif affiché du Sage (schéma d’aménagement et de gestion des eaux) est donc de réduire la pression sur ces nappes profondes de 25 millions de m3 par an. 15 millions de ressources de substitution, c’est-à-dire de nouveaux forages dans les nappes superficielles, et 10 millions proviendraient de baisses de consommation.

Les nappes profondes de Gironde en 2012 (BRGM/DR)

Quels pourraient être ces gisements d’économie ? La lutte contre les fuites dans les réseaux, qui représentent le quart de l’eau potable prélevée, est une option efficace. Dans le Blayais, l’installation de modulateurs de pression, diminuant celle-ci de 30 à 50%, a permis de limiter les volumes dilapidés de 18%, soit 90000 m3 par an. Le même effort dans les 120 syndicats de Gironde aurait donc un certain impact, à condition de convaincre les délégataires ou fermiers privés, lorsque la gestion ne se fait pas en régie.

« Lors des renégociations de contrats de gestion de l’eau, il faut aider les petites communes qui n’ont pas d’assistance technique à imposer aux entreprises de réduire systématiquement les fuites », affirme Bruno Lemenager.

Mais aussi d’inciter les consommateurs à changer leurs comportements, poursuit Gérard Chausset :

« Les distributeurs d’eau doivent revenir au centre du débat. Pendant des années ils ont incité les gens à surconsommer. Aujourd’hui ils ne peuvent plus scier la branche sur laquelle ils sont assis. L’eau est une denrée rare, ils ont tout intérêt à la préserver s’ils veulent continuer à en vivre. »

Cela passera sans doute aussi par le bâton, en faisant payer plus cher les plus gros consommateurs. Si la France est passée d’une tarification dégressive (plus on consommait, moins on payait) à des prix progressifs, il y a encore du chemin à faire en ce sens. Y compris obligeant les pollueurs à mettre davantage au pot.


#Adour-Garonne

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Photo : Peccadille/Wikimedia Commons/CC

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