Erreur de la mairie en votre faveur, recevez 136 217 euros
A la Ville de Bordeaux, 10 agents contractuels de droit public ont perçus pendant deux ans, depuis leur recrutement initial, des salaires plus élevés que ceux fixés par les indices de rémunération de leurs postes. A l’arrivée, le trop perçu total s’élève à 136 217,37 euros.
Lors du vote d’une délibération en conseil municipal le 10 juillet dernier, la Ville a décidé de renoncer au remboursement de ce montant, « au regard de la responsabilité de l’administration et de la bonne foi des agents contractuels concernés ». Et entériné la remise à niveau des contrats de travail.
« Ce n’est pas un paiement indu », martèle alors l’adjoint aux finances, Nicolas Florian, justifiant cette remise gracieuse. Le trop perçu représentait 567 euros en moyenne sur la fiche de paie mensuelle des agents. Mais l’élue Michèle Delaunay souligne que pour l’une des personnes concernées, il s’élevait tout de même à 2700 euros de plus chaque mois :
« Nous avons constaté qu’un de vos agents de communication avait une remise gracieuse de 69 000 euros, je cite de mémoire, ce qui correspondait probablement à un salaire de plus de 13 000 euros », lâche l’élue PS Michèle Delaunay.
Le groupe socialiste s’est abstenu, le Front national a voté contre une délibération « choquante », selon Catherine Bouilhet :
« Sur le fond, vous voulez faire payer les erreurs de l’administration par le contribuable ; chose que nous ne pouvons pas accepter. Sur la forme, les sommes en jeu sont considérables. Pour l’agent concerné en annexe 1, cela représente plus de 5 mois de salaire brut. Même si celui-ci est plutôt modeste, la proportion de l’erreur ne l’est pas. Dans le cas le plus flagrant de l’annexe 2, la somme trop perçue en question représente 6 ans et demi de salaire brut d’un agent de catégorie C rémunéré au SMIC. »
Selon Nicolas Florian, le contribuable n’est pas pénalisé et les niveaux de salaires « correspondent à ce qui se fait dans les communes de plus de 100 000 habitants ou dans les collectivités territoriales, il n’y a rien de choquant ».
« D’abord, pour l’immense majorité de tous ceux qui sont titulaires, ils sont fixés par la loi et par la grille de la Fonction publique, précise le maire, Alain Juppé. Et deuxièmement, je ne cesse d’entendre dire que nous avons du mal à recruter parce que nos salaires sont trop faibles et que beaucoup de compétences vont vers le privé parce que nous ne sommes pas capables de payer les gens décemment. »
Voilà peut-être de quoi susciter des vocations.
Le tribunal administratif ne valide pas le bus Bordeaux – Saint-Aubin
Saisi par le groupuscule de riverains « Bordeaux à cœur », le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a suspendu le 30 octobre dernier la déclaration d’utilité publique (DUP) du bus à haut niveau de service (BHNS) entre Saint-Aubin-de-Médoc et la gare Saint-Jean à Bordeaux.
Selon Bordeaux à cœur, « les atteintes à la propriété privée » et « le coût financier » du projet sont « excessifs ». Motifs avancés par le tribunal : des prévisions trop optimistes en termes de fréquentation espérée – 50 000 voyages par jour « ne parait pas, en l’état du dossier, (…) fondé alors que le bus Lianes 3+ existant sur le même trajet (…) n’enregistre que 10 000 voyages par jour », et a connu entre 2015 et 2016 une baisse de fréquentation de 2,9%. Sauf que la Lianes 3+ n’est pas en site propre sur plusieurs secteurs du tracé, et se retrouve ainsi régulièrement coincées dans les bouchons…
Le juge a également considéré que le bassin de population potentiellement desservie était surévalué par l’étude d’impact : 260000 habitants en 2030, soit 100 000 de plus qu’en 2011 et 4 760 personnes supplémentaires par an, alors que, selon l’arrêté du tribunal, l’Insee n’a enregistré sur Bordeaux Métropole qu’une hausse de 1 800 habitants par an entre 2003 et 2008. Mais les magistrats n’ont pas dû lire l’analyse de l’a’urba pointant que Bordeaux Métropole a gagné 8 995 par an entre 2009 et 2014. Et ils n’ont pas pu consulter la dernière étude de l’Insee qui relève une croissance démographique particulièrement forte dans les communes concernées par le tracé du BHNS (Saint-Médard-en-Jalles, Saint-Aubin, le Hailla, Eysines, Le Taillan-Médoc).
Bordeaux Métropole s’est pourvu en cassation auprès du Conseil d’Etat. En attendant, les travaux sont suspendus.
Moins d’une personne sur deux se déplace en voiture sur la métropole bordelaise
Une enquête menée conjointement par Bordeaux Métropole et le Cerema a livré une bonne nouvelle : la part modale de la voiture dans la métropole bordelaise représente 49,6% et passe en dessous du seuil symbolique des 50%.
C’est « un chiffre historique » pour Michel Duchêne. L’ancien Vert, aujourd’hui conseiller municipal délégué auprès du maire pour la cité digitale et l’innovation dans la ville, se réjouit sur son compte Facebook :
« Ce succès récompense des décisions souvent à priori impopulaires mais dictées par la lutte contre la pollution de l’air et la santé publique. […] C’est un réel changement culturel : nos concitoyens ont su faire évoluer leurs comportements et leurs habitudes. Merci et bravo ! »
L’enquête, qui s’est déroulée en septembre et octobre derniers, révèle des chiffres étonnants notamment sur la marche à pied qui représente 29% de part modale. Le reste se distribue ainsi : 11,9% pour les transports en commun dont 11,6% pour TBM et 0,3% pour les autres réseaux de transports en commun ( TER, TransGironde etc…), 7,7% pour le vélo (avec 15% pour la seule ville de Bordeaux). Les deux-roues motorisés sont, quant à eux, autour des 0,9%. Et Les 1% restants équivalent aux autres modes, type trottinettes, rollers, skate etc…
Pour Bordeaux Métropole, ces chiffres « très positifs » corroborent le fait que la hausse de la congestion automobile est davantage liée aux déplacements des habitants de la grande agglomération qu’à ceux des habitants de Bordeaux Métropole stricto sensu et à la trop faible capacité d’absorption de la rocade. L’enjeu, pour les années à venir, consistera donc à développer une offre variée et efficace de transports en commun pour ces zones et à poursuivre la mise à 2×3 voies de la rocade.
« Il est temps qu’un Syndicat des Transports, demandé par Alain Juppé depuis 2014, réunisse Etat, Région, Département, Métropole, dans la même recherche du bien commun, de la diminution de la pollution et l’augmentation du bien-être, réclame Michel Duchêne. Ainsi, ce que les Métropolitains ont accompli, les Girondins le feront ! »
Annoncé pour mai 2018, ce syndicat fédèrera sur la base du volontariat les 28 agglomérations de la région (voir page suivante). Il aura en charge la coordination des autorités de transports (TBM pour Bordeaux Métropole, les TER et les cars TransGironde, pilotés par la région…), la mise en place d’un système d’information multimodal, ainsi qu’une billettique unique. Le syndicat permettra également la mise en place de « bassins de mobilités » qui pourront proposer des offres plus ciblées aux voyageurs.
Bordeaux Métropole tente d’accélérer sur les transports
Entre la fermeture du pont de pierre, la saturation récurrente de la rocade, l’extension des zones de bouchons notamment dans l’Aéroparc… Les questions de mobilité ont beaucoup occupé l’arène en 2017, qui s’est d’ailleurs achevée par un conseil de métropole extraordinaire, le 20 décembre dernier, consacré en grande partie à ce sujet.
« Nous avons obtenu des résultats concrets, comme la baisse de l’utilisation de voiture (voir page précédente), et l’utilisation du vélo progresse, note Alain Juppé, président de Bordeaux Métropole. Mais la rocade est sous-dimensionnée (NDLR : la métropole demande à l’Etat la possibilité de l’adosser aux autoroutes, afin de financer par les concessionnaires l’achèvement de sa mise à 2×3 voies). Et l’offre de transports en communs en zone périurbaine très faible, chose que nous avons sous estimé. »
Aussi les élus ont-ils, lors de ce conseil, créé un groupe de travail pour avancer sur plusieurs chantiers (plan de déplacement inter-administrations à Mériadeck, péage poids-lourds aux heures de pointe, taxis collectifs…). Et ils ont lancé à la Région et au Département un appel solennel pour la réalisation rapide d’un syndicat mixte des transports en commun. Cela tombe bien : un comité de pilotage doit débattre de ce projet le 8 janvier prochain.
Les maires de l’agglomération en attendent des progrès rapide, notamment sur les dessertes en TER, qui ne représentent aujourd’hui que par 50000 déplacements par jour, dont 8000 sur le Bordeaux-Arcachon. Plusieurs édiles font valoir que l’infrastructure ferroviaire est sous-exploitée. La restauration de la ligne Ambès-Bordeaux a par exemple coûté 20 millions d’euros, et, dédiée au fret, elle ne voit passer qu’un train par semaine, souligne par exemple Kevin Subrenat, le maire d’Ambès. Celui-ci plaide pour un TER qui desservirait la presqu’île – toute à fait faisable, comme l’avait démontré un train spécial affrété pour Agora –, « et capter des flux arrivant de la rive droite de la Dordogne ». Il est rejoint par les maires de Carbon-Blanc, Ambarès et Bassens, qui se plaignent du nombre insuffisant de trains entre leurs communes et Bordeaux.
La métropole demande par ailleurs officiellement la mise en place de haltes ferroviaires au Bouscat et à Talence Médoquine, afin de créer de véritables RER bordelais, imbattables en termes de rapidité par rapport à la voiture et au tramway. Et elle souhaite que le syndicat mixte mette rapidement en place des cars express dans les zones non desservies par le train, ou mal desservies par les transports en commun, comme actuellement l’Aéroparc, ses 40000 salariés, et ses près de 200000 déplacements en voitures par jour !
Dans ce secteur, et sous la pression des entreprises locales, la métropole a annoncé un plan de 220 millions sur 5 ans. En fait, ce dernier englobe des investissements déjà dans les tuyaux, comme l’extension de la ligne A du tram vers l’aéroport, le Technobus entre Pessac-Alouette et le Haillan, et 40 millions de travaux de voirie sur l’OIM (opération d’intérêt métropolitain) en 5 ans. Mais aussi 10 millions d’investissements nouveaux, qui serviront dès 2018 à améliorer la voirie (interventions sur les échangeurs de la rocade, ouverture d’un couloir bus au covoiturage, sécurisation des pistes cyclables…).
Si la majorité des élus affirme donc sa volonté d’améliorer les transports du quotidien, l’intervention de Bordeaux Métropole aux Assises de la mobilité organisées par l’Etat, met en tête de liste des projets comme le grand contournement autoroutier ou les LGV vers Toulouse et l’Espagne. Deux chantiers qui, pour peu qu’ils soient un jour financés, ne verront pas le jour d’ici 15 à 20 ans, et n’amélioreront pas forcément la mobilité des habitants, ont notamment relevé les élus communistes et écologistes. Ces derniers soulignent d’autres paradoxes de la politique locale de mobilité, comme la volonté de développer le vélo tout en supprimant la piste cyclable du pont François Mitterrand, seul franchissement de la Garonne possible au sud du centre-ville, pour la remplacer par une voie supplémentaire pour les voitures.
Déchets : le pot pourri de redevances
Un nouveau plan propreté a été adopté le 1er décembre en conseil de Bordeaux Métropole. Sa mesure phare est l’externalisation à une société privée de la collecte des déchets dans l’hyper-centre de Bordeaux (moins de 2% des secteurs de collecte). Ce choix avait suscité la réaction des élus communistes, et des préavis de grève du syndicat Sud – les autres ayant été satisfaits des propositions de reclassement des salariés de la régie en charge de ces missions.
Ce plan prévoit un effort de 6 millions d’euros par an en fonctionnement, plus 2,7 millions d’investissements, notamment pour renforcer les fréquences de passage pour nettoyer les dépôts sauvages, et mieux contrôler et sanctionner ceux-ci. L’équivalent de 59 nouveaux postes vont être créés en ce but.
Le financement reposera sur l’augmentation des recettes de taxes de séjours et d’enlèvement des ordures ménagères (récemment relevée). Sud Bordeaux Métropole s’est étonné dans un tract que le plan propreté ne dise pas un mot de la redevance spéciale, à laquelle sont assujettis les professionnels, « vu le volume de déchets qu’ils produisent ». Or cette redevance ne représente que 3,5% du montant des recettes de fonctionnement du budget déchet, soit 3,6 millions en 2016.
Pourquoi ? Parce que 82% des 20000 contrats pros souscrits sont gratuits. Selon un dispositif datant de 2001, les entreprises ne paieraient qu’au delà 360 litres de déchets non recyclables par semaine (soit 3 bacs à deux roues) et 750 litres de déchets recyclables. Et du côté de Bordeaux Métropoles, on assure que si des contrôles ont bien entrainé la révision des contrats, la fraude ne serait pas énorme.
Mais Sud fait valoir que si les 16400 contrats gratuits rapportaient aujourd’hui 250 euros par contrat, cela engendrerait une recette de plus de 4 millions d’euros par an. De quoi financer une bonne part du plan propreté sans faire reposer celui-ci sur les seuls ménages, et mieux faire valoir le principe pollueur-payeur.
En 2017, ce dernier devait enfin trouver son outil avec la redevance incitative – taxer les ménages à la quantité de déchets produite, et non plus en fonction de la valeur locative. Finalement, la mise en place de l’expérimentation dans plusieurs quartiers de la métropole va attendre un peu. Car certaines modalités du système ne sont pas encore arrêtées, et font encore l’objet de discussions : doit on facturer à la levée ou à la taille du bac ? comment faire payer les ménages vivant en collectif ? etc. De là à dire que le projet risque de partir à la poubelle…
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