Alain Juppé a annoncé ce lundi aux directeurs des 103 écoles de la ville sa décision de revenir sur les rythmes scolaires en vigueur depuis 2014, et de repasser à la semaine de 4 jours. Il va pour cela demander une dérogation au recteur, dont le résultat ne présente aucun suspense, le nouveau gouvernement ayant choisi de laisser les communes libres d’enterrer cette réforme de la précédente mandature.
Le maire de Bordeaux fonde sa décision sur « 2 ou 3 raisons » :
« C’est ce que souhaitent les parents et les enseignants que nous avons consulté. 6051 votants sur 12000 familles se sont exprimés, et 60% d’entre elles souhaitent le retour à la semaine de 4 jours. »
Certes, cette consultation internet avait fait l’objet de critiques. L’élu d’opposition Nicolas Guenro avait par exemple dénoncé en conseil municipal « un questionnaire très orienté », les parents étant notamment interrogés sur leur disposition « à participer au financement des activités pour maintenir le dispositif actuel »…
Mais le résultat est aussi validé par les votes des conseils d’école : sur les 87 qui ont transmis leurs volontés, 80% se sont prononcés pour la fin des 4,5 jours.
Et les enfants dans tout ça ?
Adjointe au maire en charge de l’éducation, Emmanuelle Cuny indique que c’est pour les parents un « choix d’organisation familiale » : « Beaucoup trouvent que les enfants sont plus fatigués depuis le passage à 4 jours », et la fin de la « pause » du mercredi. Un avis selon elle partagé par la communauté enseignante, et qu’avait relevé une enquête de la Ville sur la réforme, un an après sa mise en place.
Mais qu’en est-il des enfants ? Toutes les études sur leurs rythmes biologiques montrent que les journées (et les années) des écoliers français sont trop chargées et que le passage à 4,5 jours, à défaut de 5, permettait de concentrer les apprentissages essentiels le matin, lorsqu’ils sont le mieux disposés.
En outre, les temps d’activité périscolaires (TAP) offerts par la Ville donnent l’occasion aux jeunes Bordelais de découvrir des activités auxquelles beaucoup n’auraient jamais eu accès (cirque, escrime, ateliers radio, philo…).
« Nous n’avons peut-être pas suffisamment de recul, mais rien ne permet de dire aujourd’hui que c’est mieux pour les enfants », justifie Alain Juppé, ironisant sur le fait que l’avis des écoliers de maternelle n’avait pas été demandé : « C’est peut-être une lacune à notre consultation ».
De fait, ni au gouvernement ni à la mairie de Bordeaux, personne n’a vraiment cherché à savoir si la réforme avait du bon pour les écoliers.
Petites économies
Si le dispositif n’est pas sérieusement évalué, pourquoi faire déjà machine arrière ? Alors que les subventions de L’État cesseront en 2019, Alain Juppé jure que ce n’est pas une question de gros sous :
« La décision n’est pas principalement motivée par des raisons budgétaires. La réforme nous a coûté cher – 3,7 millions d’euros par an, dont 2,9 millions pour la ville, ce qui est un coût considérable. Mais il faudra rouvrir des centres d’accueil le mercredi matin, car 40% des parents ont l’intention d’y inscrire leurs enfants (40% déclarent que de la famille ou des proches s’occuperont ce jour-là de leurs enfants). Si bien que l’économie résiduelle devrait être un peu supérieure à un million d’euros. »
Un gain modeste par rapport au budget éducation de la Ville – 60 millions d’euros de fonctionnement par an -, et aux investissements dans les nouveaux groupes scolaires. Mais Bordeaux ne compte pas tout bazarder de cette expérience : les écoles maternelles conserveront les « coins bulles », qui permettant aux tout-petits de se reposer ou d’avoir des activités calmes pendant la pause méridienne.
La mairie devra également gérer la situation des quelques 360 animateurs des associations qui interviennent chaque jour dans le cadre des TAP, et dont une partie seulement seront aiguillés vers les centres d’animation du mercredi.
Quant au débat sur les rythmes biologiques des enfants – et de leurs parents -, dont l’amélioration pourrait passer par la réduction de la durée des grandes vacances pour tout le monde, il est renvoyé à l’échelon supérieur. Mais le ministère de l’éducation n’en fait semble-t-il pas sa priorité.
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