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La place Gambetta fera-t-elle une croix sur ses marronniers ?

Pour renouer avec l’esprit du jardin à l’anglaise planté au XIXe siècle place Gambetta, la rénovation de celle-ci, qui va bientôt démarrer, entrainera l’abattage de 23 de ses arbres. C’est moins que le projet initial, modifié à la demande d’Alain Juppé, mais encore trop pour un collectif d’écologistes, qui tente d’alerter les Bordelais. Un reportage de Vincent Marronnier.

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La place Gambetta fera-t-elle une croix sur ses marronniers  ?

La place Gambetta va-t-elle devenir une ZAD peuplée d’écoterroristes ? Ce mercredi, le collectif MAD (marronniers à défendre) a en tous cas repéré le terrain. Constitué d’une dizaine de militants dangereusement armés de pinceaux contondants et d’une peinture (non garantie sans produits toxiques), le groupuscule (comprenant aussi des enfants) a entrepris de marquer de croix blanches 23 arbres.

Il s’agit plus précisément des marronniers logeant les côtés ouest et nord du jardin, qui doivent être abattus lorsque commenceront les travaux de rénovation de la place.

« Nous ne sommes pas contre le réaménagement de Gambetta, elle en a besoin, mais on ne veut pas que ces arbres disparaissent, martèle Magali Bonniau, membre de MAD. Ces marronniers ont plus de 70 ans, c’est grâce à eux qu’on a de l’ombre et de la fraîcheur l’été. Et ils contribuent à absorber trois fois plus de CO2  que les petits arbres qui seront plantés. On est sensible à l’écologie dans cette ville, et quand on en parle aux Bordelais, ils sont mécontents. Plus de 3500 ont déjà signé notre pétition. »

Les membres du collectif Marronniers à défendre (SB/Rue89 Bordeaux)

Le collectif prétend vouloir défendre « le patrimoine vivant plutôt que le patrimoine bâti », un des arguments pour couper les marronniers étant de libérer la vue sur les immeubles XVIIIe qui entourent la place.

« On préfère un arbre à une façade, martèle Magali Bonniau. Si les gens veulent les voir, qu’ils viennent en hiver. »

« Personne n’aime abattre des arbres »

Directrice du pôle territorial de Bordeaux à la métropole, venue à Gambetta en même temps que MAD (sans doute pour leur couper l’herbe sous le pied), Claire Bedora défend le projet :

« Je comprends leur inquiétude, personne n’aime abattre des arbres. Mais nous aurons 70% d’arbres en plus au final (65, contre 38 aujourd’hui, NDLR), et la place sera plus fréquentable, avec un jardin qui ne sera plus séparé de la ville par des voies. A la quasi unanimité, le jury a retenu le projet le plus respectueux du paysage. »

Tous les paysagistes ayant planché sur la rénovation de la place, y compris les lauréats (les architectes néerlandais de West 8 et la paysagiste bordelaise Sabine Haristoy), prévoyaient pourtant de couper tous les marronniers…

« Le projet de rénovation réinterprète l’esprit du jardin historique, à l’anglaise, qu’était la place Gambetta au XIXe siècle, explique Claire Bedora. Cela nécessite de planter des arbres de manière aléatoire, et non continue, comme l’ont été les rangées de marronniers. Mais Alain Juppé a demandé à la paysagiste de reprendre sa copie et de conserver la moitié de ces arbres. »

Vue du projet de West8 (DR)

Travaux fin 2018

Le réaménagement de Gambetta, ce vieux projet, fait actuellement l’objet d’une enquête publique PSMV (plan de sauvegarde et de mise en valeur), dont l’objet est notamment de modifier une partie des alignements d’arbres situés en pourtour du jardin. Magali Bonniau voit là une fenêtre de tir possible pour faire reculer la ville. Impossible sans modifier de fond en comble le projet, répond Claire Bedora :

« Les trottoirs du côté des façades ouest et nord vont être élargis pour le confort des piétons, et ramener ainsi de l’usage sur ces parties de la place, afin que le décalage  ne soit pas trop fort avec les autres parties, une esplanade réservée aux modes doux. Les trois voies seront gardées, mais décalées vers l’est, ce qui implique d’abattre ces deux lignes de marronniers. Si on les conserve, on ne peut plus faire passer la circulation. »

L’argument d’arbres malades – ils pourraient vivre sans problème quelques décennies supplémentaires, reconnait la ville -, n’est donc pas primordial. Il s’agit d’un choix urbain, et de retour à un certain patrimoine paysager. Si la préfecture valide l’autorisation d’aménager dans ce secteur sauvegardé, une décision attendue en mai, les travaux, d’un montant de 8 millions d’euros, commenceront en novembre.


#urbanisme

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