1 – Dans les trams, le courant ne passe plus
« Étudiant à la fac de Bordeaux Montesquieu, je suis tous les jours amené à prendre le tram B pour me rendre en cours. Cependant, comme tous les étudiants et usagers de cette ligne de tram, on a tous pu vivre la situation de panne, et particulièrement entre les stations Peixotto et Saint-Nicolas. Ces problèmes surviennent très régulièrement, plus d’une fois par semaine sans aucun geste pour nous faciliter ces pannes (mises en place de navettes relais…) ».
Cette pétition lancée par Baptiste Laroche il y a quelques jours, et qui a déjà recueilli plus de 2200 signatures, demande à TBM « la résolution de ces problèmes qui empêchent [les étudiants] de pouvoir aller en cours sereinement ». Sur les forums, comme Wanted Bordeaux, la colère gronde :
« Je paye un abonnement mensuel et il y a du retard 2-3 fois par semaine, râlait ainsi Anne Marty il y a quelques semaines. Le summum : je pars à 17h30 de Bordeaux Montaigne, 2 pannes consécutives sur le même trajet au lieu d’être chez moi en 3/4 d’heure, j’ai mis 2h. (…) Quand j’arrive en retard au boulot, je dois rattraper les heures et je commence à être mal vu. On ne veut pas polluer avec des voitures, encombrer encore plus la rocade mais donnez nous des transports en commun fiable, bon sang ! »
Lors de leur conférence de presse sur les résultats de 2017 (lire ci-contre), Keolis et Bordeaux Métropole ont ce jeudi promis des améliorations à venir, grâce notamment au « renouvellement progressif des 1200 boitiers APS (alimentation par le sol) présents sur les 3 lignes ».
Sans fil
Ces remplacements sont particulièrement attendus sur la ligne B, qui dessert le campus et qui est aussi la plus fragilisée : elle a entre les stations Peixotto (à Talence) et Saint-Nicolas (près de la Victoire, à Bordeaux), la section en APS la plus importante de la métropole.
« L’idée c’est que quand un coffret tombe en panne, et il y en a un tous les 7,5 mètres, cela ne pénalise pas toute la ligne, indique Christophe Duprat, vice-président de Bordeaux Métropole en charge des transports. A l’été 2019, nous mettrons en place un aiguillage barrière Saint-Genès, qui permettra, en cas de panne sur une partie du parcours, de faire soit Peixotto – Saint-Genès, soit Saint-Nicolas Saint-Genès. »
Autre option de secours entrée elle en vigueur le 1er mars dernier : les lignes 5 et 10 des bus sont déviées pour récupérer les naufragés du tram en cas d’arrêt de ce dernier de plus de 10 minutes.
Fierté de Bordeaux, ce tram sans fil, parce qu’il a permis à la ville de limiter le nombre de câbles aériens en centre-ville, renoue actuellement avec les ratés de ses débuts. Selon le dernier rapport de Keolis, adressé récemment à la métropole et concernant l’année 2016, 359 pannes avec arrêt d’exploitation ont été recensées, dont 186 causées par le système électrique. En 2014, sur les 152 pannes, 53 avaient une origine électrique. Et depuis janvier 2018, reconnait Keolis, « le tramway a connu une situation difficile à plusieurs reprises, entrainant des coupures longues et à fort impact auprès des voyageurs, notamment sur les lignes B et C. »
Ragondins
Les incidents ont en effet généré des arrêts d’exploitation, afin d’éviter les risques d’incendie, et des doléances adressées au constructeur, Alstom, qui conçoit actuellement la nouvelle génération de tramways.
« Tout un travail vient d’être fait sur la maintenance préventive, assure Christophe Duprat. Les pièces seront changées au bout de tant d’heures de fonctionnement, on attendra pas qu’elles tombent en panne. Et les nouvelles rames vont être équipées de capteurs permettant de mesurer la fiabilité » de ces composantes.
Le maire de Saint-Aubin indique par ailleurs qu’un travail a aussi été effectué sur la ligne C, où la fibre optique est désormais protégée par des gaines à l’épreuve des rongeurs, nombreux dans les marais de Bruges.
Alors que la pétition évoquée plus haut demande un remboursement d’au moins un mois d’abonnement pour les usagers de TBM, Hervé Lefèvre, directeur général de Keolis Bordeaux Métropole, minimise l’impact de ces pannes pour les usagers :
« Quand on enlève des causes d’interruption de service les travaux programmés, les autres causes représentent 4% du temps de service, et sont la plupart du temps liées soit à des manifestations soit à des accidents. Cela veut dire que dans 96% du temps, le tramway est disponible, on est loin de cas dans lequel on serait amené à rembourser la clientèle. »
Christophe Duprat écarte aussi cette option :
« Aucune collectivité n’a remboursé des clients, surtout quand ceux-ci ont un taux de participation au financement du service d’un tiers seulement (NDLR : le prix d’un voyage est de 1,6 euros pour un coût réel de 4,8 euros, mais celui-ci est supporté par les impôts des contribuables, qui sont aussi des usagers de TBM). Et l’abonnement jeune ne fait pas partie des plus chers de France. Mais cela pose une question : le campus ne peut-il pas organiser des rentrées échelonnées, plutôt que de concentrer celles-ci le matin sur 30 minutes ? L’aménagement des temps devrait figurer dans le plan d’urgence pour les transports que la métropole présentera en avril. »
2 – Une billettique en toc ?
En 2018, la page devrait aussi se tourner pour un autre type de matériel en souffrance : les valideurs dans les bus et les trams. Alors qu’ils tombaient très souvent en panne, TBM attendait l’entrée en service de la nouvelle billettique, mais celle-ci a aujourd’hui presque deux ans de retard. Cela avait provoqué une augmentation de la fraude en 2016, que Keolis est parvenue à faire à nouveau reculer l’an dernier (à 10,7%).
Le nouveau système sans contact de TBM devrait être progressivement mis en place – cet été pour les titres oblitérables (tickartes 1 ou 10 voyages), à la fin de l’année pour les cartes d’abonnements.
La métropole espère profiter de ces retards de Thales, qui avait décroché ce marché des nouveaux matériels, pour obtenir la possibilité de valider directement avec son téléphone.
Autre conséquence positive de ce délai : les négociations entre la métropole et les associations de chômeurs ont permis de maintenir la gratuité pour les chômeurs. Lorsque la tarification solidaire sera en vigueur – probablement d’ici la fin de l’année -, les transports gratuits seront maintenus pour les usagers dont le quotient familial est inférieur à 450 euros. Et des réductions seront accordées aux usagers ainsi qu’à toute leur famille. De quoi faire passer la pilule de la nouvelle augmentation de 3% des tarifs prévue pour cet été…
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3 – Bacalan oublié ?
Un Collectif Transports Bordeaux Maritime s’est récemment constitué pour demander « des transports de qualité vers Bacalan ».
« On attend 20000 habitants à l’horizon 2025 contre 6000 en 2005, on doit être à 12000 aujourd’hui, mais les infrastructures de transports ne s’adaptent pas pour autant, relève Cédric Bayle, cofondateur de ce collectif. Lors d’un conseil de quartier, la réponse d’Alain Juppé à nos demandes avait été fort peu satisfaisante, voire discourtoise. On nous dit qu’il n’y a pas forcément les moyens d’acheter plus de rames, mais ce n’est pas cela que nous demandons. Nous voulons simplement que davantage de trams aillent jusqu’au bout des lignes pour lesquelles ils sont prévus. »
En cause : les services partiels sur cette ligne B du tramway, dont beaucoup s’arrêtent soit aux Quinconces, soit à la Cité du Vin. Seulement 1 sur 3 vont à destination des Berges de Garonne, terminus (il est vrai peu fréquenté), avec des temps d’attente allant de 10 à 20 minutes aux heures creuses.
« Et quand il y a des tramps, ils sont pleins aux heures de pointe, poursuit Cédric Bayle. Pour cause de fiabilité et de desserte insuffisante, beaucoup de gens renoncent à utiliser le tram et se rabattent sur la voiture. De mémoire de Bordelais on n’avait jamais vu d’embouteillages à Bacalan, c’est désormais le cas… »
Le collectif, qui a récolté 1500 signatures, souhaiterait que les trams aillent au moins jusqu’à Claveau, au niveau du pont d’Aquitaine. L’hypothèse est là aussi écartée pour l’instant par Christophe Duprat, le VP de Bordeaux Métropole :
« Le problème auquel nous sommes ici confrontés, c’est l’impossibilité de se retourner avant Claveau. Car jusqu’à la station Brandebourg il y a du monde, après c’est plus compliqué. Mais nous n’avons jamais menti aux gens, et toujours tenu l’engagement d’une fréquence à 10 minutes. Dans ce quartier qui se développe, c’est une vraie difficulté pour un certain nombre de personnes. Mais à Floirac ou Blanquefort, les temps d’attente sont de 15 ou 20 minutes. «
Certes, la métropole continue à investir et va réceptionner entre mai et août quatre rames supplémentaires, destinées à terme au tram D. Mais elles ne devraient pas être injectées dans l’immédiat sur la ligne B après la Cité du Vin. D’autant que de nouvelles extensions vont être ouvertes début 2019 de l’autre côté de la métropole, avec la station Pyrénées de Villenave d’Ornon.
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