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A Bordeaux, des dons pour soulager la précarité menstruelle

Femmes sans-abri ou mal logées, travailleuses précaires, étudiantes, nombreuses sont celles pour qui l’achat de protections hygiéniques est devenu un véritable problème financier. Pour leur venir en aide et lutter contre la précarité menstruelle, encore taboue en France, des associations se mobilisent au quotidien. C’est le cas à Bordeaux où la première boite de collecte de produits d’hygiène intime a été installée.

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A Bordeaux, des dons pour soulager la précarité menstruelle

En moyenne, une femme dépenserait près de 8 000€ en produits menstruels au cours de sa vie. En ajoutant les frais liés aux effets secondaires – achats d’anti-douleurs, dépenses alimentaires causées par les fringales, remplacement des sous-vêtements tachés par les fuites- la note s’élèverait à plus de 20 000€, selon une étude britannique détaillée par le Huffington Post (article en anglais).

En moyenne : 3€50 la boite de tampons, 3€ le paquet de serviettes hygiéniques et 2€ celui de protège-slips (LD/Rue89 Bordeaux)

Beaucoup de femmes en difficulté financière ne peuvent se permettre ces dépenses mensuelles. Elles se retrouvent alors contraintes de confectionner elles-même leurs protections avec du papier toilette, des mouchoirs ou des journaux. Ces méthodes inadaptées peuvent entrainer des conséquences physiques et psychologiques graves.

Face à ce constat alarmant, en 2015, Tara Heuzé-Sarmini crée Règles Elémentaires, première association française de collecte de produits d’hygiène intime pour les femmes sans-abri et mal-logées. Déjà active à Paris, Marseille, Strasbourg et Lyon, l’association a inauguré la première collecte bordelaise le 1er février 2019 au Buro des Possibles, un working café du quartier Saint-Michel, rue Planterose.

« La démarche a été spontanée, explique Marie Bidet, bénévole coordinatrice de l’antenne à Bordeaux. J’étais cliente dans ce café et en discutant avec les trois associées, elles ont tout de suite voulu mettre le projet en place. »

Briser le tabou

En fait, tout le monde peut organiser une collecte en s’inscrivant sur le site de Règles Elémentaires. Cela peut être une récolte ponctuelle, par exemple une semaine dans une entreprise, un soir lors d’un concert ou de façon pérenne dans un hôpital, un établissement scolaire ou encore une mairie. Dans le cas d’une collecte permanente ou de longue durée dans un lieu public, une boite à dons est fournie par l’association.

« C’est aussi une façon de briser le tabou de la précarité menstruelle, révèle Alexandra Maillet, une des trois co-fondatrices du Buro des Possibles. Cette grosse boite attire l’attention et les gens se demandent : comment font les femmes à la rue pour gérer ces moments là ? On ne se rend pas toujours compte de cette réalité. »

Plusieurs paquets ont déjà été déposés : tampons, protèges slips, gel anti-bactérien, lingettes, serviettes hygiéniques à usage unique. Produits neufs ou fonds de tiroirs sont admis à condition d’être dans un emballage individuel. Économiques et durables, les serviettes de protection lavables et les coupes menstruelles sont aussi acceptées, bien qu’elles ne soient pas privilégiées par les femmes sans domicile car leur entretien nécessite un accès à l’eau.

La boîte installée au Buro des Possibles ne passe pas inaperçue (LD/Rue89 Bordeaux)

Loin du compte

Les produits périodiques seront ensuite redistribués par des partenaires travaillant auprès de femmes en situation précaire comme le Samu Social, la Croix Rouge, le Secours Populaire ou dans des associations locales comme Poppy – La CASE à Bordeaux.

« On essaie de faire en sorte que les futurs redistributeurs aient une quantité de produits à la hauteur de leur besoin, explique Marine Creuzet, responsable communication pour Règles Elémentaires. Dans les foyers, la demande est importante : il y a énormément de préservatifs mis à disposition, mais en terme de protections périodiques il n’y a rien, personne n’y pense.»

Depuis quatre ans, l’association a redistribué plus de 300 000 produits menstruels auprès de plus de 20 000 femmes sur tout le territoire. Alors que les besoins annuels se chiffrent en millions, Règles Elémentaires reconnait « être encore loin du compte » :

« Il faut que les pouvoirs publics se saisissent du problème, continue Marine Creuzet. Les règles ça coûte cher pour plusieurs milliers de personnes et le tissu associatif ne peut pas tout gérer. »

Des protections remboursées

Auditionnés par le Sénat en novembre 2018, les bénévoles ont proposé des mesures à mettre en place sur le modèle d’initiatives existantes dans d’autres pays : remboursement par la sécurité sociale à hauteur d’un certain montant, mise à disposition gratuites dans certains lieux clés (foyers, hôpitaux, écoles etc.) ou encore création de bons d’achat pour financer ces produits.

Un premier pas vers les femmes en situation de précarité menstruelle a été fait par La Mutuelle Des Étudiants. Depuis le 1er avril 2018, ses affiliés ont la possibilité de se faire rembourser leurs protections hygiéniques à hauteur de 25€ par an, sur présentation d’un ticket de caisse. Les hommes peuvent aussi en faire bénéficier leur sœur, mère ou petite amie.

Collectes pérennes

Pour faire face à la demande, Règles Élémentaires espère pouvoir lancer des collectes permanentes partout en France. Grâce à une cagnotte en ligne lancée entre décembre 2018 et janvier 2019, l’association a récolté 15 000€ afin de financer 1000 boites à dons :

« L’idée serait de proposer des boites dans des lieux publics et de façon pérenne, à Paris et en province, envisage Marine Creuzet. A Marseille, des boites ont été installés dans des parking souterrains. C’est un lieu intéressant parce que c’est un endroit de passage mais aussi de refuge pour les personnes à la rue. On est au stade de l’expérimentation, mais si ça fonctionne pourquoi pas le faire dans d’autres villes. »

Concernant Bordeaux, la récolte au Buro des Possibles se tiendra jusqu’au 1er juillet 2019. D’ici là, d’autres boites à dons pourraient voir le jour dans la métropole :

« J’ai été contactée par d’autres commerçants qui ont trouvé l’initiative intéressante et qui voulaient savoir comment eux aussi pouvaient organiser une collecte ! » s’enthousiasme Alexandra Maillet.

 


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