Ce mercredi 13 février, élus et collectifs locaux de commerçants ont été reçus au ministère de l’économie. Venus de Bordeaux mais aussi de Rennes, Dijon ou encore Saint-Etienne, leurs représentants ont réclamé d’une seule voix une aide de l’État.
Les mesures prises depuis le mois de novembre – échelonnement des charges et chômage partiel pour plus de 70 000 salariés en France – ne suffisent plus aux commerçants, qui réclament une compensation de leur endettement :
« Nous demandons l’abandon des dettes sociales et fiscales, plaide Eric Malezieux, directeur de la Ronde des Quartiers. Un étalement sur trois ou vingt mois ne suffira pas, tous les commerçants courent après la trésorerie. Ils ont aussi besoin d’un soutien financier de la mairie et de la région, appuyé par l’État. »
« L’État ne nous aide pas »
Agnès Pannier-Runacher a de nouveau encouragé les commerçants touchés à entamer des démarches estimant le nombre de dossiers encore « limité ». La secrétaire d’État à l’économie a également salué « la mobilisation des collectifs locaux sur le terrain, comme à Bordeaux ».
La veille, la Ronde des Quartiers avait organisé une rencontre entre des commerçants et experts de treize organismes financiers. Parmi eux, la CCI, la Chambre des métiers de la Gironde, l’URSSAF ou encore la Banque de France recevaient les commerçants individuellement pour des conseils personnalisés.
« Tu rentres, tu discutes et tu repars, résume un commerçant lassé. Il n’y a pas de propositions, l’État ne fait rien pour nous aider. »
Dans le couloir, une dizaine de personnes font la queue devant la salle qui accueille les experts de l’URSSAF. Venus pour se renseigner sur la démarche à suivre afin d’obtenir un étalement des charges, ils espéreraient obtenir un effacement de leurs dettes :
« Je ferme la boutique par mesure de sécurité, explique Véronique Royer, gérante d’une boutique de machines à coudre, Cours Alsace Lorraine. Forcément mon chiffre d’affaire a chuté de 30% en moyenne sur les trois derniers mois. Donc là je vais demander un délais mais on aura pas le choix, il faudra payer, même si les fonds manquent. »
Microcrédit
La majorité de ces commerçants ont enregistrés une baisse de 50% de leur chiffre d’affaire au cours des trois derniers mois. Certains puisent dans leurs réserves, mais pour les derniers arrivés sur le marché, la situation est plus difficile. Installé depuis un an et demi, un commerçant indépendant de la Rue Sainte-Catherine, songe à s’endetter pour sortir de cette situation :
« Décaler le paiement de quatre mois ça ne changera rien. Je ne me verse plus de salaire, même travailler sept jours pour rattraper le chiffre d’affaire ne suffit pas. Aujourd’hui, je suis venu me renseigner sur un microcrédit. »
La CCI de la Gironde qui comptait début janvier près de soixante dossiers, recense aujourd’hui plus d’une centaine de commerçants, restaurateurs et hôteliers en difficulté. Bien qu’elle n’ait enregistré aucune fermeture d’établissement directement attribuable aux effets du mouvement des Gilets Jaunes, le mois de mars pourrait être crucial pour de nombreuses enseignes.
« C’est maintenant qu’on a besoin d’un soutien parce qu’à ce rythme là dans quelques semaines on met la clé sous la porte. Lors de sa venue à Bordeaux au début du mois, le Premier ministre nous a parlé d’aides financières. Où sont-elles ? » s’interroge Laurent Menanteau, directeur d’une agence de voyage Cours Alsace-Lorraine.
Aller chercher les clients en Espagne
Lors d’une visite auprès des commerçant bordelais, le 1er février 2019, Edouard Philippe a annoncé une aide de l’Etat de 3 millions d’euros qui sera redistribuée à des collectivités territoriales pour mener des actions collectives. Cette somme financera des animations commerciales dans une dizaines de villes touchées par les mouvements de contestation dont Bordeaux. 300 000€ devraient lui être attribués pour relancer l’activité commerciale du centre ville et attirer les clients.
« A Bordeaux, l’enjeu est de faire revenir les visiteurs sur les axes commerciaux principaux comme la Rue Sainte Catherine mais aussi d’irriguer les petites rues où il y avait des habitudes de consommation, selon Eric Malezieux. Donc l’idée serait de créer une animation attractive dans tout le centre ville mais aussi d’aller chercher des clients étrangers notamment d’Espagne. »
2 millions d’aides de la région
Ce vendredi, la région Nouvelle-Aquitaine a annoncé débloquer une enveloppe de 2 millions d’euros en faveur des commerçants et artisans touchés par les mouvements des Gilets Jaunes. Une subvention de 2 000€ à 10 000€ sera ainsi accordée aux entreprises de moins de dix salariés, éligibles en fonction de la baisse de leur chiffre d’affaires. Leur résultat d’exploitation devra être inférieur d’au moins 30% par rapport aux années précédentes. Les critères d’analyse seront plus spécifiques pour les entreprises nouvellement créées.
De son côté, la métropole envisage un fonds de soutien dont la mise en place devrait être délibérée au mois de mars :
« L’objectif serait d’avoir un fonds d’un million d’euros pour Bordeaux, auquel la métropole participerait à hauteur de 500 000€. Ce serait un soutien financier pour les commerçants en difficultés et non une indemnisation, nuance Maribel Bernard, conseillère municipale de Bordeaux déléguée aux commerces et à l’artisanat. Les règles d’attribution seront fixées sur des critères précis pour que l’aide soit traitée au cas par cas. »
En attendant, la mairie de Bordeaux a décidé d’exonérer pour deux mois, les droits de terrasse et la taxe d’occupation du domaine public, laquelle a bénéficié aux exposants de la braderie d’hiver rue Sainte Catherine. Décalé du mercredi 6 jusqu’au vendredi 8 février afin d’éviter le samedi de manifestation, l’événement a attiré de nombreux visiteurs mais n’a pas suffi à rattraper le manque à gagner.
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