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Coworking : Héméra dans l’ex-usine Marie Brizard « pour faire du jus de cerveau »

C’est un lieu iconique de Bordeaux dans lequel vient de s’installer l’accélérateur de startups Héméra : l’ancienne usine Marie Brizard rue Fondaudège. Inaugurée ce jeudi, la Halle Héméra accueillera 25 sociétés sur 1900 m2. Encore un espace de coworking ? C’est un « phénomène structurel », estime Julien Parrou-Duboscq, son co-fondateur.

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Coworking : Héméra dans l’ex-usine Marie Brizard « pour faire du jus de cerveau »

Ils voulaient un lieu unique, c’est fait. Julien Parrou‐Duboscq, Benoît Droulin, Grégory Lefort et David Ducourneau, ont inauguré La Halle Héméra dans l’ancienne usine de la célèbre anisette bordelaise, Marie Brizard.

« On ne fera plus du jus d’anis, mais ce sera du jus de cerveau, s’amuse Julien Parrou-Duboscq. Héméra, comme la déesse grecque, symbole du jour et de l’éveil. Ce sera donc un lieu où les initiatives entrepreneuriales verront le jour et l’éveil. » 

Le fondateur d’Actiplay (anciennement ConcoursMania) se réjouit de voir enfin prête, et initialement annoncée pour 2018, la halle centrale de 1900 m2 de l’ancienne usine de la rue Fondaudège (depuis 1874). Après avoir levé deux millions d’euros en 2017, l’accélérateur de startups est sur les rails dans un cadre qui veut marier travail et détente, notamment avec l’immense atrium flanqué d’un bar qui sera confié au traiteur Arom.

Dans la Halle d’Héméra sont déjà installées 25 entités, occupant pour certains des bureaux cloisonnés et pour d’autres des postes de coworking au nombre de 200.

Sous la bannière « Créé par des Entrepreneurs, pour les Entrepreneurs », Héméra sélectionne et accompagne des projets en leur apportant du mentorat d’entrepreneurs expérimentés, un large réseau de partenaires, des avantages négociés et participe aux levées de fonds aux côtés d’investisseurs. Entretien avec Julien Parrou-Duboscq.

La « révolution » coworking

Rue89 Bordeaux : La Halle Héméra est un nouveau lieu de coworking à Bordeaux. En fallait-il un de plus ?

Julien Parrou-Duboscq (© Actiplay)

Julien Parrou-Duboscq : Il existe à Bordeaux plus de quarante lieux de coworking. Sans nul doute que ces lieux vont continuer à se développer. Cette demande correspond à une révolution dans le mode d’accès au lieu de travail. Il y a 4 ou 5 ans, la surface des bureaux en France allouée au coworking était de 0,1 %. Nous sommes à 3 ou 4 % aujourd’hui. Et il est prévu dans 2 ou 3 ans que ce chiffre dépasse les 20%.

C’est un phénomène structurel. En France et dans d’autres pays, le mode de consommation et d’appréhension d’un lieu de travail a changé. On a des entreprises aujourd’hui qui ne sont plus capables de prévoir à 6 mois ou 3 ans les surfaces dont elles vont avoir besoin, aussi bien à la hausse qu’à la baisse. Le fameux bail 3/6/9 n’est plus adapté. Les entreprises ont du mal à s’engager. Le coworking, c’est avant tout de la souplesse.

Après, il y a effectivement 40 lieux de coworking à Bordeaux. Selon moi, certains sont trop petits pour arriver à une forme professionnelle. Il ne suffit pas d’ouvrir une salle avec un baby-foot dans un coin et quatre bureaux. Il faut du service et un suivi qui, pour pouvoir amortir leur coût, nécessitent une certaine taille. Il ne faut pas des lieux trop grands non plus. Il faut rester dans des dimensions humaines, avec un lieu qui a une âme et qui peut accueillir des espaces de travail mais aussi des espaces de détente pour pouvoir se rencontrer et échanger. C’est sur ces critères que la Halle Héméra trouve tout son sens.

En dehors de sa taille, qu’est-ce que Héméra a de plus que les autres ? 

Les fondateurs d’Héméra sont impliqués dans un système entrepreneurial depuis 2012 avec une première association « Bordeaux entrepreneurs ». Les entreprises étaient déjà en demande d’échanges et notre ADN, dès le départ, était que des entrepreneurs parlent à d’autres entrepreneurs. On n’était pas dans une logique d’experts, mais plutôt dans une logique de conseils entre pairs. Souvent pour parler de ses erreurs et de ses échecs, ce qui est un bon moyen de transmettre et d’aider d’autres entrepreneurs. C’est une logique sans prétention qui a eu beaucoup de succès.

La Halle Héméra (WS/Rue89 Bordeaux)

On a ensuite créé Héméra. Depuis 2017, nous avons traité plus de 300 projets. Nous avons décidé d’en accompagner quinze et nous avons investi dans cinq d’entre eux. Notre investissement ne dépasse pas les 5% du capital, l’idée étant d’encourager d’autres investisseurs à y aller et de les rassurer en prenant les mêmes risques.

Pour se développer, nous avons eu besoin d’incarner cet esprit. L’idée d’investir un lieu qui réunit ces sociétés s’est imposée. On voulait un lieu qui soit symbolique et emblématique. Marie Brizard a été une usine derrière laquelle, selon la légende, se trouve une sacrée femme d’affaires. Ce type d’espaces est souvent voué à devenir des hôtels ou des résidences. Nous on a voulu transformé le processus industriel installé en plein centre-ville en lieu d’activité contemporaine.

Nous avons ainsi respecté les éléments du lieu, gardé la verrière et mis en valeur la structure Eiffel.

Quel type d’entreprises vous allez accueillir ?

De tout ! On a déjà des sociétés venant d’univers différents. 80% d’entre elles sont issues du secteur numérique. Certaines font partie de notre accélérateur, et d’autres non. Tous nos espaces sont déjà pris, sauf peut-être quelques postes de travail dans l’atrium.

En plus d’accueillir ces postes, l’atrium permettra aussi d’y prendre un verre, d’accueillir des rencontres avec des professionnels, des événements autour de thématique entrepreneuriales avec des prises de paroles. Nos espaces et nos rencontres seront uniquement réservés aux occupants.

Dynamique d’équipe

Comment faire pour vous soumettre des projets ?

Sur notre site, hemera.camp, il y a un formulaire hyper simple qui permet de postuler et d’envoyer les éléments. On peut également venir nous voir et nous rencontrer ici. On ne veut pas que les porteurs de projets passent beaucoup de temps à remplir des dossiers interminables. Qu’ils viennent comme ils veulent : avec un vieux dossier qui a déjà servi, un powerpoint, ou même les mains dans les poches s’ils ont les arguments qu’il faut.

Ils auront un premier contact avec une personne qui va étudier l’intérêt du projet. Si c’est positif, nous avons une plateforme d’échange en ligne qui permet aux mentors de commenter les projets. Chacun va donner son avis. Selon celui-ci, une rencontre est organisée avec le porteur du projet et, si c’est bon, on déclenche le processus d’accompagnement qui sera entièrement gratuit.

Ce qui nous intéresse c’est le potentiel de développement, en France comme à l’étranger, et aussi de ressentir qu’il y a une dynamique d’équipe derrière le projet.

Qui sont les investisseurs qui soutiennent ces projets ?

Il y a beaucoup d’investisseurs aquitains. Des entrepreneurs qui ont réussi et qui veulent encourager d’autres entreprises du territoire. La dynamique est là. Il faut arrêter de croire qu’il n’y a que les grandes entreprises nationales tentaculaires qui investissent.

Aujourd’hui, on peut lever des fonds plus facilement qu’avant. C’est l’accès aux capitaux qui est compliqué. Il y a des efforts à faire sur la notion du risque. Les banques prêtent à ceux qui démarrent ou à ceux qui ont un produit abouti. Entre les deux, il y a un désert.

On a également les entreprises américaines des GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon, NDLR) qui ne payent pas leurs impôts en France et qu’on essaye de sensibiliser pour accompagner les jeunes initiatives.

Avez-vous connu des échecs dans vos investissements ou vos accompagnements ?

Oui. Ce n’est pas forcément la faute de l’entrepreneur. Parfois c’est la nôtre. Ou tout simplement ça ne matche pas.


#co-working

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