C’est (en euros) le coût de rénovation du Muséum d’histoire naturelle, pour l’essentiel à la charge de la Ville de Bordeaux qui l’exploite. L’hôtel de Lisleferme abrite le Muséum depuis 1862 dans le Jardin Public. Mais il devenait trop vétuste et exigu pour accueillir les visiteurs (accessibilité des personnes handicapées, notamment), ainsi que les collections. Un Centre de Conservation de celles-ci, opérationnel depuis 2011, a ainsi été construit à Bacalan pour conserver et restaurer le million de spécimens du Muséum.
La première pierre du chantier du nouveau Muséum a quant à elle été posée en 2015, après plusieurs péripéties dans l’élaboration du projet. Annoncée pour 2017, la réouverture n’intervient finalement que ce dimanche 31 mars, un an après un dégât des eaux causé par l’orage de grêle de mai 2018.
L’info en plus : un récupérateur de calories dans le réseau d’assainissement des eaux traversant le Jardin Public permet notamment de couvrir la totalité des besoins thermiques du bâtiment (chauffage et clim) et de réduire ainsi ses émissions de CO2 de 75%.
C’est le nombre d’espèces que les visiteurs pourront admirer dans le bâtiment du Jardin Public (sur plus d’un million que recèle la collection du Muséum). Parmi ces spécimens exposés, 977 coquillages et invertébrés, 921 oiseaux naturalisés, 373 mammifères naturalisés, 262 papillons et autres insectes.
La richesse de ses collections est notamment due à l’importance du port de Bordeaux aux XVIIIe et XIXe siècle, ses marchands, marins ou administrateurs des colonies ayant rapporté quelques trophées et souvenirs au pays.
Fanny au comptoir
Mais pas seulement : mascotte du musée depuis 1892, Miss Fanny est une éléphante d’Asie, trimballée par une ménagerie et morte sur la place des Quinconces. Elle est toujours visible dans le hall d’entrée du musée. Le rorqual commun dont le squelette de 18 mètres est suspendu dans la galerie, s’était lui échoué en 1879 sur l’île de Groix.
Le même sort est arrivé au phoque visible dans l’exposition semi-permanente sur le littoral Aquitain. La dépouille de ce mammifère marin a été retrouvée l’an dernier sur la plage du Porge. L’ours polaire a quant à lui été chassé par des Inuits, et sa présence permet d’aborder avec le visiteur le problème du réchauffement climatique. Ces deux derniers spécimens figurent parmi les 20% d’acquisitions récentes du Muséum présentées au public.
L’info en plus : Les collections du Muséum « ne pourraient plus être constituées constituées aujourd’hui, certaines espèces étant protégées ou disparues », souligne Nathalie Mémoire, directrice du Muséum. C’est le cas du thylacine – plus connu sous le nom de tigre de Tasmanie -, un marsupial d’Australie éteint depuis plus de 80 ans.
Mais la même vitrine abrite d’autres espèces plus proches de nous, et également disparues : le bouquetin et l’ours des Pyrénées.
Comme les espaces différents proposés aux visiteurs (la muséographie est l’oeuvre du groupement franco-allemand Die Werft). D’abord, et c’est une de ses nouveautés, un Musée des tout-petits, avec des jeux et du mobilier adapté, permet d’initier les moins de 6 ans à la découverte de la nature. L’exposition « Tous les bébés » leur permet de comparer les progénitures de différentes espèces.
Autre nouvel espace du Muséum, le sous-sol accueillera des expositions temporaires – trois dès l’ouverture, dont une très interactive sur le toucher, l’occasion de tripoter des silex ou de la fourrure de fouine.
Le premier étage est réservé à des expositions semi-permanentes (3 à 5 ans), avec une thématique régionale et une autre transversale. Les deux premières présentées au Muséum sont respectivement consacrées au littoral aquitain et à l’alimentation – intitulée « Mange moi si tu peux », elle présente une classification éclairante sur les différentes façons de se nourrir (de sang pour la lamproie ou les vampires, par filtration pour la moule ou la baleine…).
6e extinction massive
Mais le clou du spectacle, c’est l’exposition permanente, au rez-de-chaussée et dans la galerie du deuxième étage. Les vastes vitrines (mais aussi les tiroirs qu’il ne faut pas hésiter à ouvrir) recèlent les trésors du Muséum, présentés dans un parcours intitulé « la nature vue par les hommes ».
Des voyages et conquêtes des Européens, qui ont donné lieu aux observations naturalistes, à la surexploitation économique de la nature, principal facteur d’érosion de la biodiversité, le Muséum montre comment le regard de l’Homme a évolué sur son environnement.
Les biologistes et naturalistes ne cessent de remettre en question leurs connaissances, à l’image des classifications mouvantes des espèces (exit désormais la catégorie des nuisibles, par exemple). Sans toutefois permettre d’enrayer pour l’instant la 6e extinction massive des espèces dont l’humanité est responsable.
« On veut pousser le public à se questionner, et donner à penser la biodiversité et sa conservation, souligne Nathalie Mémoire. Il pourra picorer des informations sur les panneaux mais aussi dans l’une des 22 bornes multimédias, en ouvrant les tiroirs, ou en participant à des jeux et des questionnaires ».
Pour Fabien Robert, adjoint en charge de la culture, le Muséum « doit parler à notre âme d’enfant et à l’esprit des adultes pour protéger la faune et la flore ».
L’info en plus : « Soutenons le devoir de mémoire que représente la réouverture du muséum d’histoire naturelle de Bordeaux en demandant à nos élus de prendre les mesures qui s’imposent ». L’association Greenpeace appelle à manifester dimanche à 10h30 pour l’inauguration.
Les « militant-e-s vont déployer des stands de jeux, des animations et une banderole “Préservons ceux qui restent” », indique l’ONG dans un communiqué. Objectif : sensibiliser les visiteurs à « la conservation de 30% de nos océans en réserve marine et à la surconsommation de protéines animales en rappelant la demande de Greenpeace de mise en place de deux repas végétariens dans les cantines des écoles primaires. »
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