« Remettre au cœur du dossier la demande de protection », tonne Pierre Grenier, délégué régional Sud-Ouest de La Cimade. Venu présenter à Bordeaux le rapport d’observation de l’association « Règlement Dublin – La machine infernale de l’asile européen », le jour même de sa présentation nationale à Paris, il rappelle que « les personnes qui demandent l’asile attendent d’abord un refuge ».
Le règlement Dublin impose aux demandeurs d’asile de mener les formalités dans le premier pays d’accueil sur le territoire européen. Pour La Cimade, « le principe est simple mais son application est complexe ». Son rapport illustre « l’échec total, l’absurdité et le caractère répressif du règlement Dublin, notamment dans son application par la France ».
« On se demande si ce règlement n’est pas un système de plus pour dissuader la demande d’asile en Europe telle qu’elle est inscrite dans la convention de Genève de 1951, s’étonne le délégué régional. Comme il est difficile symboliquement de s’attaquer à cette convention historique qui a fondé les droits des réfugiés, on crée des règlements dissuasifs. »
En suivant le parcours de personnes dublinées, le rapport donne à voir les difficultés auxquelles elles sont confrontées de leur arrivée en Europe et en France jusqu’à leur expulsion ou leur accès à la procédure d’asile. Ce parcours est « une véritable course d’obstacles ».
Suppression du règlement
Outre les droits bafoués des personnes en besoin de protection, l’analyse de cette situation emmène La Cimade à considérer ce règlement comme une menace pour la solidarité européenne. Soulignant par ailleurs son manque d’efficacité puisque la balance des « transferts » de personnes entre les États est sensiblement équilibrée.
« En 2017, seulement 14% des décisions de transfert par les autorités françaises ont été mis en œuvre. Il est difficile de savoir ce qu’il en est pour le reste dont une grande partie de retrouve en errance », abonde Pierre Grenier.
Damien Junca, coordinateur de centre médico-social pour Médecins du Monde surenchérit :
« Nous avons à Bordeaux un réfugié dubliné en l’Italie qui a fait une tentative de suicide quand il a été reconduit. Il est depuis en situation de fuite et en souffrance psychique. De même que nous avons reçu une femme et ses enfants venant des Pays-Bas où elle était bien installée chez une connaissance et qui vit mal ce transfert alors qu’elle est aujourd’hui en situation de précarité. »
Dans sa conclusion, La Cimade demande à l’Union européenne et aux États membres, plus particulièrement le gouvernement français, d’en finir avec cette logique qui dissuade et exclut des personnes en quête de protection. Elle appelle les candidates et les candidats au Parlement européen à s’engager en faveur de la suppression du règlement Dublin, et à porter une politique d’asile et d’accueil ambitieuse.
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