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Saison Liberté ! : on a choisi une exposition, un concert, une pièce de théâtre, un film et un débat

C’est le défi que la rédaction s’est donné : parmi les (plus de) 300 propositions de la saison culturelle bordelaise « Liberté ! » qui commence ce jeudi, ne retenir qu’une proposition de chaque discipline.

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Saison Liberté ! : on a choisi une exposition, un concert, une pièce de théâtre, un film et un débat

La saison « Liberté ! » se déroule à Bordeaux du 20 juin au 20 août. Pour un budget de 4 millions d’euros, plus de 300 propositions sont déjà ou bientôt visibles sur la métropole bordelaise.

Pour notre part, nous avons fait un choix. Notre sélection n’écarte en rien les autres expositions, concerts ou pièce de théâtre et n’enlève rien à leur qualité. Elle s’est simplement porté sur le petit détail qui nous a interpellés, subjugués, ou tout simplement attendris. Ce qui ne nous empêche pas de relever quelques points noirs dans les colonnes de la programmation.

Page suivante, notre choix d’exposition

(© Auloffée)

1- Exposition : Auloffée, un itinéraire

36 artistes

36 artistes dans huit lieux différents. 36 artistes presque tous Bordelais ou installés dans la région bordelaise. 36 artistes et non des moindres : Maitetxu Etcheverria, Alice Raymond, Erwan Venn, Benoît Maire, Simon Rayssac… pour ne citer qu’eux.

C’est franchement une prouesse, d’autant que sept œuvres sont issues de la collection de l’Artothèque de Pessac, la collection de l’Institut Bernard Magrez et d’une collection particulière (Bost et Chambon). Avec ce pari osé et gagné, Elise Girardot confirme son statut de commissaire avec qui il faut dorénavant compter dans le milieu de l’art contemporain bordelais.

Et c’est l’admiration pour les dunes de la jeune commissaire qui donne son nom à cette série d’expositions : Auloffée, un itinéraire

« Mouvement d’un voilier venant au vent, le terme ”auloffée” évoque une traversée en mer, éprouvante ou non… Il fait référence au parcours des grains de sable qui forment les dunes du littoral néo-aquitain. Le projet d’exposition naît de notre proximité géographique avec les dunes, vastes ensembles mouvants aussi majestueux qu’énigmatiques », lit-on dans le texte de présentation.

« Un chemin vers les dunes »

Elise Girardot explique que l’exposition a été construite dans « l’idée d’une continuité et d’un chemin vers les dunes ». On peut en dire plus. Elle est aussi l’exposition qui relie différents territoires autour d’un voyage, tout ce qu’il y a de plus libre, celui d’un coup de vent dans un paysage éphémère, celui d’une côte.

La première étape a démarré à Bordeaux le 6 juin, jusqu’au 7 juillet, à l’Espace 29. Après des projections vidéos qui ont eu lieu à Metavilla du 6 au 10 juin, d’autres sont prévues du 5 au 7 juillet au Continuum. Le CAPC montre également des œuvres du 19 juin au 22 septembre.

Pessac est la deuxième étape de cet « art trip ». Ce sont le château de Camponac, la médiathèque Jacques-Ellul et la Cité Frugès Le Corbusier qui accueillent l’exposition du 13 juin au 29 septembre. La dernière brise soufflera au Petit Piquey ou des rencontres et des ateliers auront lieu à la médiathèque et un vernissage est prévu le 22 juin.

Bonus : À partir du 20 juin, 45 œuvres de la collection du musée du Louvre seront exposées au musée des Beaux-Arts de Bordeaux dans le cadre d’un partenariat unique en France. Ce partenariat de trois ans permettra une exposition à thème par an. Pour la saison « Liberté ! », Bordeaux accueille les dessins préparatoires du célèbre tableau d’Eugène Delacroix « La liberté guidant le peuple ».

Malus : On se serait bien passé, dans le contexte actuel, des expositions qui évoquent les migrants. On n’apprendra rien à personne en rappelant que leur parcours vers la liberté est semé de tortures et d’horreurs. Certains trouvent souvent la mort quand ce n’est pas le rejet des pays d’accueil qui fait défaut, notamment la France.

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Odezenne (© Edouard Nardon – Clément Pascal)

2- Concert : Odezenne

Bien de chez nous

Le 20 décembre 2018, Odezenne avait déjà mis le feu à Bordeaux. Le trio était de retour à la Salle des Fêtes du Grand Parc et comptait déjà manifester son enthousiasme par un concert survitaminé devant une salle (archi méga) comble.

Tous le public connaissait déjà les paroles des quatre albums, compris le dernier « Au Baccarra », sorti en octobre de la même année. Quelques notes à peine suffisent pour faire chanter la tracklist entière. Les Odezenne aussi avaient l’air de connaître le public, à la manière dont ils le tutoient et lui offrent tous ses tubes préférés.

« On se ferait pas un petit feu de bois là ? », inside joke rapide à saisir, annonçant la musique qui va chaleureusement égayer les fêtes de fin d’année 2018. On était en décembre hein !

Fête de la musique/Fête du Fleuve

Est-ce grâce à Odezenne – sur scène le 21 juin place des Quinconces –, que Bordeaux a été classée meilleure ville de France pour la fête de la musique 2019 ? (Si si, c’est vrai). Difficile à dire ! Même si ce classement serait basé sur la programmation, franchement boostée par la fête du Fleuve qui accueille également Arthur H (ce jeudi, 21h, avec l’Harmonie de la Ville de Bordeaux), Zazie et Jain.

Toujours est-il que la date bordelaise fait partie de cette tournée d’été qui mène le trio prodigue sur les routes françaises, de Marseille à Veyras en Suisse pour le festival Tohu-Bohu, en passant par le festival des Vieilles Charrues à Carhaix en France.

A ne pas douter que la date bordelaise va marquer les esprits, en plus sur une place des Quinconces capable d’accueillir entre 30000 et 60000 personnes, surtout quand c’est gratuit !

Bonus 1 : Le jour même, Carmina Burana sera interprétée par plus de 300 choristes amateurs de toute la Gironde, accompagnés par 170 artistes professionnels, sous la baguette de Paul Daniel de l’Opéra de Bordeaux.

Bonus 2 : L’inratable festival Relâche qui remet le couvert avec les kitchissime Nashville Pussy pour la fête de la musique place Saint-Michel et les groovyssime Left Lane Cruiser quelques jours plus tard, entre autres bien sûr.

Malus : Clairement pas assez de concerts dans le cadre de la saison « Liberté ! ».

Page suivante, notre choix de théâtre

(© Milo Rau)

3- Théâtre : La Reprise – Histoire(s) du théâtre (I)

Fait divers ou tragédie contemporaine

Ici, la liberté se paye cher. La Reprise – Histoire(s) du théâtre (I) du metteur en scène suisse-allemand, Milo Rau, est un travail collectif issu d’un fait divers d’une grande violence : le meurtre homophobe d’Ihsane Jarfi à Liège (Belgique) en 2012 par un groupe de jeunes hommes.

Dramaturge, mais également journaliste, Milo Rau trouve dans cette tragédie contemporaine une double matière : celle de rapporter les faits, et celle de confronter le théâtre au réel. En découle une série d’exercices qui interrogent les limites de la discipline : quel personnage pour la victime ? quel scénario pour le drame ? quel jeu pour la violence ? quelle frontière entre l’engagement artistique et le militantisme social ?

Changer le monde

Au TnBA (salle Vitez) le 3 et 4 juillet, la création de Milo Rau est hors programme et hors abonnement. Elle est la contribution du théâtre à la saison « Liberté ! ».

« Le théâtre de Milo Rau est politique et engagé, avance la directrice Catherine Marnas. Nous avons la chance exceptionnelle de recevoir cette création à Bordeaux après son triomphe au dernier festival d’Avignon. »

Ce spectacle tant attendu, la directrice en parle comme « une chance qu’il ne faut pas laisser passer ». Et elle a raison. Un des metteurs en scène les plus doués de sa génération est non seulement sur les planches de son théâtre, mais il donne, à travers sa vision du théâtre, une saveur toute particulière à la thématique de la saison. Le point numéro un de son grand manifeste (de Gand) en dit long :

« Il ne s’agit plus seulement de dépeindre le monde. Il s’agit de le changer. Le but n’est pas de représenter le réel, mais de rendre la représentation elle-même réelle. »

Bonus : Le 19 et 20 juin, Scènes d’Adolescent de Fédor Dostoïevski mis en scène par Sylvain Creuzevault. C’est le projet de fin d’études de la 4e promotion de l’Éstba que le metteur en scène a mené pendant huit semaines.

Malus : On aimerait ne plus voir des animaux contraints et exploités dans les spectacles.

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(© Musical Ecran)

4- Film : Ethiopiques – Revolt of the Soul

Scène Culte

Que celui qui n’a pas écouté un album Ethiopiques aille le faire tout de suite. Il y a le choix, plus d’une trentaine ! C’est conseillé pour saisir tout l’intérêt de ce film, proposé par Bordeaux Rock dans son festival estival Musical ecran, sur l’incroyable scène éthio-jazz

Rembobinons d’abord jusqu’ en 1984. A Poitiers, le producteur Francis Falceto et créateur du label Buda tombe sur Erè Mèla Mèla, un 33 tours de Mahmoud Ahmed, chanteur star en Éthiopie et chef de file de l’éthio-jazz. Un an plus tard, le français débarque à Addis-Abeba malgré la fermeture du pays sous le régime de Mengistu Hailé Mariam.

En 1997, le premier volume Éthiopiques est édité en France. Dans les cartons de Francis Falceto, il y a de quoi en faire d’autres. La soul d’Addis-Abeba envahit les dancefloors et fait déhancher toute une génération en quête de world music davantage groovy qu’ethnique. C’est le début d’une série qui fera découvrir le trésor d’une génération africaine des années 70 en quête de liberté dans un pays sous dictature.

Musique et dictature

Le mardi 2 juillet à 22h, dans la cour du Musée des Arts décoratifs et du Design à Bordeaux, le film du réalisateur polonais, Maciej Bochniak, offrira un retour bien mené sur la très riche histoire de ce mouvement en retraçant le parcours de Francis Falceto, de Poitiers jusqu’à Addis-Abeba. Avec des reconstitutions et des animations des archives, ainsi que des témoignages actuels, on retrouve la genèse et l’essor d’un courant balloté par l’histoire politique du pays.

Né au début des années 1960 dans les bars d’Addis-Abeba sur la base de la musique traditionnelle éthiopienne, azmari, l’éthio-jazz puise ses sources dans le jazz comme son nom l’indique, mais aussi la musique latine, la soul, le funk, voire la pop anglo-américaine.

Amha Records, fondée en 1969 sous l’impulsion du jeune Amha Eshete à qui le film rend un large hommage, se lance alors dans le sillage de la scène naissante et édite une centaine de 45 tours et une douzaine d’albums des plus importants chanteurs (xMahmoud Ahmed, Mulatu Astatke…). Le label connaîtra sa fin avec l’arrivée de la dictature et l’exil de nombreux éthiopiens. A Addis-Abeba, les enregistrements seront dénichés et rachetés par Buda Musique.

Bonus : Le film Sugar Man mérite aussi tout notre intérêt. Primo, il a obtenu l’Oscar du meilleur film documentaire en 2013. Secundo, il retrace la carrière atypique d’un chanteur américain d’origine mexicaine, dans les années 1970, qui a connu le succès qu’il mérite sur le tard. Deux de ses fans ont organisé pour lui une tournée en Afrique du Sud en 1998 qui a contribué à la montée du mouvement contre l’apartheid chez les blancs du pays. Le film est projeté dans le cadre du même festival, le mercredi 10 juillet à Bègles, parc du Musée Création Franche.

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(© Liberté ! – Station Ausone)

5- Débat : Libertés privées, ordre public

Dans le cadre de la saison culturelle Liberté !, Jérôme Clément, président fondateur d’Arte, a mis en place une série de cinq entretiens sur des thèmes qu’il a proposés : les libertés publiques, les femmes, et le genre, les artistes, les sciences, l’économie. Autour de chaque thème, il invite des personnalités du monde de l’entreprise, et aussi des chercheurs universitaires, des penseurs philosophes ou des artistes engagés.

Le vendredi 21 juin à 18h, Libertés privées, ordre public, réunit Justine Lacroix, professeure de théorie politique à l’Université Libre de Bruxelles, et Myriam Revault d’Allonnes, philosophe émérite à l’École pratique des hautes études et associée au CEVIPOF.

Justine Lacroix est une politiste belge qui, jeune stagiaire au bureau de la Commission européenne en 1992, découvre les tensions qui traversent les pays européens autour de la ratification du traité de Maastricht. Après un passage au cabinet de Jacques Delors, président de la Commission, elle se lance dans la recherche où la question de l’identité politique européenne occupe une place importante.

Myriam Revault d’Allonnes a travaillé sur la notion de vérité et de post-vérité. Dans un entretien, elle dénonce « la montée en puissance des réseaux sociaux [qui] facilite la prolifération d’informations non vérifiées, contradictoires et souvent ouvertement mensongères que l’on appelle les « fake news » ». Elle critique ouvertement la loi du gouvernement actuel contre ces fausses informations qu’elle considère comme « un effet d’annonce » ou « un épiphénomène eu égard aux véritables enjeux de la « post-vérité ».

Malus : On aurait aimé un débat consacré à la liberté de la presse. Du coup, Rue89 Bordeaux va vous en parler pendant quelques semaines


#Saison culturelle Liberté !

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