La polémique enflait sur les réseaux sociaux et dans le milieu animaliste. Alexander, le poney qui a chuté violemment sous les yeux des spectateurs lors d’une représentation du théâtre Zingaro, mardi soir place des Quinconces, a du être euthanasié ce mercredi.
Dans un bref message à destination des spectateurs publié mercredi, l’équipe du spectacle équestre se dit « bouleversée d’avoir perdu un de ses membres » et « désolée pour les personnes ayant assisté à l’accident ».
La scène a en effet choqué de nombreux spectateurs dont les témoignages, se mêlant à ceux de soutien sur la page facebook de l’évènement, font état d’un vent de panique. Lors de l’avant dernier tableau, le poney roux serait en effet monté sur la bordure de la scène plutôt que de rester sur la piste, avant de tomber violemment côté coulisses.
« Maltraitance »
Des spectateurs se sont dit surtout interpellés par le délai mis par l’équipe pour porter secours à l’équidé, et par le fait que le spectacle se soit poursuivi pendant plusieurs minutes.
« Nous sommes dans de la maltraitance et d’avoir participé à cela me dégoute, estime Cléo, qui a assisté à la scène. Pas un mot pour le cheval, pas une explication aux spectateurs, on continue coûte que coûte. »
A la sortie, selon un témoin de la scène, des centaines de personnes « en rage, en larmes », ont essayé en vain d’avoir des nouvelles de l’animal.
« Bravo Monsieur Bartabas qui voulait démontrer que l’homme est un bourreau pour l’animal, c’est réussi au delà de toute espérance, s’indigne Veronik, présente en famille à la représentation. Ce devait être un de nos plus beaux souvenirs. Ca restera et de loin ce que j’ai vécu de plus abominable et dégradant ».
Certains commentaires évoquent un temps nécessaire à la mise en sécurité des autres chevaux.
Appel à manifester renouvelé
Il n’en fallait pas plus pour les associations antispéciste et végan bordelaises qui dénoncent « les différentes formes d’exploitation des chevaux dans notre société ». Dans un communiqué appelant à une manifestation déjà programmée le 1er septembre, et envoyé à la presse ce mercredi, elles évoquent dans la même phrase les « fermes à sang » d’Argentine et d’Uruguay aux spectacles équestres, comme celui de Bartabas.
Mais si les premières produisent, dans des conditions sanitaires et de traitement désastreuses, une hormone prisée par l’industrie de l’élevage intensif européen afin de contrôler les cycles de reproduction des femelles gestantes et d’optimiser la rentabilité du bétail, le deuxième est connu pour sa connexion, sa relation intime, au cheval.
Contacté par téléphone, Nicolas Marty d’ACTA Bordeaux ne cache pas que leur revendications s’inscrivent dans le long terme et visent à « interdire l’exploitation des animaux en général ». Ces mouvements se mobilisent notamment contre l‘interdiction des animaux sauvages dans les cirques.
Concernant le théâtre Zingaro, tout en reconnaissant le lien particulier entretenu avec les chevaux, il déplore que ceux-ci « soient transportés dans des camions d’une ville à une autre », « gardés dans des boxs » et parle « d’aliénation ».
« Il faut faire le même travail qu’avec les animaux sauvages pour qu’on ai des chances d’aboutir à l’interdiction de l’exploitation des chevaux, dans dix ou vingt ans. »
« Événement rarissime »
Contactés par la rédaction de Rue89 Bordeaux, l’équipe de Bartabas n’a pas souhaité réagir à l’annonce de cette manifestation. Son communiqué annonçant la mort d’Alexander déplorait « un événement rarissime qui se produit pour la première fois en 35 ans au théâtre équestre Zingaro. »
Bartabas qui tout en se méfiant de certains discours animalistes, qualifie la production industrielle de viande de « plus grande catastrophe de ce siècle », restera donc silencieux. Box compris la trentaine de chevaux disposent de 1200 m2 d’espace en accès libre sur leurs périodes de repos.
Les messages choqués du public concernant la gestion de l’accident, se mêlent aux critiques du dernier tableau du spectacle mettant en scène une saillie – « scène désobligeante et choquante ». Si le choix artistique est contestable il n’est pas sans rappeler ce que Bartabas racontait il y a quelques mois, dans la présentation de son spectacle:
« Voilà presque trente ans qu’au cœur de l’Aventure Zingaro les chevaux vivent et travaillent à nos côtés. Ils sont les inspirateurs de nos créations, notre moteur de désir. À leur contact, nous avons appris à nous ensauvager pour recevoir les leçons qu’ils ont bien voulu nous enseigner et comprendre qu’ils sont une « partie mémorielle de nous-mêmes » (citant Michel Onfray – ndlr) ».
Pour Zingaro, la mémoire risque d’être marquée par l’accident de Bordeaux.
Chargement des commentaires…