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Un pédophile girondin condamné et resté en contact avec des jeunes sportifs

Le média d’investigation Disclose – dont Rue89 Bordeaux est partenaire –, frappe à nouveau. Après son enquête sur les armes françaises au Yemen, il signe une nouvelle enquête sur la pédophilie dans le milieu sportif où des dizaines d’agresseurs, souvent condamnés, sont toujours en poste. Focus sur le cas d’un entraineur girondin, condamné pour attentat à la pudeur et corruption de mineur, encensé par sa fédération, et aujourd’hui Délégué technique de la fédération internationale de handibasket.

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Un pédophile girondin condamné et resté en contact avec des jeunes sportifs

Du statut de simple bénévole dans un club de handball à Blaye, jusqu’au poste de manager de l’équipe de France d’handibasket, Jean-Marc D. a fait un parcours exceptionnel.

Pourtant, cet ancien instituteur a été condamné deux fois dans les années 1990 : une première fois pour attentat à la pudeur, et, quatre ans plus tard, pour corruption de mineur. Interpellée sur son cas à plusieurs reprises alors qu’il était toujours en contact avec des jeunes sportifs, la fédération nationale d’handisports a largement trainé des pieds.

Il faudra attendre avril 2019 et l’intervention de l’association de victimes La Parole libérée, plus connue pour ses actions médiatiques face à l’Eglise, pour que les instances du handisport réagissent. Jean-Marc D. est poussé vers la sortie de la fédération nationale mais toujours bien placé au niveau international. Il est délégué technique auprès de la fédération internationale de handibasket, l’IWBF (International Wheelchair Basketball Federation).

Avec sursis et ferme 

Nous sommes en juillet 1996. Jean-Marc D., 38 ans et dirigeant dans un club de handball, parait devant le tribunal correctionnel de Bordeaux où il lui est reproché des faits commis en 1994 et 1995 : « la corruption d’un adolescent de 14 ans qu’il a photographié nu, au gymnase de Blaye, dans la nature ou chez lui », écrivait le journal Sud Ouest. Il est reconnu coupable et condamné à six mois de prison ferme.

A ce procès, deux frères âgés de 11 et 13 ans victimes d’attouchements sexuels commis dans les années 1980 alors que l’accusé était responsable d’un camp d’éclaireurs, s’étaient constitués parties civiles. Ils ont été déboutés en raison de la prescription des faits.

Jean-Marc D. avait déjà une condamnation, datant de février 1992, de deux ans de prison avec sursis et une mise à l’épreuve de 18 mois dans une affaire d’attentat à la pudeur en 1989 et 1990. A l’époque instituteur et directeur d’école, il avait été révoqué par l’éducation nationale. 

Avec un tel passif, Jean-Marc D. n’a jamais été pour autant écarté du milieu sportif où il officiait. Mieux, il se tourne vers le handisport et devient manager de l’équipe de France A, puis de l’Equipe de France Espoirs.

En septembre 2011, il est nommé responsable administratif et manager du pôle France Jeune Handibasket de Talence, au CREPS Aquitaine. La structure venait d’ouvrir ses portes et s’affichait comme la première du genre en Europe avec 12 jeunes (10 garçons et 2 filles) de 15 à 25 ans, venant de toute la France et Dom-tom.

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Alerte ignorée

C’est une belle promotion ! Surtout que le mois précédent, en août 2011, une mère de licencié alerte la Fédération des condamnations du nouveau responsable avec, preuve à l’appui, un article de presse rendant compte de son dernier procès à Bordeaux et de ses deux condamnations. Une alerte restée sans réponse.

Daphné Gastaldi et Mathieu Martiniere, les deux journalistes de We Report, travaillant pour le compte de Disclose, ont consulté les deux jugements où il apparaît que Jean-Marc D. a fait au moins quatre victimes de moins de 15 ans.

A l’intervention de l’association La Parole libérée, en avril dernier, la présidente de la Fédération, Guislaine Westelynck, qui dit avoir pris ses fonctions en 2018, jure que le bulletin n°2 du casier judiciaire de Jean-Marc D. a été vérifié et qu’il est vierge. Aux journalistes de Disclose, elle déclare :

« Dans une période de collaboration antérieure [à sa prise de fonction, NDLR], il a fait l’objet d’un signalement oral, entraînant des mesures proportionnées de vigilance notre part. Sachant qu’il était question d’un “rappel à la loi”, une vérification de son casier judiciaire a été effectuée à la demande du Bureau exécutif de la précédente mandature, [il] s’est avéré être vierge, déclare la présidente. Ensuite durant toute cette période, nous n’avons pas eu le moindre signalement concernant son attitude et son intervention, essentiellement administrative au sein de notre pôle de Talence ou auprès de la commission basket. »

« Papa ou grand frère »

Mais l’intervention de La Parole libérée a payé. La directrice ajoute que « de nouveaux éléments portés à notre connaissance par une association en juin dernier, sur des faits passés et déjà jugés, nous ont amenés en accord avec l’intéressé, à mettre un terme immédiat à son contrat de prestataire de services ».

« Monsieur D. a été condamné et a purgé sa peine. Nous ne pouvons donc rompre unilatéralement la collaboration au motif d’actes qu’il serait susceptible de commettre », répond Guislaine Westelynck en juin 2019 par mail à La Parole libérée :

« Nous lui avons rappelé lors d’une rencontre […] que, même s’il n’en avait aucune obligation, nous regrettions que la confiance soit rompue et qu’il ait persisté à vouloir travailler dans une activité proche de celle pour laquelle il avait été condamné. »

Jean-Marc D. est lâché par sa fédération et les articles à sa gloire sont retirés du site handisport.org. On n’y lira plus ses capacités à « endosser le rôle de papa ou de grand frère de substitution » auprès des jeunes pratiquants de handisport, ou encore l’éloge de son « oreille attentive et œil bienveillant ». Sur le site de l’IWBF, où il garde sa fonction de délégué technique international, il n’y a pour l’instant rien de tout ça.

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Photo : WS/Rue89 Bordeaux

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