La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), feuille de route pour l’industrie énergétique française, dévoilée récemment, prévoit la fermeture de deux des quatre réacteurs de la centrale nucléaire du Blayais, à Braud-et-Saint-Louis (Gironde).
Cette annonce, « sous réserve de sa confirmation par le quinquennat suivant puisque elle ne devrait intervenir qu’en 2026, est un premier pas qui devrait inciter le gouvernement et EDF à s’engager réellement dans la voie de la transition énergétique », se réjouissent ce mardi sept associations environnementales membres de la Commission locale d’information nucléaire du Blayais (CLIN).
« Flou », « gâchis »
Mais celles-ci, dont Greenpeace et la Sepanso, dénoncent aussi le « flou artistique entretenu sur les réacteurs concernés et le calendrier » :
« Annoncer la fermeture 3 ans seulement avant comme proposé dans la PPE ne permet absolument pas d’anticiper sereinement la fermeture des réacteurs, la reconversion socio-économique du territoire et des travailleurs concernés qui ont légitimement le droit d’obtenir des engagements précis et fiables. »
1 300 salariés et 700 sous-traitants travaillent en permanence à la centrale, dont les prestataires emploient 1 200 à 2 500 personnes lors des arrêts de tranche.
« C’est un vrai gâchis industriel et financier auquel nous sommes opposés par principe car il va fragiliser le réseau électrique », a réagi le 21 janvier dernier John Gazziero, de la CGT, interrogé par Sud Ouest.
Ces fermetures doivent permettre d’atteindre l’objectif de la Loi Energie Climat fixant la part du nucléaire à 50% du mix électrique à l’horizon 2035. Cela impliquera la fermeture de 16 réacteurs nucléaires de 900 mégawatts (le plus anciens), dont les deux de Fessenheim, à partir de 2025.
Un milliard pour des prunes ?
Pour éviter la fermeture de centrales entières autre que l’usine alsacienne, EDF a « proposé au gouvernement d’étudier la mise à l’arrêt de paires de réacteurs sur les sites de Blayais, Bugey, Chinon, Cruas, Dampierre, Gravelines et Tricastin ».
Pour les ONG, ce premier pas, conditionné à la fermeture préalable des centrales à charbon « est loin d’être suffisant ». Il « devra être suivi par une dizaine d’autres pour atteindre effectivement en 2035 l’objectif de 50% d’électricité d’origine nucléaire, sachant que « la part de l’énergie provenant de sources renouvelables dans la consommation finale d’énergie brute a atteint en 2018 16,6% en France contre 18% dans l’Union européenne ».
Les associations s’interrogent aussi sur la « gestion incohérente de ce dossier » :
« EDF se trouve devant un mur financier qui sous le terme de “grand carénage” vise à prolonger une filière dont tout le monde sait que ses jours sont comptés aussi bien sur le plan industriel que sur le plan économique pour ne pas évoquer les problèmes de sûreté. »
La centrale du Blayais a ainsi prévu un milliard d’euros d’investissement pour renforcer la sécurité de ses réacteurs dans les années à venir. Il s’agit notamment de les doter de récupérateurs de corium, ce magma généré par la fusion des cœurs lors d’accidents majeurs, et qui peut provoquer une explosion cataclysmique en cas de contact avec la nappe phréatique.
Un autre défi de taille attend la France : celui du démantèlement des réacteurs. La facture du chantier en cours à Brennilis, en Bretagne, a doublé, pour flirter avec les 500 millions d’euros. Alors que cette centrale a fermé en 1985, sa déconstruction ne s’achèvera pas avant 2039.
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