A quelques heures du dépôt des listes ce lundi, toute la gauche est parvenue à s’entendre pour défier Patrick Pujol, maire de Villenave d’Ornon depuis 1995, mis pour la première fois en ballotage. Il sera opposé à Stéphanie Anfray, à la tête d’une coalition allant de la France insoumise au Parti socialiste, en passant par les écologistes.
« Pour la première fois depuis 25 ans, la gauche se présentera unie pour gagner Villenave d’Ornon dans un duel inédit. C’est une chance historique alors que la gauche est à moins de 500 voix » de Patrick Pujol, soulignent dans un communiqué les nouveaux alliés.
Dans la cinquième ville de la métropole bordelaise (34000 habitants), le maire-candidat (divers droite) a raté d’un souffle une réélection dès le premier tour (48,37%), devançant largement la liste « Villenave écologique, solidaire et citoyenne » (PS, PC, EELV…) menée par Stéphanie Anfray (31,45%).
Bâtir la « ville d’après »
Mais le contexte sera différent le 28 juin. D’abord, la conseillère municipale socialiste, formatrice et responsable pour la Gironde d’une association de parents d’élèves, est parvenue à un accord avec Patrick Bouillot. L’éphémère (de 1994 à 1005) maire PS de Villenave, conduisait la liste citoyenne « Changer ! », soutenue par la France insoumise, qui a réalisé 11,23% des voix le 15 mars dernier.
Le réservoir de voix est toutefois insuffisant en l’état, et l’enjeu pour les challengers de Patrick Pujol sera de convaincre les nombreux électeurs qui ont évité les urnes (35% de participation) au premier tour à cause de l’épidémie de Covid-19. Dans une ville qui vote plutôt à gauche aux élections nationales, les rivaux du maire comptent adresser aux habitants « dans les prochaines semaines des propositions actualisées » pour « bâtir la « ville d’après » le Covid-19.
Non sans tirer des leçons de la période de confinement. Ainsi, la gauche locale, hostile au transfert de l’hôpital militaire Robert-Picqué à Bagatelle, entend « défendre la constitution d’un « pôle de santé public » sur le site de Robert-Picqué en complément du projet développé sur le site de Bagatelle pour répondre aux besoins de santé de la population ». Et donc de contester le projet de fusion en cours dans le sud de la métropole.
Elle veut aussi « instaurer des contre-pouvoirs démocratiques (référendum d’initiative citoyenne, droit d’initiative, budget participatif…) pour que le maire ne puisse plus d’autorité, sans aucune concertation, décider de mesures aussi privatives de libertés que le couvre-feu (rappelons que seule Villenave d’Ornon l’a adopté sur la métropole pendant l’état d’urgence sanitaire, contre l’avis de la préfète) ».
La liste d’union promet en outre de « maîtriser l’urbanisme, dont la conception anarchique actuelle aboutit à la dégradation du cadre de vie des Villenavais.e.s ».
Duel à Saint-Médard
L’urbanisme sera-t-il aussi un juge de paix à Saint-Médard-en-Jalles – 30000 habitants, 6° commune de la métropole ? Face au maire sortant Jacques Mangon (centre droit), par ailleurs vice-président de la métropole bordelaise en charge de l’urbanisme, ses trois adversaires contestaient des projets immobilier, dont la presqu’île du centre, ou encore les contours du tramway. Mais l’un de ces candidats, Stéphane Bessière (ex LREM, 17,13% au premier tour) a finalement rallié le maire sortant (37,98%), qu’il qualifiait pourtant d’ »homme du passé ».
En deuxième position, Stéphane Delpeyrat-Vincent (Génération.s) avait rassemblé derrière lui une large alliance, de la France insoumise aux écologistes, avec une moitié de la liste estampillée société civile. En vue du 28 juin, le directeur de cabinet de la maire PS du Haillan, a quant à lui trouvé un accord avec la liste participative Saint-Médard demain, conduite par Cécile Marenzoni.
Avec respectivement 27,93% et 16,94% au soir du 15 mars, l’alliance va devoir s’employer pour renverser Jacques Mangon. Mais celui-ci est loin de bénéficier d’une addition mécanique des voix de Stéphane Bessière, dont une vingtaine de colistiers se sont désolidarisés, dénonçant un coup de poignard dans le dos de la part de leur tête de liste : ils ont fait toute leur campagne en opposition au maire sortant, et étaient même sur le point de faire alliance avec Stéphane Delpeyrat et Cécile Marenzoni ! S’ils ne peuvent figurer sur la liste de gauche, nombre d’ex colistiers de Stéphane Bessière vont rejoindre son comité de soutien…
Pessac, « swinging city » ?
Le match s’annonce aussi tendu à Pessac. Dès le lendemain du premier tour, les deux candidats de gauche, le socialiste Sébastien Saint-Pasteur (conseiller départemental, spécialiste des questions de handicap) et l’écologiste Laure Curval avaient annoncé leur alliance. Ce mardi, ils ont confirmé avoir déposé officiellement la nouvelle liste en préfecture.
« Menée par Sébastien Saint-Pasteur, l’union se positionne en ballotage favorable, réunissant près de 48 % (26.31 % + 21.37 %) des voix exprimées au premier tour contre 45.41 % pour la majorité Droite-LREM sortante », ont-ils indiqué dans un communiqué. « La France Insoumise n’a pas souhaité continuer son engagement dans cette nouvelle union », précisent-il.
Troisième ville de la métropole (61332 habitants), Pessac est après Bordeaux et Mérignac, celle qui envoie le plus de conseillers à la métropole (respectivement 36, 10 et 8). Aussi, en 2014, la victoire de Franck Raynal (divers droite) contre le successeur d’Alain Rousset, et dans le bastion de ce dernier, conjuguée à celle de Jacques Mangon face aux socialistes à Saint-Médard, avaient permis à la droite de ravir la majorité à la métropole.
Ces deux villes joueront-elles à nouveau le rôle de « swinging cities » ? En 2020, sans le leadership d’Alain Juppé, et dans les circonstances actuelles de crise sanitaire, sociale et économique, l’issue du scrutin parait bien incertaine. Bien malin qui pourrait affirmer que l’épidémie confirmera la prime aux sortants, ou favorisera au contraire les alternatives plus sociales et écologistes.
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