Personnels hospitaliers et principaux syndicats ont à nouveau manifesté ce mardi partout en France. La mobilisation était moins importante que deux semaines auparavant, mais ils étaient environ 200 à Bordeaux pour dénoncer la réponse jugée insuffisante de l’État suite à l’annonce du Ministre de la Santé, Olivier Véran : le déblocage d’une enveloppe de 6,3 milliards d’euros pour les hôpitaux et EPHAD.
Cette somme est censée permettre la revalorisation des salaires des catégories soignantes et médico-techniques et « refonder » le système de soins, mission initiale que s’était octroyée le « Ségur de la santé » lancé le 25 mai sous l’égide de l’ex-dirigeante de la CFDT, Nicole Notat, et se clôturant ce vendredi.
« 6 milliards d’euros à se partager entre les hôpitaux publics, les Ehpad et une partie des hôpitaux privés, alors que si l’on calcule il faudrait déjà 12 milliards rien que pour le public ! », fait remarquer Farid Azzoug, syndicaliste hospitalier à la CGT Gironde.
« On ne veut pas l’aumône »
Une autre syndicaliste CGT, salariée à la clinique Bordeaux-Nord, s’insurge des « petites miettes » distribuées par le gouvernement pour calmer les esprits alors qu’ils demandent une refonte systémique de l’hôpital :
« On ne demande pas une prime, on ne veut pas l’aumône tout ça parce qu’il y a un virus un peu plus costaud que d’habitude ! Ce qu’on veut c’est la revalorisation de nos salaires. Et puis, le Ségur de la santé c’est que du blabla. Et cette enveloppe de 6 milliards, c’est grâce à la mobilisation du personnel de santé qu’on l’a obtenue, pas grâce au Ségur ! De toutes façons le gouvernement nous méprise. On était soit disant des héros, maintenant ils nous crachent à la gueule avec leurs 6 milliards. »
Les principaux syndicats (CGT, LO, SUD) requièrent la revalorisation des salaires de tous les personnels hospitaliers de 300 euros net (soignantes et soignants, agents des services hospitaliers, agents d’entretiens, ouvrières et ouvriers…), ainsi que la titularisation des contractuels, davantage d’embauches, l’arrêt de la fermeture de lit – 220 lits supprimés à Pellegrin sur les dix dernières années –, et l’abandon du projet de fusion de l’hôpital militaire Robert-Picqué avec l’établissement de santé privé Bagatelle.
« A l’hôpital public, les CDD se multiplient et les prétendants titulaires peuvent y travailler entre 5 et 7 ans avant d’être stagiairisés », l’étape avant la titularisation, détaille Farid Azzoug. Pour ce qui est de l’hôpital Robert-Picqué, il a prouvé pendant la crise son utilité et sa nécessité pour la population en cas de crise sanitaire. »
« Pas de médocs, pas d’hosto »
Certaines catégories de soignants se sentent particulièrement oubliées des négociations, comme les préparatrices et préparateurs en pharmacie hospitalière, qui réclament la reconnaissance de leurs études à BAC+3 et non plus BAC+2, et la revalorisation de leur statut dans la fonction publique hospitalière, avec un passage de catégorie B à catégorie A.
« Nous préparons des chimiothérapies, des essais cliniques, nous manipulons des produits toxiques et dangereux, raconte une préparatrice hospitalière sous couvert de l’anonymat. Avant l’épidémie, le réapprovisionnement des armoires sécurisées en réanimation nous a été confié afin de décharger un peu les infirmières. Pendant le Covid, ça a été une grosse charge de travail en plus et des préparatrices sont parfois venues sur leurs jours de repos pour réapprovisionner et éviter une pénurie ! En plus de ça, on a globalement été moins protégés alors qu’on a été chargés de nouvelles missions pendant cette crise. Par exemple, l’activité dans les blocs opératoires a diminué mais on a compensé en fabriquant des masques nous-mêmes. »
« On est peu connus et reconnus alors que nous constituons un acteur majeur de la chaîne : sans pharmacie, pas de soins possibles ! » rappelle le collectif.
La réanimation cardiaque de Haut-Levêque en grève
Depuis ce lundi, les personnels de réanimation chirurgicale cardiaque sont également entrés en grève après des négociations avortées avec leur direction. Celle-ci refuse la rétroactivité de la prime de pénibilité pour 2019 et 2020 suite à un changement de DRH (directeur des ressources humaines).
Ces personnels ultra-qualifiés gérant des chirurgies cardiaques lourdes et évoluant en même temps que la technicité des machines déplorent l’absence de reconnaissance, les sous-effectifs et le matériel qui se détériore.
« Des locaux vétustes, des box de réanimation avec des portes cassées, des lits vieillissants qui tombent très régulièrement en panne, des poches de dialyses de 10 kilos qu’il faut lever à bout de bras, etc. », telle est la description que dresse Fabrice Boissimon, brancardier et secrétaire adjoint à la CGT Haut-Levêque. Des équipements qu’on a du mal à associer à ce service de pointe sur le plan technique.
Ils demandent le remplacement de ce matériel défectueux, de meilleurs salaires plutôt que des primes « distribuées arbitrairement et qui mettent les employés en compétition », ainsi que 8 nouveaux postes d’aides soignantes, 10 d’infirmières et le remplacement de toutes les personnes en arrêt maladie. Sans coopération de la direction, la grève sera reconduite jusqu’à fin juillet. Ce mercredi, les grévistes manifesteront au rond point de l’hôpital Haut-Lévêque à 12h30.
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