« Je ne connais pas d’intérêt supérieur à celui de la santé de nos concitoyens », démarre ce vendredi Fabienne Buccio, un peu stressée. Car la préfète de la Gironde sait qu’elle doit convaincre de l’intérêt de ces nouvelles règles « restrictives et contraignantes », selon ses termes, alors que les derniers signaux ne paraissent pas alarmants.
Ainsi, l’ARS (agence régionale de la santé) Nouvelle-Aquitaine constate « un léger ralentissement de la progression de l’épidémie » en Gironde, d’après sa directrice par intérim, Hélène Junqua. Le taux d’incidence « tend à se réduire » – il est passé en une semaine de 144,7 à 139,8 en Gironde. Ce taux frôle les 210 dans la métropole bordelaise et les 245 à Bordeaux.
« Il y a une toute petite baisse, mais il faut se garder d’interpréter ça comme un plateau, affirme Hélène Junqua. Le virus continue à circuler, et le taux de positivé est de 8% (8 cas positifs pour 100 personnes testées), et même de 11,9% à Bordeaux, très supérieur au taux d’alerte de 5%. »
Surtout, chez les Girondins de plus de 65 ans, le taux d’incidence (cas de Covid-19 positifs pour 100000 personnes) est ainsi passé de 93 à 120. « C’est ce qui nous préoccupe le plus », affirme ce vendredi Hélène Junqua, directrice par intérim de l’ARS Nouvelle-Aquitaine.
« Moment de bascule »
Au cours des quatre dernières semaines, le taux d’incidence chez les plus de 75 ans a été multiplié par 10 et le taux de positivité par 9 en Nouvelle-Aquitaine. L’ARS redoute donc une explosion des hospitalisations, alors que 60% des patients hospitalisés pour Covid au 22 septembre ont 70 ans ou plus.
Pour l’heure, celles-ci sont relativement stables : 174 personnes sont actuellement hospitalisées en Gironde, contre 176 il y a une semaine. En revanche, le nombre de patients en réanimation a lui augmenté, passant de 28 à 34 (dont 25 au CHU de Bordeaux), et la région a enregistré en une semaine 18 décès supplémentaires à l’hôpital.
« La situation est fragile et nous sommes à un moment de bascule », explique Fabienne Buccio, qui entend enrayer les contaminations. « Le taux d’incidence chez les personnes âgées approche le chiffre justifiant une alerte maximale. »
Soit la situation de Marseille et de la Guadeloupe… S’il n’est pour l’heure pas question de fermer totalement les bars, la préfecture de la Gironde entend « agir fortement », et compléter l’arsenal déployé il y a une semaine.
14 fermetures de bars
A partir de lundi, donc, tous les bars de la métropole bordelaise seront fermés à 22h. Les restaurants faisant également bar ne seront plus autorisés à servir les clients.
« Les bars sont fréquentés par un public plutôt jeune, les 15-30 ans, qui sont les plus touchés par la maladie, rappelle Hélène Junqua. Or c’est de la promiscuité qui peut exister dans les bars et du non respect des gestes barrières que naissent les contaminations. »
La préfète a tenté de rassurer la profession, sans toutefois proposer, comme dans d’autres régions, de dispositif de compensation autre que ceux déjà en vigueur (chômage partiel, fonds d’aide aux entreprises).
« Les cafetiers et gérants de bars ont été dans leur immense majorité exemplaire, et nous avons ensemble combattu et fermé les établissements qui ne jouaient pas le jeu (14 fermetures prononcées à ce jour, NDLR). Ces mesures ne sont pas punitives mais préventives. Dans 15 jours elles seront soit levées, soit renouvelées, voire renforcées. »
Toutes les autres mesures, applicables dès ce samedi 26 septembre, concerneront l’ensemble du département de la Gironde. Pourquoi ce régime à deux vitesses, alors que le taux d’incidence est moins fort hors de la métropole ? Réponse de la préfète :
« Les bars sont concentrés sur Bordeaux et la métropole. Et si on ferme les salles polyvalentes et sportives à Bordeaux Métropole, on va créer un déport des mariages ou des fêtes d’anniversaire sur le reste du territoire. »
Effet plouf
Toutes les salles de sport de la Gironde seront donc fermées, excepté pour l’usage scolaire et périscolaire. Contrairement à ce que la préfète avait initialement annoncé ce jeudi aux élus, les piscines couvertes seront également closes.
« Ce sont aussi des salles de sport, même si ce sont des sports aquatiques, et pour plus de clarté et de sécurité, il nous a semblé bon de les inclure dans cette catégorie », justifie Fabienne Buccio.
Les salles des fêtes et polyvalentes seront interdites pour des usages festifs ou associatifs. Les rassemblements de plus de 10 personnes dans l’espace public seront interdits, de même que les brocantes et les vide-greniers, les marchés à vocation non alimentaire, les manifestations sportives et festives sur la voie publique ainsi que les fêtes locales et étudiantes.
Les écoles, elles, resteront plus que jamais ouvertes puisque selon l’académie de Bordeaux, le nombre de classes fermées pour cause d’élèves malades (240 pour 300000 élèves en Gironde), passera de 14 actuellement à 8 lundi. Dans toute l’académie, 43 personnels sur 51258 ont été infectés, selon les chiffres du rectorat.
« C’est à l’école et en entreprise qu’on est le plus en sécurité », résume Fabienne Buccio.
Le travail, c’est la santé, voilà donc le programme qui nous est proposé.
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