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Confinement : les petits commerçants ne restent pas les bras croisés

Retrait de livres ou de vêtements à la porte ou au guichet, drives, livraison de fleurs à vélo, menus gastro à cuire chez soi, conseils téléphoniques… au premier jour du reconfinement, les commerçants bordelais se sont déjà adaptés pour servir coûte que coûte leur clientèle malgré les restrictions.

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Confinement : les petits commerçants ne restent pas les bras croisés

Ils s’appellent Le Passeur, Le Shop, La Lainerie, L’Eau Chaude, Pause K… Qu’ils soient libraires, fleuristes, restaurateurs, gérants de friperie, de boutique de DIY ou de décoration, ces commerces jugés « non essentiels » ont dû s’adapter pour survivre à l’ère de ce second confinement. 

« On réagit »

Et pour se réinventer malgré les contraintes imposées par la crise sanitaire, les commerçants ne manquent ni d’idées, ni de moyens : retrait à la porte ou au guichet du magasin (« click & collect ») ; livraison d’articles ou de repas à trottinette ou à vélo, à Bordeaux et proches environs ; envois par La Poste en dernier recours pour limiter les frais des clients…

Depuis 2015, Melody Lefondeur est la gérante de la friperie vintage Platine, rue Bouquière. Pour elle, maintenir un semblant d’activité est une question de survie :

« On ne va pas faire comme le premier confinement et attendre lentement la mort, donc on réagit ! Chaque jour, je propose des articles en story de mes réseaux sociaux. Mes abonnés et clients peuvent ensuite les réserver par message privé pour venir les récupérer sous 24 heures. Ma boutique, c’est plus qu’un magasin, c’est une communauté. C’est une manière de rester vivant. »

A terme, elle envisage aussi de livrer à vélo après s’être assurée du périmètre qu’elle peut parcourir au titre de commerçante.

La Machine à Lire carbure au conseil (WS/Rue89 Bordeaux)

Hélène des Ligneris, elle, propose aussi le retrait en magasin et depuis peu la livraison à bicyclette. Mais c’est un autre service que la dirigeante de la librairie de la place du Parlement, La Machine à Lire, tient à mettre en avant : le conseil par téléphone.

« Que viennent chercher les gens chez nous ? Des livres, certes, mais surtout un conseil, un regard, des mots, des silences… C’est pour ça que nous avons décidé de maintenir notre effectif de libraires en boutique pour assurer le conseil téléphonique. Notre volonté principale est de permettre à nos fidèles lecteurs d’accéder à leurs livres, de remplir notre rôle de libraires, de passeurs. »

Rendre service, rester actif, et bien sûr, entretenir le lien, parfois fragile, qui rattache les consommateurs à leurs commerces de quartier. 

« On est là ! »

Comme pour Pierre et David, qui ont ouvert La Boutique Olfactive en juillet 2019. Si le duo à l’origine de cette parfumerie éco-responsable et atelier boutique d’art végétal ne s’est pas encore constitué de clientèle d’habitués suffisamment solide pour appréhender la suite avec un minimum de sérénité, la volonté y est : 

« Juste avant le reconfinement, on avait entrepris de refaire notre site internet, qui est aujourd’hui un site vitrine, pour en faire en partie un site de e-commerce et de réservation. Manque de chance, nous avons pris beaucoup de retard, mais on essaie de s’organiser autrement. »

Ils peuvent pour cela compter sur l’entraide et la solidarité qui règnent entre les commerçants de la rue Bouffard, regroupés en association. 

« On voulait mettre en place un site de vente mais en tant qu’association, juridiquement, c’est un peu compliqué. Isabelle de la boutique de décoration Nicoletta se renseigne, mais en attendant, on va essayer de mettre quelque chose en place avec les deux seuls commerces de la rue autorisés à ouvrir (Le Tisanier d’Oc et le showroom de peintures Sorain&Styles). »

La vitrine de La boutique olfactive devient virtuelle (DR)

« En attendant », les deux acolytes soignent leur communication digitale sur les réseaux sociaux. Leur préoccupation n°1 ? Montrer qu’ils sont là, disponibles. Et même s’ils ont dû repousser leur projet d’une collection de bougies pour les fêtes, David veut rester positif :

« On pourra encore tenir 3, peut-être 4 mois, à ce rythme là, c’est à dire avec des rentrées quasi nulles et le loyer et les charges mensuelles à payer. Mais on garde à tout prix le moral et la positive attitude ! »

C’est le même moteur qui porte Elise et Amandine, fleuristes de la toute jeune boutique bastidienne Folles Avoines, inaugurée en avril 2018. Incapables de prédire leur avenir financier face à l’incertitude lors du premier confinement, elles avaient alors choisi de proposer la livraison gratuite à leurs clients, quitte à y laisser des plumes, comme le confesse Amandine :

« A l’époque, on voulait surtout rappeler à nos clients qu’on était là à nous battre. Aujourd’hui, c’est différent parce que les conséquences économiques sont tellement graves pour nous qu’on cherche en plus à limiter la casse et que la moindre vente est vitale. »

En plus des livraisons gratuites, elles ont donc lancé un e-shop pour leur permettre de continuer à vendre leurs compositions de plantes séchées et bouquets de fleurs fraiches, mais le manque de visibilité les inquiète autant que leur trésorerie qui s’amenuise jour après jour.

« On l’avait anticipé »

Certains commerçants, plus observateurs – ou pessimistes – que leurs confrères, avaient senti le vent d’un possible reconfinement tourner dès la rentrée. C’est le cas de Sylvain Renzetti, chef du restaurant Son’, situé rue Paul-Louis-Lande, qui explique avoir été alerté dès le mois de septembre par une fréquentation en berne malgré la très bonne réputation du jeune établissement. Qu’à cela ne tienne : le 15 octobre, après 5 semaines de préparation intense, il lançait sa box gastronomique :

« On en a d’abord lancé 17 qui sont toutes parties alors qu’on n’était pas encore reconfiné. Du coup, on préfère voir venir et en relancer 50 nouvelles pour pouvoir répondre à la demande. Des micro-pousses au poisson mariné : tout est fait sur place, il ne vous reste plus qu’à cuire ou à réchauffer et à dresser ! »

Plébiscités par les hédonistes de tous profils, ces repas gastronomiques ne nécessitant qu’une poêle ou un micro-ondes présentent l’énorme avantage de nous décharger des contraintes techniques de la haute cuisine (lavage, épluchage, éminçage, assaisonnement…) et se conservent 3 jours au frais. Sylvain a même créé une chaîne YouTube pour expliquer la marche à suivre dans de courtes vidéos – drôles, pour ne rien gâcher ! – accompagnant les box renouvelées tous les 15 jours. Le prix ?

« Comptez 56 € pour 2 personnes (soit 28 € par personne) pour une box qui comprend 4 services, de l’entrée au dessert, en tous points identiques au menu à 45 € qu’on sert habituellement le soir au restaurant : c’est un peu la version à emporter de luxe énervé ! »

Envie soudaine de se lancer dans le stand-up culinaire ? Pas du tout !

« Entre les livraisons et mes salariés qui sont encore tous en activité, je ne marge absolument pas sur ce service. Je l’ai surtout fait par rapport à mes fournisseurs, mon producteur de micro-pousses notamment, qui a planté et qui doit récolter quoiqu’il arrive, histoire qu’il ne se retrouve pas avec des centaines de barquettes dont il ne pourrait rien faire. »

Soutenir vos commerces de proximité plutôt que les géants du net ou les mastodontes de la grande distribution ? Petit rappel : pensez à votre attestation !


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