Je m’appelle Maria Luisa Macellaro la Franca. Je suis Sicilienne. Je suis arrivée en France le 26 juillet 2006 avec 3000 euros dans ma poche et l’espoir d’une nouvelle vie. La France, berceau du romantisme et pays de culture, m’a donné ma chance artistique.
Je suis Cheffe d’orchestre, pianiste et compositrice.
Ces trois dernières années, je les ai passées en tournée. J’ai visité pratiquement tous les pays du monde. Et depuis six mois, ma vie s’est arrêtée. Mon travail est tout simplement ma vie !
Être musicien c’est une vocation. C’est beaucoup d’heures sur un instrument pour préparer les concerts, seule, sacrifiant une vie sociale. Sans ça, on ne peut pas faire ce métier.
On condamne à mort la vie
Jamais je n’aurais pensé un jour me retrouver sur les escaliers devant le Grand Théâtre pour interpeller le public contre l’indifférence grandissante envers tous les acteurs de notre patrimoine culturel.
Ce lundi 5 octobre sera gravé à jamais dans ma mémoire. Sous un ciel gris et triste, on a participé aux funérailles de nos métiers, en silence. Un silence chargé de douleur funeste. Nous étions habillés en noir, la couleur du deuil, le deuil de l’espoir.
Un monde sans les couleurs de la culture ressemble à quoi ? Pouvez-vous imaginer une France sans George Sand, sans Frédéric Chopin ou Eugène Delacroix ?
Maintenant, imaginez vous possible une vie sans le nourriture de l’esprit ? Sans théâtre ? Sans expositions ? C’est bien de ça dont il s’agit actuellement, avec la totale indifférence du public. Dans le monde de la culture, on condamne à mort la vie tout simplement.
Aider le public
Depuis six mois, jour après jour, je vois plonger l’humanité dans un gris existentiel que je peine à comprendre. Je pense que le public n’as pas saisi la gravité de la crise culturelle causée par la Covid-19, ni ses répercussions sur l’économie française.
Il faut aider et encourager le public à retourner dans les salles de spectacles. Les théâtres ont adopté un protocole sanitaire assez strict et il n’y a aucun danger à assister à une exposition, une pièce de théâtre, ou un concert. Le vrai danger est celui de voir fermer une salle, un théâtre, un musée ou une association culturelle. C’est ce qui est en train de se produire déjà dans mon pays d’origine, l’Italie, avec les lourdes conséquences pour toute l’économie italienne.
Notre peine, encore une fois, est l’indifférence dans laquelle nous sommes condamnés à mort. Les ensembles indépendants se trouvent dans une urgence totale à Bordeaux. Beaucoup d’associations culturelles ferment leurs portes car elles vivent des concerts ou des événements. Déserter les salles, c’est guillotiner les acteurs culturels. C’est laisser aux enfants un monde sans les couleurs de la vie.
« Tout ce qui dégrade la culture, raccourcit les chemins qui mènent à la servitude. » Cette citation est d’Albert Camus, une citation profonde et actuelle qui représente bien la situation vers laquelle on se dirige.
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