Des milliers de personnes au départ place de la Bourse, 20000 à l’arrivée selon les organisateurs : la Marche des libertés, troisième rassemblement bordelais contre la loi Sécurité globale, a été un succès.
Des syndicats – dont la totalité des organisations syndicales de journalistes, le Club de la presse de Bordeaux, des associations, l’ensemble des partis politiques de gauche étaient représentés, ainsi que plusieurs maires de la métropole, notamment celui de Bordeaux, Pierre Hurmic. Et bon nombre d’anonyme, dont Stacey, 30 ans, a fait 60 kilomètres depuis le nord Gironde pour y prendre part :
« Je le fais pour que nos enfants vivent librement, sans contrainte, et qu’ils puissent respirer. Tout sera permis sans limite pour les forces de l’ordre, y compris de nous filmer par drone, mais pas pour nous. Moi j’ai été victime d’un délit de faciès par des policiers, raconte cette jeune métisse, conductrice poids lourds, actuellement mère au foyer. Ils voulaient m’arrêter soi disant parce que je téléphonais au volant alors que mon portable n’avait plus de batterie. Ils m’ont poussé à bout et m’ont traité de menteuse pendant 20 minutes. Je suis arrivée à garder mon sang-froid, mais si cela avait mal tourné, j’aurais bien aimé que quelqu’un filme la scène. »
Ce droit de capter puis de diffuser des images de policiers ou de gendarmes est au cœur de la lutte contre la loi Sécurité globale, adoptée en première lecture. Les orateurs qui se sont exprimés place de la Bourse ont réclamé la suppression de cet article 24 et des autres les plus contestés de ce texte, qui généralise notamment la surveillance par drone.
Politique d’intimidation
Ils ont aussi réclamé le retrait du nouveau schéma national de maintien de l’ordre, à l’instar de Pierre-Antoine Cazau, de la Ligue de droits de l’Homme, qui place de la Bourse a parlé au nom des 40 organisations ayant appelé à manifester :
« Ces dispositifs visent à empêcher les journalistes et les observateurs de rendre compte de ce qui se passe en manif. Or c’est grâce à ce travail que l’on a pu recenser les 4 décès, 344 blessures à la tête, 29 éborgné-e-s, 5 mains arrachées et près de 2 448 blessés intervenus lors du mouvement des Gilets jaunes. »
Ce sont aussi leurs images qui ont permis de lancer des enquêtes de l’IGPN et que celles-ci aboutissent à des mises en examen de policiers, notamment celui auteur du tir de LBD qui, à Bordeaux, avait plongé dans le coma le pompier volontaire Olivier Beziade. La LDH demande d’ailleurs la destitution du préfet de Paris Lallement, en poste à Bordeaux à cette époque, et « inspirateur de cette politique d’intimidation » visible aujourd’hui en région parisienne.
Malgré la gravité du sujet, la manifestation de la Bourse à Pey-Berland s’est déroulée dans une ambiance bon enfant, avec des gens visiblement heureux de sortir du confinement et de se retrouver autour d’une action collective. Dans le cortège, constitué de beaucoup de jeunes, de familles et de personnes âgées, des pancartes dénoncent le « floutage de gueule » et « Vichy 2.0 ». Des banderoles « Je suis Michel » rendent hommage au producteur de musique victime d’une agression raciste par des policiers, certains chantent « on veut des caresses pas des CRS ».
Des heurts après la manif
Vers 16h30 la foule a commencé à se disperser devant la mairie, fin de l’itinéraire déclaré en préfecture. Mais une partie a entamé une manif sauvage, taguant des devantures de boutiques rouverte ce samedi, et cassant les vitrines d’au moins trois d’entre elles rue Sainte Catherine, le MacDo, les Galeries Lafayette et l’Apple Store. La police est intervenue avec des tirs de grenades lacrymogène, et a repoussé les manifestants jusqu’à la place de la Victoire.
Dans un communiqué, Pierre Hurmic a « condamné fermement les dégradations provoquées par des groupuscules organisés » sur des vitrines et du mobilier urbain, et renouveler son « soutien aux commerçants victimes de ces casseurs ». Il a appelé à ne pas confondre ces « actes acharnés » avec « la manifestation pacifique citoyenne qui s’est déroulée sans heurts ».
Un nouveau rendez-vous est d’ores et déjà donné contre les lois liberticides le vendredi 4 décembre, à 18h place de la Victoire.
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