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Première couche pour la nouvelle couleur de la politique culturelle à Bordeaux

Pour la deuxième couche, il faudra attendre septembre 2021, date de la restitution de « la feuille de route culturelle » qui sera issue du Forum de la création et des expressions culturelles. En attendant, en plus de la méthode pour y parvenir, Pierre Hurmic et son adjoint à la création et aux expressions culturelles, Dimitri Boutleux, ont livré leur vision et leurs premières propositions, plombées surtout par la crise sanitaire.

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Première couche pour la nouvelle couleur de la politique culturelle à Bordeaux

Une pluie de citations ! Voici comment Pierre Hurmic a voulu endosser le costume d’ « un maire de Bordeaux qui se mouille pour la culture » – métaphore qu’il a initialement employée en référence à son arrivée à vélo par un temps pluvieux.

De Victor Hugo (et son poème « A qui la faute ? » écrit à la suite de l’incendie de la bibliothèque des Tuileries lors de la Commune de Paris en 1871) à François Mauriac (dont la citation « Il ne sert de rien à l’homme de gagner la lune s’il vient à perdre la Terre », est affichée à la bibliothèque de Mériadeck où se tenait le point presse), le maire de Bordeaux s’est voulu érudit pour la présentation de la politique culturelle municipale à la sauce verte.

Et comme quand il y en a plus, il y en a encore, il a pris à son compte un extrait du discours de l’écrivain Amin Maalouf prononcé lors de sa venue à Bordeaux en mai 2014 pour la remise du grand prix Ardua :

« La culture n’est pas un luxe qu’on peut seulement se permettre dans les périodes fastes. Elle a pour fonction de poser les questions essentielles : Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? Que cherchons-nous à bâtir ? Quelle société ? Quelle civilisation ? Et sur la base de quelles valeurs ? Comment utiliser les moyens gigantesques que nous offre la science ? Comment en faire des instruments de liberté plutôt que de servitude ? Ce rôle de la culture est encore plus crucial en des époques d’égarement. Et notre époque est une époque d’égarement. »

Culture sous crise

Ainsi la transition est faite. Après avoir souligné le « désarroi » des Bordelais après une « longue période de confinement et des difficultés économiques », Pierre Hurmic mise sur une « culture [qui] sert à dissiper la mauvaise humeur ». On comprend alors que la crise sanitaire va guider les premiers pas de la majorité dans ce domaine.

Incontestablement, celle-ci sera le fil d’Ariane des quatre thématiques abordées : la crise sanitaire et la relance, le Forum de la création et des expressions culturelles, la saison culturelle 2021, et la réouverture des salles et établissements culturels. Seuls sujets abordés puisque le nom du directeur (ou de la directrice) général.e des affaires culturelles de la mairie n’a pas été dévoilé.

Il sera donc question d’ « une crise qui oblige à être solidaire » comme le souligne le maire écolo, rappelant qu’un tiers des actifs travaillant dans les secteurs culturels sont indépendants, contre seulement 12 % dans la population active (chiffre des statistiques de la culture et de la communication publié en novembre 2020). Faisant un parallèle avec le secteur économique sinistré par la crise, il annonce la création d’une plateforme, une sorte de « guichet unique » qui sera lancé mi-décembre :

« Nous souhaitons optimiser l’accès aux systèmes existants », reprend Dimitri Boutleux, l’adjoint au maire chargé de la création et des expressions culturelles. La plateforme agrégera, en plus des aides de la mairie (dont certaines sont désormais directement accessibles aux artistes-auteurs), des « informations juridiques et économiques, des annonces gouvernementales, des dispositifs d’aides, mais aussi un accompagnement personnalisé ».

Avec la souhait de « dépasser le périmètre purement bordelais » précise Pierre Hurmic, cette plateforme (sans nom pour l’instant) sera mise en place en partenariat avec la Région, le Département et l’Etat.

Pierre Hurmic et Dimitri Boutleux (WS/Rue89 Bordeaux)

Garder la ligne

« Pour garder le lien avec les Bordelaises et Bordelais et préparer la relance », cette plateforme accueillera également des propositions pluridisciplinaires. De la Salle des Fêtes du Grand Parc, « qui s’est transformée en studio de résidence et de captation vidéo », une série de concerts seront mis en ligne, ainsi que des spectacles de l’Opéra national de Bordeaux initialement prévus en novembre et enregistrés à huit clos.

Une série de 40 « capsules » sonores sera également en ligne pour « partager avec les habitants des histoires, des paroles et des sons, pour s’échapper quelques instants de son lieu de confinement grâce à la puissance évocatrice du son et de l’imagination » précise Dimitri Boutleux.

Sur cette plateforme, on retrouvera également le service BibEnClic pour réserver et retirer des documents des dix bibliothèques municipales. Les musées auront également leur onglet pour des visites virtuelles et aussi des activités éducatives à l’attention des classes : ateliers, mallettes pédagogiques…

Si toutes ces propositions, nées spontanément de la contrainte de la crise sanitaire, trouvent une adresse commune officielle, reste à savoir si le retour à une situation normale (bibliothèques déjà ouvertes depuis le 1er décembre, ouverture des musées et des salles de spectacle prévue le 15 décembre) permettra la pérennité et la pertinence d’une telle entreprise.

« Renouveau culturel »

La Saison culturelle 2021 est maintenue et attend son nouveau nom définitif. « Levier de relance pour le territoire et laboratoire d’expérimentation urbaine », elle intègrera particulièrement la rive droite et plus d’espaces publics.

Si une partie du programme est toujours d’actualité avec un budget de 1,7 million d’euros, 90% des dépenses artistiques seront « fléchées vers les opérateurs et artistes du territoire » qui sont invités à proposer des projets sur le site de mairie jusqu’au 10 janvier. La saison, qui tente elle aussi d’ « anticiper les contraintes de la crise », verra sa programmation bouclée en février. 

Pour répondre enfin aux 800 acteurs culturels « qui ont réclamé la remise à plat de la politique culturelle » dans une tribune publiée par Rue89 Bordeaux au printemps dernier, Pierre Hurmic promet un « renouveau ».

« Nous avons lancé depuis septembre des concertations pour élaborer ensemble cette politique culturelle. C’est une illustration d’une nouvelle méthode pour aboutir à une offre culturelle qualifiée d’élitiste par le passé. »

Place alors aux détails attendus sur le Forum de la création et des expressions culturelles. Celui-ci associera « des acteurs culturels, amateurs, et professionnels, mais également le grand public ». Il aura plusieurs formes et plusieurs temps. De décembre 2020 à avril 2021, des entretiens et des consultations, notamment dans les huit quartiers de la ville, viendront compléter le travail d’une (autre) plateforme participative, censée disposer entre autres d’une boîte à idées.

Après la présentation des premières orientations stratégiques en avril, une restitution donnera en septembre à la politique culturelle de Bordeaux sa deuxième (et dernière ?) couche verte.


#Culture

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