16h ce samedi 12 juin, rue du Pas-Saint-Georges en face de la place Fernand-Lafargue, Violette s’assoie au milieu de la chaussée avec deux pancartes en « sandwich ». On peut y lire :
« Je suis terrifiée par les catastrophes que connaîtront mes petits-enfants à cause de la crise climatique. »
Agée de 68 ans, cette grand-mère bordelaise est décidée à bloquer la circulation et, pour mener son action, elle s’est rapprochée d’Extinction Rebellion qui organisait ce jour une action nationale coordonnée où « 45 personnes [dont 4 à Bordeaux, NDLR] se sont assises, seules, en bloquant des routes partout en France pour exprimer leur peur pour l’avenir si aucune mesure n’est prise pour répondre à la catastrophe écologique en cours » précise une communication.
« Elle a raison mais… »
Premier véhicule bloqué, son conducteur s’emporte : « Dégagez, j’en rien à foutre de votre truc. » Devant le calme et la détermination de Violette, il appelle la police et attend. Celle-ci ne viendra jamais.
« Elle a raison, c’est une bonne cause, concède-t-il quelques minutes après. Je suis juste en train de déménager, je dois faire l’état des lieux et rendre les clefs. Je suis contrarié que ça me tombe dessus. »
« Elle a raison mais… » est sur les lèvres de nombreux occupants des véhicules à l’arrêt sous un soleil de plomb, une vingtaine au plus fort de l’action.
« Qu’est-ce que 20 minutes d’emmerdements devant les graves problèmes qu’attendent nos enfants et petits-enfants ? Et cet avenir affreux qu’on leur laisse ? » rétorque calmement l’activiste.
Sur un petit tract qu’elle tend aux passants, on peut lire :
« J’ai essayé de mener une vie sobre, milité chez les Verts, participé à des nombreuses manifestations, lu des tas de livres, essais, articles, assisté à des réunions… […] Je vois bien que l’inertie est trop forte, que les résistances aux actions indispensables pour empêcher la catastrophe sont habiles et puissantes. […] Je ne veux pas baisser les bras… »
Mamie fait de la résistance
Et c’est effectivement ce qu’elle ne fera pas alors que les klaxons retentissent d’agacement au bout d’une vingtaine de minutes. Certains tentent de la convaincre, en vain. D’autres s’emportent : « faites ça devant chez vous », « j’ai jamais vu ça », « mais elle est folle ! »…
Imperturbable, elle ne flanche pas et gagne son bras de fer quand les voitures, une demi-heure plus tard, entament une marche arrière et parviennent tant bien que mal à quitter le quartier. « Vous croyez que j’ai réussi ? » demandera-t-elle.
« Je suis déjà contente d’avoir pu tenir aussi longtemps. Je suis contente des marques de sympathie de certains. Il y en a un qui m’a dit “merci pour mon fils”. J’étais enseignante vous savez, et je fais ça pour mes élèves et pour tous les enfants. Je suis pourtant quelqu’un de calme et discret, je n’aime pas déranger. Mais qu’est ce que je peux faire pour qu’on prenne conscience de l’urgence ? Je ne vais pas mettre des bombes ! »
Sous les applaudissements de quelques badauds, elle se lève, replie ses pancartes et ramasse ses tracts. Violette quitte discrètement la rue après avoir tout rangé dans un sac où elle a également glissé ses « médicaments pour la nuit emportés en cas de garde à vue ».
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