« Nous rentrons dans l’opérationnel et c’est bien, attaque Alain Rousset ce vendredi. Reste à boucler le plan de financement sur lequel on a encore des inquiétudes et des impasses. »
Le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine fait notamment référence aux collectivités qui ont refusé de mettre au pot commun pour GPSO, comme les départements du Lot-et-Garonne et de la Gironde, ou ne souhaitent pas payer autant que demandé, à l’instar du département des Pyrénées-Atlantique, sollicité à hauteur de 305 millions d’euros. D’autres, comme les agglomérations d’Agen ou de Mont-de-Marsan, doivent encore se prononcer.
Il manquerait ainsi 150 millions d’euros du côté des collectivités néo-aquitaines pour financer les lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, sur un devis total de 14,3 milliards d’euros (dont plus de 8 milliards pour la première). Or le Premier ministre Jean Castex les a sommés de fixer leur engagement financier avant la fin 2021, sous peine de laisser passer le train d’un soutien financier de l’Etat à la veille de la présidentielle.
« J’en appelle à la solidarité et à la responsabilité avec un peu de gravité, a donc lancé ce vendredi le président de la Région. Imaginons que nous n’ayons pas de financement bouclé tout sera fait entre Toulouse et Montpellier et jamais je ne prendrai cette responsabilité. »
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1,14 milliard d’euros de la Région
Alain Rousset va donc soumettre ce lundi 13 décembre en séance plénière un plan de financement de 1,14 milliard d’euros à GPSO. Selon les informations communiquées lors d’un point presse – la délibération présentée lundi n’était alors pas encore finalisée –, la collectivité s’engagera sur 710 millions d’euros d’aides directes.
Les 400 millions restants doivent provenir de nouvelles ressources fiscales, levée par le futur établissement public local (EPL) en charge de réaliser l’infrastructure, qui doit être prochainement créé par une ordonnance du gouvernement, et auquel la Région va adhérer par la même délibération présentée lundi.
L’apport de ces impôts est une autre inconnue, déjà dénoncée par le maire de Bordeaux Pierre Hurmic lors des débats sur GPSO en conseil de métropole : si la taxe spéciale sur les équipements (TSE) a bien été récemment adoptée par le parlement, devrait s’appliquer dans toutes les communes sur les tracés des LGV et rapporter 24 millions d’euros par an (près d’un milliard sur 40 ans), il n’en est pas de même pour la taxe sur les bureaux. Celle-ci sera votée dans le cadre du projet de loi de finances 2023, c’est-à-dire par la prochaine majorité, à condition qu’elle veuille encore des LGV.
Taxe bureaux des pleurs
Or dans le cadre du financement du Grand Paris Express, cette taxe sur les bureaux rapporte quatre fois le montant de la TSE. Dans le cadre de GPSO, elle pourrait permettre de lever 1 à 2 milliards d’euros, estime Marc Péré, maire de l’Union, dont le groupe Alternative pour une Métropole Citoyenne s’opposera le 16 décembre au plan de financement présenté par Toulouse Métropole.
« Les diners en ville du Medef ont porté leurs fruits », estime Marc Péré, mettant ainsi en cause le lobbying des entreprises pour faire enterrer selon lui définitivement ce nouveau prélèvement.
« Le monde économique de la région soutient le projet et c’est assez juste à partir du moment où la LGV peut valoriser leurs biens, affirme au contraire Alain Rousset. Il n’y pas de raison que cette taxe sur les bureaux ne soit pas mise en place, c’est tout à fait classique dans le financement du ferroviaire. »
R(é)assurer
Reste que selon le président de la Région, « tout est remis en cause sans cette fiscalité ». Elle est en effet censée représenter 30% du montant mis par les collectivités, qui financent elles-même 40% de la première phase de GPSO (LGV Bordeaux-Toulouse et aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse), l’Etat mettant 4 milliards d’euros, soit 40% de cette phase.
« On aurait préféré que ce soit 60% », note Alain Rousset, qui essaie d’obtenir de Jean Castex que l’Etat soit réassureur en cas de défaillance de l’un ou l’autre des contributeurs financiers.
D’autant que l’aide de l’Union européenne, qui doit apporter les 20% restants, reste à ce stade elle aussi hypothétique. Elle pourrait en outre ne concerner que la ligne Bordeaux-Dax, car elle est sur une trajectoire transfrontalière contrairement à Bordeaux-Toulouse. Ce n’est que fin 2022, lors de la conclusion des débats sur le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), que les promoteurs de GPSO sauront si celui-ci en fera partie.
Avec des si
« Cela fait beaucoup de si », fait remarquer un confrère à Alain Rousset. « Oui mais pour initier un projet historique en moins de trois mois, on a considérablement avancé. » Au prix toutefois de quelques contorsions : le fléchage des 160 millions d’euros de la Gironde vers le RER Girondin va pousser la Région à « un jeu de dominos budgétaires ».
« Nous rajouterons 170 millions au financement des aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux, qui viendront en déduction de notre part sur le RER », selon le président de la Région, tout en se défendant de léser ainsi les trains du quotidien.
Les débats à l’hôtel de Région lundi se dérouleront en tous cas sous les auspices d’un rassemblement des anti-LGV prévu à 9h30 sur l’esplanade, bien décidés à mettre la pression sur leurs élus.
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