« Et un, et deux, et cinq ans de plus ! » Cris de joie et gros soulagement ce dimanche soir dans un bar du centre de Bordeaux, où se retrouvaient les cadres et une trentaine de militants de La République en marche (LREM). Emmanuel Macron est avec près de 28% en tête du premier tour, donné devant Marine Le Pen (23%) par les premiers sondages sortis des urnes.
Mais le score élevé de la candidate d’extrême-droite, talonnée par Jean-Luc Mélenchon, tout comme le peu de réserves de voix disponibles, ne pousse pas les partisans du président de la République à s’emballer.
« C’est un très bon score de premier tour, estime Thomas Cazenave, chef de file LREM au conseil municipal de Bordeaux. On aura avec Marine Le Pen une confrontation de projet, nous avons 15 jours pour expliquer le nôtre et rappeler que le sien est un projet de repli, de scission avec l’Europe, un projet dangereux. »
Main tendue
Pour Aziz Skalli, référent du parti macroniste en Gironde, « le vote Mélenchon appelle à une réflexion sur les questions écologiques et sociales », anticipant ainsi le discours du chef de l’État. Peu après, Emmanuel Macron reprendra une nouvelle fois à son compte la planification écologique défendue par la France insoumise (le nucléaire en plus), saluera « la clarté » de ses opposants ayant appelé à faire barrage à l’extrême-droite, et affirmera vouloir leur « tendre la main ».
« Emmanuel Macron aura du mal à réaliser le rassemblement s’il ne se met pas à parler enfin d’écologie, de climat, de démocratie et de social », abonde Pierre Hurmic.
Tout comme le président du département de la Gironde ou de la Région Nouvelle-Aquitaine, les socialistes Jean-Luc Gleyze et Alain Rousset, le maire de Bordeaux votera au deuxième tour sans sourciller pour le président sortant. Mais il prévient :
« S’il veut avoir les électeurs écologistes pour faire rempart, il doit aborder l’environnement, 3e sujet de préoccupation des Français auquel a été seulement consacré 4% du temps des débats. Nous avons à peine 3 ans pour arrêter nos émissions de gaz à effet de serre, c’est un enjeu de survie de l’humanité, peut-on continuer à faire campagne sans en parler ? »
Un vote villes et campagnes
Ces sujets n’ont pas permis au candidat écologiste de percer. Yannick Jadot, qui réalise 4,7% au niveau national, fait deux fois mieux à Bordeaux – 8,17%. Mais il pâtit du vote utile, qui a joué à plein en faveur de Jean-Luc Mélenchon. Le candidat de l’Union populaire réalise son meilleur score à Bordeaux en trois tentative à la présidentielle – 29% (contre 23,40% en 2017), juste derrière Emmanuel Macron (33,51%).
Le candidat-président est même derrière le député insoumis dans 3 des 5 cantons bordelais, dont les populaires quartiers nord et sud, et à la Bastide (lire notre reportage par ailleurs). Dans la métropole bordelaise, Jean-Luc Mélenchon est en tête sur la rive droite (Bassens, Lormont, Cenon, Floirac), mais aussi à Bègles et Talence. Il est devancé par Emmanuel Macron dans la plupart des autres communes de Bordeaux Métropole, sauf dans la presqu’île (Ambès, Saint-Louis et Ambarès), où Marine Le Pen a viré devant ses rivaux.
Alors que celles-ci sont pour beaucoup dirigées par des maires socialistes ou Les Républicains (LR), les représentantes de ces deux partis s’écroulent. Anne Hidalgo fait par exemple 3,15% à Mérignac, 2e ville de la Gironde tenue par Alain Anziani, président (PS) de Bordeaux Métropole. Valérie Pécresse réalise 5,81% à Bordeaux, pourtant aux mains de sa famille politique pendant 75 ans…
Les électeurs LR se sont tournés vers Emmanuel Macron ou Eric Zemmour (environ 7% à Bordeaux, et peut-être vers Marine Le Pen, qui ne progresse que légèrement à Bordeaux (8,52% contre 7,39% en 2017). D’ailleurs, contrairement aux marcheurs, aux insoumis et aux écologistes, le Rassemblement national n’avait pas prévu de soirée ouverte aux militants et à la presse ce dimanche soir dans la capitale girondine.
Mais la candidate du Rassemblement national avance fortement ses pions partout ailleurs en Gironde : elle est en tête dans de nombreuses communes, notamment dans le Médoc, le nord et le sud du département, obtenant 21,4% des voix, juste derrière Jean-Luc Mélenchon (21,8%) et Emmanuel Macron (28,7%).
Un bis repetita amplifié pour le vote d’extrême droite dans la banane de la pauvreté, théâtre depuis 2017 du mouvement des Gilets jaunes.
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