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Qui sont les Girondins qui espéraient « l’électrochoc » Marine Le Pen

Rencontrés devant les bureaux de vote, certains ont voté Jean-Luc Mélenchon au premier tour, d’autres Valérie Pécresse, et Marine Le Pen au second tour. De nombreux jeunes ont moins tergiversé et ont donné leurs voix aux deux tours, souvent pour leur tout premier vote, à Marine Le Pen.

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Qui sont les Girondins qui espéraient « l’électrochoc » Marine Le Pen

« Bien sûr que j’ai fait barrage, mais à votre avis, à qui ? » Denis, 60 ans et au chômage, n’en démord pas : « il faut absolument arrêter Marcon. » Après avoir voté Jean-Luc Mélenchon au premier tour, il a voté Marine Le Pen « pour la première fois ».

« Il faut arrêter avec le folklore démocratique, la politique se joue ailleurs. C’est pas gagné. Mais pour faire avancer les combats des classes populaires, il faut se battre avec tous les moyens possibles. Le bilan de Macron est catastrophique et Marine Le Pen n’est pas plus dangereuse. »

« Des fâchés mais pas des fachos »

Devant le bureau de vote de l’école maternelle du Point du Jour à Bacalan, où la candidate du RN a réalisé ses meilleurs scores à Bordeaux au premier tour, passer de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen ne surprend pas grand monde. Pas même Maire-Pierre Rejasse, déléguée insoumise du quartier :

« Je les excuse. Ce sont des fâchés mais pas des fachos. Le rendez-vous est maintenant donné pour le 3e tour et peu importe qui de l’éborgneur [NDLR : allusion aux militants Gilets jaunes énucléés par des tirs policiers] ou de la fille du borgne sera élu. »

Le communiste Vincent Maurin, maire-adjoint du quartier Bordeaux maritime, a peu goûté ces explications mais il concède.

« C’est un électorat en colère qui va s’exprimer premièrement sur des urgences sociales et qui, deuxièmement, va laisser paraître une forme de relégation. […] Cela ne veut pas dire qu’il y a un survote Rassemblement national ici, mais qu’une partie de ceux qui ne retrouvent pas leur candidat au second tour expriment un vote de ras-le-bol. »

Le second tour des élections présidentielles Photo : WS/Rue89 Bordeaux

Aux Aubiers, pour Philippe, 50 ans et employé par une société de transport, « c’est la classe moyenne qui en a ras-le-bol ». Après Valérie Pécresse, sa voix du second tour va tout naturellement à Marine Le Pen « pour la première fois ».

« Je veux miser sur une valeur sûre qui défend l’idée que l’argent va pour celui qui travaille. Il faut arrêter de prendre aux uns et donner aux autres. Tout le monde doit contribuer. On multiplie les aides et les gens ne participent plus. On va vers une société où il va y avoir moins d’actifs que d’assistés. »

Changement

Pour ce néo-bordelais, « les médias diabolisent Le Pen et donne à Macron un air plus propre ». Il espère, si la candidate du Rassemblement national accède à l’Elysée, que cette élection soit « l’électrochoc » pour rendre visibles des « Français qui en ont marre ».

Laurine, lycéenne âgée de 18 ans, et Mélina, 21 ans et employée dans le secteur du BTP, votent pour la première fois pour une élection présidentielle. Rencontrées séparément, elles expriment les mêmes attentes de « changement », la seconde reconnaissant toutefois « voter Le Pen comme le fait la famille ».

Elles demandent « plus de solutions pour la sécurité et l’immigration », même si les deux jeunes ne se sentent pas directement concernées par ces phénomènes.

« C’est la seule qui peut battre Macron, avance Laurine. Elle est proche des Français et connaît leurs besoins : plus de pouvoir d’achat, plus de garanties pour l’emploi et pour l’avenir des jeunes… »

La carte sociale

L’argument social est aussi décisif pour Nathalie, femme au foyer depuis la naissance de ses enfants, et résidant à Floirac (où Le Pen a fait 34,68% ce dimanche) :

« La retraite à 65 ans [proposition d’Emmanuel macron, NDLR], à un moment faut arrêter, râle la trentenaire. Le Pen propose les 60 ans et les 40 annuités. Macron, je ne peux plus le voir en peinture. Et si on arrête d’importer du pétrole ou du blé de Russie, qui va payer plus cher ? »

Stéphane, agent d’entretien de 56 ans rencontré à Cérons, village de la rive gauche, en face de Cadillac, trouve également Marine Le Pen « plus proche des gens ».

« Et elle défend aussi les animaux, salue ce militant du Parti animaliste. Pourquoi pas essayer ? On a essayé tout le monde sauf le RN. Et on a eu Macron pendant 5 ans, et il y a eu les Gilets jaunes. Marine Le Pen, elle s’est adoucie, elle est un peu plus modérée que son père. »

Assistanat

Un point revient régulièrement parmi les électeurs de la candidate RN rencontrés à la sortie des bureaux de vote : la colère contre des étrangers ou des « assistés » de leur entourage « à qui on a tout donné – logement, RSA… », quand des Français triment ou se retrouvent à la rue.

Se rangeant dans les classes moyennes inférieures, ils estiment avoir moins de droits que d’autres gagnant légèrement moins qu’eux. Anthony, 36 ans, dénonce par exemple le fait d’avoir perdu 300 euros d’aides de la CAF simplement parce que sa femme, assistante maternelle, a pendant quelques mois gagné plus car elle a été autorisée à garder un enfant supplémentaire pendant l’épidémie.

« On a dépassé les seuils et on s’est alors dit qu’il valait mieux faire un enfant pour redescendre d’un cran », explique ce responsable d’exploitation dans une entreprise de dépollution..

Plutôt que de venir en aide aux plus modestes, le jeune homme pense qu’il faut des mesures profitant à tous, et salue donc la proposition de Marine Le Pen de baisser la TVA sur les biens essentiels. Une idée que le RN ne sera pas en mesure d’appliquer.

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Photo : VB/Rue89 Bordeaux

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