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Des espaces en non-mixité pour aider les femmes à se lancer dans les sports de glisse

Longtemps reléguées sur le banc des spectateurs et pas ou peu représentées dans les compétitions professionnelles, les femmes s’approprient aujourd’hui de plus en plus le surf et le skate en créant des espaces en non-mixité à Bordeaux et en Gironde. Toutefois, elles ne sont encore qu’une minorité face à des espaces de pratique toujours largement dominés par des hommes.

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Des espaces en non-mixité pour aider les femmes à se lancer dans les sports de glisse

Pour encourager et développer la pratique féminine du surf et du skate, des initiatives en non-mixité se lancent à Bordeaux. C’est le cas des « Lev’elle up sessions », un créneau horaire de 19h à 21h le dimanche où le skatepark de Darwin est réservé aux femmes. Mis en place en mai 2021, le groupe Facebook associé à la session compte plus de 150 membres.

Parallèlement, dans le monde du surf, Margot Gourmelen a lancé à Bordeaux en décembre 2021 la start-up « Les femmes prennent le large », dont la plateforme web encore en construction consiste à mettre en lien gratuitement les surfeuses pour partager leurs sessions et rendre ce sport plus accessible, moins intimidant. La créatrice de ce site a déjà mis en place un compte Instagram qui fédère déjà 2 500 personnes.

« L’esprit compétition des garçons me dérange »

À l’origine de ces deux initiatives, un même constat : il existe des freins qui empêchent certaines femmes de se lancer ou de continuer la pratique du surf et du skate.

« Toutes les filles n’en ont pas forcément besoin pour se lancer ou se motiver, mais on a remarqué que certaines ont parfois envie de se retrouver entre elles parce que ça les rassure, c’est plus facile pour elles » témoigne Georgina, membre de l’association Darwin à l’origine des « Lev’elle up sessions ».

Aurore, débutante en skate rencontrée à la « Lev’elle up sessions » a toujours eu peur de se confronter à un skatepark rempli d’hommes, tout en ayant envie d’apprendre le skate :

« J’ai du mal avec le regard des hommes qui me donne souvent l’impression d’être un bout de viande. C’est aussi l’esprit de compétition qui se dégage des skateparks qui me dérange ».

(Stig Nygaard/Wikimedia Commons) Photos : Water Dancer /Wikimedia Commons

Elle est venue chercher dans les « Lev’elle up sessions » des rencontres, un cadre d’entraide, plus sécurisant pour débuter, dans le skatepark de Darwin bien plus tranquille et vidé de son effervescence habituelle. Elsa, skateuse depuis deux ans, qui a débuté de son côté en-dehors des « Lev’elle up sessions », ajoute :

« Quand j’ai commencé, les garçons dans le skatepark ne faisaient pas attention à moi, je me sentais seule mais ça m’a endurcie ». 

Aussi, l’objectif de ces initiatives se rejoint : faire en sorte que les femmes soient moins isolées dans leur pratique, se sentent plus en sécurité et en confiance.

Manspreading-les-flots

En plus d’un problème du débutant qui concerne autant les filles que les garçons – lenteur de la progression, découragement – les femmes font face à des espaces de pratiques largement dominés par des hommes :

« En Gironde, je ne vois presque que des hommes sur les spots de surf, ce qui n’aide pas certaines femmes à se sentir à l’aise », affirme Cécile, pratiquante en surf depuis quatre ans et depuis octobre dernier en Gironde, après un séjour en Amérique du Sud. « Selon les spots de surf et lorsque les conditions météorologiques sont optimales, je trouve que l’ambiance peut être peu chaleureuse, très compétitive. »

Bien qu’il soit difficile d’évaluer précisément le nombre de pratiquants en surf et en skate en France, en raison de la faible proportion de licenciés, les chiffres de la Fédération Française de Surf (FFS) peuvent donner une indication sur le ratio hommes/femmes dans ce sport. En 2020, sur 80 000 licenciés à la FFS, 35 % étaient des femmes, pour 65 % étaient des hommes. 

« On s’adresse à ces femmes qui sont bloquées, qui ont peur du jugement des autres, qui ne se sentent pas légitimes à aller vers ce sport bien qu’elles en aient envie. Ces femmes-là ont l’idée que la pratique entre femmes est bienveillante, qu’il y a du partage et de l’entraide » explique Margot.

Mœurs et stéréotypes

Mais alors pourquoi les femmes pratiquent-elles moins que les hommes ? Les « sports extrêmes » dont font partie le surf et le skate véhiculent des images de danger, de courage, de blessures, d’exploits sportifs, plutôt associées à la masculinité. 

« Depuis l’enfance, on a grandi dans ce monde où les filles font de la danse et les garçons font des activités considérées comme plus casse-cou. On a intégré dans nos mœurs le fait que les filles n’ont pas envie de se faire mal : en faisant du skate, on a toujours des bleus » estime Georgina. 

D’autant plus qu’historiquement, les hommes ont été les premiers à se saisir de ces sports. Les garçons commencent à les pratiquer plus tôt que les femmes, et ont donc des niveaux plus élevés à âge égal. Ce sont aussi des codes masculins qui ont été diffusés dans ces sports, tandis que les médias, notamment la publicité, maintiennent une certaine représentation des pratiquantes de surf et de skate. 

« Le marketing du surf diffuse une image très sexualisée et standardisée de la femme surfeuse au physique souvent décrit comme parfait. Certaines filles ne s’y retrouvent pas et ont peur d’être ridicule face à cet idéal », explique Cécile. 

« Les choses sont en train de bouger »

Si les femmes représentent encore aujourd’hui une minorité dans la pratique de ces sports, « les choses sont en train de bouger » juge Margot. L’accès à ces sports s’est démocratisé, et les matériels ont évolué pour mieux correspondre au physique et aux besoins des femmes.

C’est notamment le cas des combinaisons de surf, qui étaient auparavant seulement adaptées à la morphologie masculine. Aujourd’hui, alors que le surf s’est popularisé, les marques d’équipements de surf ont désormais toutes une large gamme de produits adaptée aux corps des femmes.

La représentation des femmes dans le monde compétitif du surf et du skate s’est également améliorée, comme s’en réjouit Georgina, notamment depuis que le skate et le surf sont devenus des disciplines olympiques en 2020 : 

« À la télévision, aux Jeux Olympiques, on voit plus de mixité, avec des filles dont le niveau est en train de rattraper peu à peu celui des garçons. Toutes les petites filles qui sont en train de grandir avec ça peuvent s’y identifier et se dire qu’elles aussi sont capables de faire des sports extrêmes. »

Si les espaces de non-mixité comme « Lev’elles up sessions » et « Les femmes prennent le large » ont pour but de développer la pratique féminine du skate et du surf, c’est pour ensuite faciliter l’intégration de ces femmes dans des milieux mixtes. Autrement dit, leur donner la confiance nécessaire pour se frotter à des espaces de pratique au niveau plus exigeant. « Le but, c’est que cette session disparaisse » lance Georgina, dans un horizon où les femmes seront aussi présentes que les hommes sur l’eau et dans les skateparks… 


#darwin

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