À première vue, on pourrait penser que l’EcoVillage d’Enfants ressemble à n’importe quel lotissement de maisons individuelles, installé au milieu de champs et de forêts paisibles de la petite commune de Sablons (1350 habitants). Pourtant, ce site est le premier en son genre à ouvrir en Gironde : il permet de réunir des fratries d’enfants placés, au lieu de les séparer dans différentes familles d’accueil ou dans des Maisons d’enfants à caractère social (MECS).
Ce type d’accueil alternatif reste néanmoins marginal : il concerne seulement 2,5 % des enfants placés en France, contre 75 % en MECS. Mais il est indispensable depuis la loi Taquet qui impose de prévoir des structures permettant de ne pas séparer les fratries.
« Préserver la fratrie permet de préserver le chemin de vie des enfants », estime Jean-Luc Gleyze, président du Département de la Gironde.
Une « vie de famille »
Les collectivités locales ont financé la construction de ce site à hauteur de 7 millions d’euros. Le Département abonde son budget de fonctionnement à raison de 176 euros par enfant et par jour. Sa gestion a été confiée la gestion à la Fondation Action Enfance à l’issue d’un appel à projets. Cette fondation reconnue d’utilité publique a ouvert 14 villages similaires en France, qui accueillent environ 1000 enfants sur tout le territoire.
Elle dispose également du soutien de personnalités publiques. Marc Lièvremont, ancien sélectionneur de l’Équipe de France de rugby et joueur sélectionné 25 fois en Equipe de France, est également aîné d’une fratrie de huit enfants et parrain de la fondation Action Enfance depuis 2004. Il était présent à l’inauguration de l’EcoVillage, où il a salué la concrétisation de ce projet et remercié le travail des éducateurs.
« Les enfants accueillis sont majoritairement placés sur décision de justice après enquête sociale, reprend Francis Vacherat. Soit parce qu’ils sont négligés, soit parce qu’ils sont maltraités, victimes de violences physiques, psychiques ou même sexuelles. Mais tous ont des histoires très différentes. Ils sont scolarisés à l’école publique, ils ont des activités sportives, nous les accompagnons lorsqu’ils préparent des études. Nous les préparons à un retour en famille parfois.
Le fonctionnement de cette structure d’accueil se veut le plus près possible d’une « vie de famille », grâce à un lieu de vie aux dimensions plus réduites que d’autres structures d’accueil. Les enfants, d’une moyenne d’âge de sept ans, vivent jusqu’à six dans une maison individuelle, où ils disposent chacun d’une chambre personnelle.
Exemplaire
Au sein de cette maison, ils sont encadrés par quatre éducateurs qui vivent avec eux tout au long de l’année, en s’alternant par un roulement tous les huit jours. 47 salariés travaillent actuellement sur le site. La prise de contact avec ces enfants qui ont connu des maltraitances peut se révéler délicate, comme en témoigne une éducatrice :
« Le plus difficile, c’est d’établir une relation de confiance avec les enfants, ça prend beaucoup de temps. »
La vie au sein des maisons est particulièrement autonome : les éducateurs s’occupent de la majeure partie des tâches ménagères, ils subviennent aux besoins des enfants et disposent de leurs propres espaces (bureau, chambre) à l’intérieur de la maison. Des activités, des repas et des sorties peuvent être organisées avec d’autres maisons, qui fonctionnent comme une petite communauté.
L’EcoVillage se veut aussi exemplaire sur le plan des enjeux liés au développement durable. A ossature bois, certifiées HQE (haute qualité environnementale), les maisons ont une performance énergétique élevée, des panneaux photovoltaïques, des réservoirs de récupération de l’eau de pluie… Des nichoirs et des hôtels à insectes ont également été installés dans le village.
S’intégrer
Si les enfants ont pu s’installer en janvier dans les maisons tout juste sorties de terre, ils ont été hébergés dès la rentrée 2020 dans des préfabriqués à proximité du chantier. Cette installation précoce des enfants leur a permis de « s’intégrer à la vie locale, de prendre leurs marques », explique Pierre Lecomte, président de la fondation Action Enfance. Il a ainsi fallu mener en amont un « travail d’inclusion des enfants dans le village, de sensibilisation auprès de la municipalité, de l’équipe enseignante, des habitants », témoigne Jean-Luc Gleyze.
Et après ? Là où l’EcoVillage ou d’autres structures d’accueil d’enfants placés accompagne les adolescents jusqu’à leurs 18 ans, d’autres systèmes sont mis en place pour suivre les jeunes à l’âge adulte. Le contrat jeune majeur permet ainsi aux anciens enfants placés de continuer à bénéficier d’aides pour se loger, trouver un emploi, étudier, jusqu’à leurs 21 ans, voire au-delà dans certaines situations.
La fondation Action Enfance met également en place un accompagnement après le placement :
« Les jeunes sont aidés à s’emparer des dispositifs de droit commun dont ils peuvent bénéficier à leur majorité », indique Pierre Lecomte.
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