Sempé n’est plus. Celui qui avait marqué le dessin de presse avec un trait unique a tiré sa révérence à l’âge de 89 ans. Le dessinateur natif de Pessac « est décédé paisiblement [ce jeudi] soir 11 août dans sa résidence de vacances, entouré de sa femme et de ses amis proches », a déclaré Marc Lecarpentier, son biographe et ami, à l’AFP.
Après avoir été livreur à vélo, vendeur de dentifrice, et employé d’un courtier en vins cours de Verdun à Bordeaux, il laisse derrière lui une œuvre phénoménale. Il a signé de nombreux albums : « Saint Tropez », « Tout se complique », et surtout le « Petit Nicolas », vendu à 15 millions d’exemplaires et diffusé dans une quarantaine de pays.
Dessinateur à succès
L’enfance de Sempé à Pessac a été difficile. Enfant naturel, battu et bègue, il commence à dessiner à l’âge de 12 ans et quitte l’école à 14. A 18 ans, en 1950, il vend ses premières planches au journal Sud Ouest Dimanche. Ses dessins sont signés « DRO » (de « to draw », dessiner en anglais). En 1951, il quitte le port de la Lune pour la capitale française.
« Quand je suis arrivé à Paris, j’ai trouvé les Parisiens très gais. Je venais de Bordeaux où les gens n’étaient pas naturellement souriants. J’ai été tout de suite enchanté par le métro, les autobus, la fièvre de la ville. Et surtout j’ai fait beaucoup de vélo. Pendant trente ans, je suis allé partout à bicyclette », raconte-t-il dans le catalogue de la grande rétrospective qui lui a été consacrée à Paris en 2011.
Dans le bouillonnement de la capitale il fréquente des dessinateurs comme Chaval et, en 1954, Sempé rencontre son « premier ami », René Goscinny. La rencontre avec le scénariste (entre autres) d’Astérix est décisive et aboutit à une collaboration : « Le Petit Nicolas », histoire de Goscinny illustrée par Sempé, parait dans Le Moustique, un hebdomadaire belge. Ensuite, Jean-Jacques Sempé publie ses dessins dans France Dimanche, Paris Match, Pilote, Figaro, Télérama, Le Nouvel Observateur… sans oublier la consécration en 1978, le New Yorker.
En 2014, il réalise une série de pièces pour la Monnaie de Paris pour la série les Valeurs de la République, évoquant la liberté, l’égalité et la fraternité. Un parcours parfait, exception faite de la révélation par le journal Le Monde de l’apparition de Sempé dans les Panama Papers, en tant que détenteur d’une société offshore.
« Sempé en liberté » à Bordeaux
Jean-Jacques Sempé retrouve sa région natale en 2019. Le Musée Mer Marine à Bordeaux lui consacre une exposition d’envergure pour les 60 ans du Petit Nicolas. 300 œuvres y sont exposées. L’ensemble est le fruit d’un travail minutieux des commissaires qui ont fouillé les archives du dessinateur et déniché des dessins inédits.
« Il faut imaginer Sempé toujours au travail, du matin au soir, un crayon dans une main, une cigarette dans l’autre – électronique depuis un certain temps –, face à une feuille blanche. Il attend que l’inspiration lui vienne. Il a toujours travaillé et toujours fait ce qu’il aime : le dessin d’humour », raconte Marc Lecarpentier, ami du dessinateur.
Ces dessins originaux révélaient, au-delà de la caricature, des facettes de la société et ses rapports à la politique, à l’industrialisation, et au progrès. Jean-Jacques Sempé marquera son époque non seulement par la légèreté de son dessin, mais aussi par la pertinence des sujets qu’il y glissait.
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