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Bataille des retraites : Le temps est capital

A l’heure où un projet de loi sur la réforme des retraites est débattu à l’Assemblée nationale, le député de Gironde, Nicolas Thierry, signe une tribune pour mettre en exergue deux visions du « temps humain ».

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Bataille des retraites : Le temps est capital

La bataille sociale majeure qui se joue autour de la réforme des retraites n’est pas un simple débat comptable destiné à équilibrer notre système par répartition. Certes, le régime risque effectivement d’être en déficit sur les 20 à 25 années qui viennent, mais un déficit temporaire, un déficit limité. Taxer les super profits, mettre une taxe de 2% sur la fortune des 42 milliardaires français, lutter réellement contre l’évasion fiscale ou encore aligner les salaires des femmes sur celui des hommes, ce qui augmenterait mécaniquement les cotisations, sont autant de solutions qui sont à notre portée. 

Le Gouvernement, à l’opposé de ces choix, a décidé de faire du report de l’âge de départ à la retraite le principal levier pour assurer l’équilibre du système. Cette décision revient à faire porter le poids de la réforme sur celles et ceux qui ont commencé à travailler le plus tôt, dont les métiers sont souvent les plus pénibles. 

En réalité, ici s’affrontent deux visions de sociétés diamétralement opposées. 

« Le temps humain n’est pas condamné à n’être que du temps de travail »

L’objet de cet affrontement, c’est le temps de vie. Le temps, c’est la chose la plus commune et la moins équitablement partagée. C’est depuis toujours un objet de bataille politique. 

Toute l’histoire du mouvement ouvrier c’est le refus du sacrifice des femmes et des hommes, qui payaient de leur santé et de leur vie, le profit qui alimentait les caisses d’une minorité. 

Toute l’histoire du mouvement écologiste, c’est le refus du productivisme aveugle, de cette illusion dévastatrice que nous pourrions produire toujours plus, sans aucune limite. 

On nous oppose systématiquement l’argument de l’augmentation de l’espérance de vie pour justifier la nécessité d’allonger la durée d’activité. Donc, plus vieux vous vivrez plus vieux vous travaillerez selon eux. 

Cette affirmation est hautement contestable. Parce que le temps humain n’est pas condamné à n’être que du temps de travail, que du temps productif. Réduire l’humain à sa seule fonction de production en dit très long sur la logique qui sous-tend la réforme du Gouvernement. 

Nous vivons dans une société où 2,5 millions de personnes sont en burn-out. Nous vivons une époque où le temps ne cesse d’accélérer, constamment, jusqu’à l’épuisement. Nous vivons la dictature du rendement immédiat pour l’actionnaire, de la dictature des réactions immédiates sur les réseaux sociaux, la dictature du temps imposé. 

Il faut reposer la question du temps libéré. 

« Deux conceptions du monde différentes s’affrontent » 

La réforme souhaitée par le Gouvernement viendrait entériner une conception qui ferait de l’individu, de ses cotisations et de sa retraite, un simple enjeu financier. Aucune leçon n’a été tirée de la crise sanitaire et des conséquences qu’elle a eu sur notre société et notre rapport au travail. 

Or notre vision du travail et de la retraite doit changer. Réduire le temps de travail n’est-il pas – et depuis longtemps – l’horizon de nos luttes sociales, et le sens du progrès humain ? 

Les travailleurs à un moment de leur vie doivent pouvoir bénéficier d’un temps libéré, ce qui leur permet de décider eux même de quelle manière ils veulent être utiles, contribuer, exister au sein de la société. 

Pour le dire autrement, les retraites sont le temps reconquis, le moment où les femmes et les hommes ouvrent une nouvelle page de la vie, après des décennies de labeur. Elles sont la réalité du progrès humain, qui ouvre le temps libre, consacré aux liens, à la gratuité, au don, face à l’impératif de production et de croissance à tout prix. 

Autour du recul de l’âge légal de la retraite c’est bien deux conceptions du monde différentes, voir même du sens de la vie, qui s’affrontent. 

Nicolas THIERRY 
Député EELV – NUPES de la 2ecirconscription de Gironde


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