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« Bat’ le veilleur », par Alain-Julien Rudefoucauld, l’enfance aux portes de la violence

« Bat’ le veilleur », le dernier livre de l’auteur algéro-français Alain-Julien Rudefoucauld est paru chez Serge Safran éditeur. Délicat portrait d’un enfant fragile perturbé par la séparation de ses parents, jusqu’aux envies de meurtre.

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« Bat’ le veilleur », par Alain-Julien Rudefoucauld, l’enfance aux portes de la violence

Le livre de Alain-Julien Rudefoucaud est un véritable tour de force. Parvenir à nous faire pénétrer dans les pensées de Bat’ et les restituer grâce à un travail sur la langue, créatif et parfaitement adapté au sujet traité, n’est pas donné à tout le monde.

Bat’ est handicapé, les choses ne sont pas simples pour lui, trop de choses dans sa tête et pas toujours les mots pour les dire, trop de souvenirs dont il ne sait pas toujours dans quel tiroir il les a rangés. Et pourtant il cherche à comprendre et à analyser le monde autour de lui.

Le monde de Bat’

Or le monde n’est pas simple, faire du ski lui est impossible et ce ne serait pas grave si son père n’était pas moniteur à Gourette et ne se cachait pour lui manifester son mépris. Mais, il s’est barré, le père, avec une jeunette qui passait là ; laissant derrière lui femme et enfants.

Tentative de suicide de la mère, et c’est Bat’ qui a pu donner l’alerte, longue hospitalisation que Bat’ supporte grâce à sa grand-mère et sa petite sœur Laurène qui veille avec tant d’attention sur lui.

Et voici que le père revient, une loche qui passe son temps à dormir, comme si de rien n’était. Bat’ ne le supporte pas, il ne peut pas le sentir au sens propre du terme, il a pour lui une haine viscérale et il rêve de le tuer – la mort du père n’est plus un simple fantasme et l’on est toujours près d’un passage à l’acte, puisque, si souvent, dans la tête de Bat’, réalité et imaginaire se confondent.

Tuer le père

Bat’ a une qualité à laquelle il doit son surnom, il manie la batte avec une force et une adresse qui émerveillent ses copains quand ils jouent à la thèque. Et quel meilleur instrument pour écrabouiller ce malfaisant ?

« Pour Bat’, la chose est entendue ; suffit de voir Papa couché comme une loche sur son lit pour penser qu’il doit être jeté aux ordures. Il passerait, d’un coup, de l’autre côté chez les morts, personne ne le noterait, et y en aurait peut-être des qui s’en foutraient, et d’autres qui seraient bien contents. Et voilà, l’élimination des déchets, ça existe. Alors, oui, comme ça sur le lit qu’elle écrase sans même demander la permission, Bat’ pourrait bien la foutre à la benne, la grosse limace vautrée avec son bras qui dépasse du matelas. Un bon coup de batte sur l’avant-bras, ça pèterait d’un coup, tiens. Même pas la peine de forcer pour ça. »

Il y a chez Rudefoucauld une véritable empathie qui fait qu’on l’aime ce gamin qui se dépatouille comme il peut avec ses propres embrouilles et celles que les adultes ne manquent pas d’y ajouter. On ne déflorera pas la fin de l’histoire. Mais on admirera la capacité de l’auteur à mettre en mots les difficultés que Bat’ ne cesse d’avoir avec eux. Ce livre est sans conteste un des plus réussis de Rudefoucauld.


#Enfance

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