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La densité de vignes augmente le risque de leucémie chez l’enfant

Une vaste étude de l’Inserm révèle que plus la surface cultivée en vignes est importante à proximité des habitations, plus le risque de contracter une leucémie, lié à l’exposition aux pesticides, augmente chez les enfants. Une observation qui se vérifie moins en Nouvelle-Aquitaine.

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La densité de vignes augmente le risque de leucémie chez l’enfant
Un épandage de pesticides en Gironde

Habiter à moins d’un kilomètre d’une vigne n’augmente pas le risque de leucémie chez l’enfant, indique une étude de l’Inserm révélée ce mercredi. En revanche, vivre à proximité de plusieurs exploitations viticoles dans un périmètre de 1000 mètres autour de son logement peut accroitre significativement ce risque, en fonction de la surface couverte.

« En moyenne pour chaque augmentation de 10% de la part couverte par les vignes dans le périmètre de 1000 mètres, le risque de leucémie lymphoblastique [qui représente 80% des cas de leucémie chez l’enfant, NDLR] augmente de près de 10% », indique l’institut de recherche dans la présentation des conclusions de ces travaux.

Menés dans toute la France métropolitaine dans le cadre du programme GEOCAP de l’Inserm, en collaboration avec Santé publique France, leur objectif était d’évaluer l’impact de l’utilisation des pesticides dans le déclenchement des leucémies.

La viticulture mobilise 20% des pesticides

Les résultats, publiés ce mercredi dans la revue Environnemental Health Perspectives, s’appuient sur les données agricoles et le Registre national des cancers de l’enfant (RNCE) sur la période 2006-2013. Les chercheurs ont estimé la présence et la surface de viticulture autour de l’adresse de résidence des 3 711 enfants de moins de 15 ans atteints de leucémie. Cette estimation a également été réalisée pour un groupe témoin de 40 196 enfants du même âge.

La volonté de se focaliser sur la viticulture s’explique par la quantité de pesticides qu’elle mobilise : avec près de 800 000 hectares, soit 3,7 % de la surface agricole française, elle consomme 20 % des produits phytosanitaires. Sans doute plus encore en Nouvelle-Aquitaine, où sur les près de 30 000 tonnes de pesticides vendues en 2021, 40% étaient des fongicides, principalement utilisés contre le mildiou de la vigne.

La Nouvelle-Aquitaine moins exposée ?

Les pesticides sont suspectés d’être un important facteur de risque pour les cancers pédiatriques, en particulier les leucémies, une maladie rare chez l’enfant. 45 cas pour un million d’enfants par an, soit environ 500 diagnostiquées chaque année, représentent 30 % de tous les cancers pédiatriques.

En 2015, l’Institut de veille sanitaire révélait une incidence des cancers pédiatriques six fois plus importante à Preignac (Gironde) qu’en France, et la mobilisation de parents et de médecins avait poussé l’Inserm à engager des recherches approfondies. En 2020, l’équipe de l’Inserm à l’origine des recherches présentées ce mercredi, avait démontré qu’il y avait plus de risques de leucémies pour les enfants dans les communes où l’on cultive la vigne.

Pourtant, alors qu’en Nouvelle-Aquitaine, 20% des enfants contrôlés vivent à proximité d’exploitations viticoles (contre 40% en Occitanie), et que le Bordelais est la plus grande surface viticole de France, ces derniers travaux de l’Inserm n’établissent pas de corrélation entre la densité de vignes et le risque d’apparition de leucémie.

Cette association est « plus marquée dans 5 des 12 régions (Centre-Val-de-Loire, Grand-Est, Pays de la Loire, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur-Corse) », et n’a pas été avérée en Nouvelle-Aquitaine, sans autre explication que « l’hétérogénéité de l’utilisation des pesticides ». Cela « nécessite des investigations plus poussées », soulignent les auteurs de l’étude.

Conséquences politiques

L’annonce des résultats de l’Inserm a été plusieurs fois repoussée, rappellent ce jour nos confrères de Reporterre. Une première présentation – alors que l’étude n’était pas encore publiée – fin juin au ministère de la Santé, avait fait réagir les associations anti-pesticides, comme Générations Futures. Elles demandaient notamment à l’Etat de revoir le décret sur les zones non traitées par des pesticides de synthèse. Ce mercredi, cette même ONG enfonce le clou :

« Le discours sur l’absence de risques pour les populations vivant au-delà de 5 m et 10 m des cultures (basses et hautes) ne tient pas. Car c’est dans un rayon de 1000 m que vient d’être mis en évidence cette augmentation de risque de leucémies. Nous appelons donc à la raison et à l’application du principe de précaution et à une extension forte des zones non traitées en bordure des cultures. »

Générations Futures demande par ailleurs « un accès complet et en temps réel aux données d’utilisation des pesticides à la parcelle » ainsi qu’un « plan de conversion de notre agriculture vers un modèle agricole vraiment durable, tel que l’agriculture biologique ». Et donc revenir sur la baisse « inacceptable » du soutien de l’Etat à cette dernière.


#pesticides

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